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Wallonie - Craie > Recours 907-1

Craie - Decision 907-1

  • Date : 2018-06-25
  • Copie locale : 907-1.pdf
  • Mots-clef : informations environnementales - mesures administratives - faisabilité juridique d’une pareille mesure - loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration - secret professionnel des avocats- droit à un procès équitable

Transposition

                        Commission de recours pour le droit
                         d’accès à l’information en matière
                                  d’environnement



                                 Séance du 25 juin 2018




RECOURS N° 907

En cause de :    l’association de fait «


                 Partie requérante,


Contre :         la ville de Namur
                 ayant pour conseil Maître Jean Bourtembourg, au cabinet duquel il est fait
                 élection de domicile
                 Rue de Suisse, 24

                 1060 BRUXELLES

                 Partie adverse.




        Vu la requête du 7 avril 2018, par laquelle la partie requérante a introduit le recours
prévu à l’article D.20.6 du livre Ier du code de l’environnement, consécutif à l’absence de
suite réservée à sa demande d’obtenir une copie des rapports, rédigés par le cabinet d’avocats
de Liedekerke, à propos de la faisabilité juridique du « switch », proposé par le Forum
Citoyen Namur, entre l’îlot du square Léopold et la propriété communale située rue de Fer,
pour construire un nouvel hôtel de ville au square Léopold et un centre commercial en lieu et
place de l’hôtel de ville actuel ;

       Vu l’accusé de réception de la requête du 20 avril 2018 ;

       Vu la notification de la requête à la partie adverse, en date du 20 avril 2018 ;

       Vu la décision de la Commission du 24 mai 2018 prolongeant le délai pour statuer ;
        Vu la décision de la Commission du 29 mai 2018 enjoignant à la partie adverse de lui
communiquer une copie des rapports, rédigés par le cabinet d’avocats de Liedekerke, à propos
de la faisabilité juridique du « switch » précité ;

        Considérant que la partie adverse a communiqué à la Commission une copie des
rapports en question ; qu’il s’agit de deux avis établis par les avocats Frank Judo et Aurélien
Vandeburie, du cabinet d’avocats de Liedekerke, et adressés à titre confidentiel à la partie
adverse en novembre 2017 ; que ces avis comportent un examen circonstancié et argumenté
de la faisabilité juridique d’une proposition, émanant d’une association d’habitants, le Forum
Citoyen Namur, consistant à établir un « switch », c’est-à-dire un échange, entre l’îlot du
square Léopold et la propriété communale située rue de Fer, pour construire un nouvel hôtel
de ville au square Léopold et un centre commercial en lieu et place de l’hôtel de ville actuel ;
qu’ils soulignent et énumèrent de manière précise les risques de critique que suscite cette
proposition au regard de la législation relative aux marchés publics et des principes d’égalité,
de non-discrimination et de concurrence, ainsi que les risques d’action en justice auxquels sa
mise en œuvre pourrait donner lieu ;

       1. Quant au point de savoir si la demande d’information entre dans le champ
       d’application des dispositions du livre Ier du code de l’environnement relatives à
       l’accès à l’information

       Considérant que, dans la note d’observations qu’elle a adressée à la Commission le 23
mai 2018, la partie adverse considère que les informations demandées par la partie requérante
ne sont pas des informations environnementales soumises aux dispositions du livre Ier du
code de l’environnement qui sont relatives à l’accès à l’information ; que, soulignant que « les
rapports du cabinet d’avocats examinent la proposition d’échange du ‘Forum citoyen’ au
regard de la législation relative aux marchés publics et aux principes d’égalité, de non-
discrimination et de concurrence », elle soutient que « ces documents n’ont aucune portée
environnementale, ils se limitent à analyser si le projet d’aménagement du territoire proposé
est envisageable sur un plan juridique et non environnemental » ; que la partie adverse
rappelle aussi que l’indication de la règle juridique sur la base de laquelle une autorité
publique agit ne constitue pas une information environnementale ;

        Considérant qu’en vertu de la phrase introductive et du littera c) de l’article D.6, 11°,
du livre Ier du code de l’environnement, la notion d’« information environnementale » couvre
« toute information, détenue par une autorité publique, concernant (…) les mesures (y
compris les mesures administratives, telles que les politiques, les dispositions législatives, les
plans, les programmes, les accords environnementaux) ou les activités » qui, en substance, ont
ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur l’environnement, ainsi que les mesures ou
activités destinées à protéger celui-ci ; que le terme « mesures » au sens de l’article D.6, 11°,
c), du livre Ier du code de l’environnement est à entendre au sens usuel et ne se prête pas à
être interprété restrictivement, le membre de phrase « y compris les mesures administratives,
telles que les politiques, les dispositions législatives, les plans, les programmes, les accords
environnementaux » se limitant à donner des exemples, non exhaustifs, de mesures ;

        Considérant que le « switch » dont le cabinet d’avocats de Liedekerke a examiné la
faisabilité juridique constitue une « mesure » au sens de la disposition précitée, dès lors que,
comme l’indique la partie adverse dans un document mis à la disposition du public et joint en
annexe 1 à la requête, le scénario qu’il implique permettrait notamment de sauvegarder une
partie de l’espace vert au square Léopold ;
         Considérant qu’en vertu de la phrase introductive de l’article D.6, 11°, du livre Ier du
code de l’environnement, toute information, détenue par une autorité publique, concernant
une telle mesure constitue une information environnementale ; qu’il en va notamment ainsi,
comme en l’espèce, d’informations relatives à la faisabilité juridique d’une pareille mesure ;
que la thèse de la partie adverse suivant laquelle l’analyse d’un projet d’aménagement du
territoire constitue une information environnementale quand il s’agit d’examiner si ce projet
est envisageable sur un plan environnemental, mais ne constituerait pas une information
environnementale lorsque l’analyse porte sur le point de savoir si le projet est envisageable
sur un plan juridique, ne trouve aucun appui dans la disposition précitée ;

        Considérant qu’une demande visant uniquement à obtenir d’une autorité publique
qu’elle indique sur quelle règle juridique elle se fonde pour agir dans un sens déterminé
n’entre pas dans le champ d’application des dispositions du livre Ier du code de
l’environnement qui sont relatives à l’accès à l’information ; qu’en effet, ces dispositions
permettent seulement de demander l’accès à des données préexistantes, et non pas de
demander aux autorités d’établir un document nouveau en vue de justifier leur action ; qu’en
l’espèce, la partie requérante demande à la partie adverse de lui communiquer des documents
préexistants, et non pas d’établir un document nouveau tendant à expliquer la non-faisabilité
juridique du « switch » ; que cette demande entre donc bien dans le champ d’application des
dispositions du livre Ier du code de l’environnement qui sont relatives à l’accès à
l’information ;

       2. Quant au point de savoir s’il convient d’appliquer, en l’espèce, l’article 6, § 2, 2°, de
       la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration

        Considérant que la partie adverse soutient que le recours doit être déclaré non fondé en
raison du fait que la communication des documents réclamés par la partie requérante porterait
atteinte au secret professionnel des avocats ; qu’elle se fonde à cette fin sur l’article 6, § 2, 2°,
de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration ; qu’en vertu de ladite
disposition, une demande de copie d'un document administratif doit être rejetée « si la
publication du document administratif porte atteinte (…) à une obligation de secret instaurée
par la loi » ; que la partie adverse souligne que la disposition invoquée « constitue une
dérogation absolue à la publicité dans la mesure où l’autorité est tenue de rejeter la demande
de consultation si cette dernière porte atteinte à une obligation de secret instaurée par la loi,
sans mettre en balance les intérêts en présence » ;

        Considérant qu’il convient de rappeler que l’accès aux informations
environnementales fait l’objet de dispositions contenues, d’une part, dans la Convention sur
l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la
justice en matière d’environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 et ratifiée par la Belgique
et, d’autre part, dans la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28
janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement ; que le
droit interne doit être compris, interprété et appliqué dans le respect de ces dispositions ;

       Considérant que la directive 2003/4/CE a remplacé la directive 90/313/CEE du
Conseil du 7 juin 1990 concernant la liberté d’accès à l’information en matière
d’environnement ; que, dans un arrêt du 26 juin 2003, Commission/France, C-233/00, la Cour
de justice de l’Union européenne a, après avoir constaté que la directive 90/313/CEE
énumérait de manière limitative les cas pouvant justifier un refus de communication
d’informations relatives à l’environnement, déclaré qu’une disposition de droit français
permettant aux autorités publiques de refuser la consultation ou la communication d’un
document administratif dont la diffusion porterait atteinte, « de façon générale, aux secrets
protégés par la loi », sans autre précision, méconnaissait la directive précitée, en ce qu’un tel
motif de refus ne figurait pas dans la liste limitative, fixée par la directive, des exceptions au
droit d’accès à l’information ; que, de même, ni la directive 2003/4/CE, ni la Convention
d’Aarhus ne prévoient qu’un texte puisse ériger en motif de refus de communication d’un
document le fait que la diffusion de celui-ci porterait atteinte à un « secret protégé par la loi »,
sans autre précision ; qu’une disposition qui, tel l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril 1994,
range l’atteinte « à une obligation de secret instaurée par la loi », sans autre précision, parmi
les motifs justifiant le refus de communication d’un document, est donc incompatible avec la
directive 2003/4/CE et avec la Convention d’Aarhus, et qu’elle ne peut dès lors s’appliquer en
cas de demande de communication d’informations environnementales ;

        Considérant, en outre, que l’article 4, §§ 3 et 4, de la Convention d’Aarhus et l’article
4, §§ 1er et 2, de la directive 2003/4/CE, qui fixent les cas dans lesquels une demande
d’information environnementale peut être refusée ou rejetée, sont formulées en ce sens que
l’autorité saisie d’une telle demande a la faculté - et non pas l’obligation - de refuser ou de
rejeter celle-ci ; qu’en vertu de l’art. 4, § 2, alinéa 2, de la directive 2003/4/CE, les motifs sur
lesquels une autorité peut se fonder pour refuser ou une rejeter une demande d’information
environnementale « sont interprétés de manière restrictive, en tenant compte dans le cas
d’espèce de l’intérêt que présenterait pour le public la divulgation de l’information » ; que la
même disposition ajoute que, « dans chaque cas particulier, l’intérêt public servi par la
divulgation est mis en balance avec l’intérêt servi par le refus de divulguer » ; que la Cour de
justice de l’Union européenne a précisé à ce sujet que l’article 4 de la directive « doit être
interprété en ce sens que la mise en balance qu’il prescrit de l’intérêt public servi par la
divulgation d’une information environnementale et de l’intérêt particulier servi par le refus de
divulguer doit être pratiquée dans chaque cas particulier soumis aux autorités compétentes,
quand bien même le législateur national déterminerait par une disposition à caractère général
des critères permettant de faciliter cette appréciation comparée des intérêts en présence »
(arrêt du 16 décembre 2010, Stichting Natuur en Milieu, C-266/09) ; qu’il s’ensuit qu’une
disposition qui, tel l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril 1994, impose à l’autorité saisie
d’une demande d’information l’obligation absolue de rejeter celle-ci pour un motif déterminé,
sans mettre en balance les intérêts en présence dans le cas particulier qui lui est soumis, est
incompatible avec la directive 2003/4/CE et avec la Convention d’Aarhus, et qu’elle ne peut
dès lors s’appliquer en cas de demande de communication d’informations environnementales
(voir en ce sens l’arrêt du Conseil d’État Verhaeghe et vzw Straatego, n° 239.363 du 11
octobre 2017) ;

        Considérant, au demeurant, que le législateur fédéral n’entend pas - ou, plus
exactement, n’entend plus appliquer aujourd’hui - l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril
1994 aux demandes d’informations environnementales, et ce, précisément, pour éviter toute
critique au regard des dispositions précitées de droit international et européen ;

       Considérant, en effet, que si, à l’origine, l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril 1994 a
été conçu pour s’appliquer à toutes demandes d’informations, y compris des demandes
d’informations environnementales, le législateur a toutefois, par une loi du 26 juin 2000,
modifié l’article 6 de la loi du 11 avril 1994 en y insérant un § 2bis, destiné à empêcher,
notamment, que le § 2, 2°, puisse être invoqué en cas de demande de documents
administratifs à caractère environnemental ; que les travaux préparatoires de la loi du 26 juin
2000 font apparaître que, par cette loi, le législateur a entendu répondre aux critiques de la
Commission européenne relatives à l’incompatibilité de plusieurs dispositions de la loi du 11
avril 1994 - notamment l’article 6, § 2, 2° - avec la directive 90/313/CEE (Doc. Ch., sess.
1999-2000, n° 604/1, spécialement pp. 4 à 6) ;

         Considérant que l’article 6, § 2bis, de la loi du 11 avril 1994 a, entre-temps, été
abrogé par la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à l’information en matière
d’environnement ; que la loi du 5 août 2006 contient l’ensemble des dispositions qui ont pour
objet de régler spécifiquement, au niveau fédéral, l’accès aux informations
environnementales ; que, comme l’indiquent les travaux préparatoires de ladite loi,
l’établissement d’un dispositif propre à l’accès aux informations environnementales est
justifié par la volonté de tenir compte de « la spécificité introduite tant au niveau international
qu’au niveau communautaire pour les informations environnementales », les règles
internationales et communautaires auxquelles il est ainsi renvoyé étant celles qui sont
contenues dans la Convention d’Aarhus et dans la directive 2003/4/CE (Doc. Ch., sess. 2005-
2006, n° 2511/1, p. 10) ; qu’en raison de cette spécificité, il a été jugé « plus approprié » que
l’accès aux informations environnementales fasse l’objet de règles figurant dans une loi
propre à cette matière, plutôt que dans un corps de règles régissant la publicité de
l’administration de manière générale (ibid.) ; qu’en conséquence, dès l’entrée en vigueur de la
loi du 5 août 2006, « les dispositions de la loi de 1994 sur la publicité de l’administration ne
seront plus d’application aux informations environnementales » (ibid.) ; que l’article 6, § 2bis,
de la loi du 11 avril 1994 a ainsi perdu sa raison d’être, ce qui explique son abrogation ; qu’en
outre, l’entrée en vigueur de la loi du 5 août 2016 impliquant qu’aucune disposition de la loi
du 11 avril 1994 ne peut s’appliquer aux informations environnementales, c’est notamment le
cas de l’article 6, § 2, 2°, de cette loi ;

         Considérant que l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril 1994 ne peut donc être
invoqué pour justifier le refus de communiquer à la partie requérante les documents qu’elle a
sollicités ;

       3. Quant à l’atteinte que la divulgation des informations qui ont été demandées par la
       partie requérante porterait au secret professionnel des avocats, envisagé comme
       élément de garantie du droit à un procès équitable

       Considérant que, si l’article 6, § 2, 2°, de la loi du 11 avril 1994 ne peut être invoqué
pour justifier le refus de communiquer à la partie requérante les documents qu’elle a sollicités,
cette circonstance n’empêche pas que d’autres dispositions puissent fonder le refus de
communiquer ces documents en raison d’un risque d’atteinte au secret professionnel des
avocats qui en sont les auteurs ;

        Considérant qu’il en va notamment ainsi de l’article 27, § 1er, alinéa 1er, 5°, de la loi
précitée du 5 août 2006 et de l’article D.19, § 1er, alinéa 1er, c), du livre Ier du code de
l’environnement, qui permettent de limiter le droit d’accès aux informations
environnementales lorsqu’il apparaît que son exercice est susceptible de porter atteinte à la
possibilité pour toute personne d’être jugée équitablement ;

        Considérant qu’il importe en effet de rappeler que le secret professionnel de l’avocat
est l’un des principes fondamentaux sur lesquels repose l’organisation de la justice dans une
société démocratique ; qu’il est un élément essentiel des droits de la défense ; qu’il se rattache
ainsi aux exigences du droit à un procès équitable ; qu’il tend à ce que chacun puisse obtenir
l’assistance d’un avocat de la meilleure manière possible et dans le cadre d’une relation de
confiance, ce qui implique la garantie que tout ce qui est discuté et échangé - notamment la
correspondance - entre l’avocat et son client restera confidentiel ; qu’il s’applique, non
seulement à la représentation en justice du client par l’avocat, mais aussi aux conseils
juridiques donnés par celui-ci, même en dehors de toute procédure juridictionnelle ;

        Considérant que l’importance du secret de la correspondance échangée entre un avocat
et son client dans un cadre qui n’est pas ou pas encore contentieux a justement été soulignée
et précisée par la section de législation du Conseil d’État dans les termes suivants :

       « L’avocat doit pouvoir donner en toute liberté à son client les conseils et avis qu’il
       estime utiles, sans crainte de voir divulgués ses écrits confidentiels à des tiers. S’il sait
       que les consultations qu’il lui adresse seront lues par des tiers - qui seront peut-être
       bientôt en litige avec son client -, l’avocat ne s’exprimera pas en toute liberté. De
       même, le client hésitera à se confier librement à son avocat, craignant de voir ses
       propos repris dans une consultation qui pourra être lue par ces mêmes tiers. En outre,
       si le client n’a pas suivi les conseils de son avocat, on pourra, si la consultation est
       rendue publique, en tirer argument contre lui : l’intervention de l’avocat se retournerait
       ainsi contre son propre client. Ce sont donc des conditions essentielles du bon
       fonctionnement de la profession d’avocat qui sont en cause » (avis 54.460/2, donné le
       4 décembre 2013 sur une proposition de loi modifiant, en ce qui concerne le secret
       professionnel, la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration, Doc.
       Ch., sess. 2013-2014, n° 2764/2, pp. 4 et 5 ; avis 55.240/2, donné le 27 février 2014
       sur un amendement à la même proposition, Doc. Ch., sess. 2013-2014, n° 2764/4, p.
       4) ;

        Considérant que, si l’autorité peut ainsi refuser de communiquer une information
environnementale dont la diffusion est susceptible de porter atteinte au secret professionnel
des avocats, envisagé comme élément de garantie du droit à un procès équitable, il ressort
toutefois de la phrase introductive de l’article 27, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 août 2016 (lue
en tenant compte de l’article 4, § 2, alinéa 2, de la directive 2003/4/UE) et de l’article D.19, §
2, alinéa 1er, du livre Ier du code de l’environnement, que l’autorité ne peut prendre une
décision en ce sens qu’après avoir mis en balance, dans le cas particulier dont elle est saisie,
l’intérêt public servi par la divulgation du document avec l’intérêt servi par le refus de le
divulguer ;

        Considérant qu’en l’espèce, il convient de souligner que la partie adverse a, dans un
document mis à la disposition du public et joint en annexe 1 à la requête, établi une synthèse
de l’analyse effectuée par le cabinet d’avocats de Liedekerke à propos de la faisabilité
juridique de la proposition de « switch » ; que les éléments essentiels de cette analyse et des
conclusions tirées par les avocats figurent dans ledit document et ont ainsi été portés à la
connaissance du public ; que, dans ces conditions, l’intérêt du public à se voir communiquer
les avis donnés à la partie adverse par le cabinet de Liedekerke doit se comprendre comme
étant l’intérêt à prendre connaissance, non pas des éléments essentiels de l’analyse et des
conclusions de ces avis, qui ont déjà été divulgués, mais, plus spécifiquement, du détail de
ladite analyse et des arguments juridiques précis que contiennent les avis ;

       Considérant que, comme il se doit dans le cadre d’une demande d’accès à des
informations présentant la caractéristique d’être environnementales, la partie requérante étaye
par des considérations d’ordre environnemental l’intérêt que servirait la divulgation des
documents qu’elle réclame ; qu’ainsi, elle pose la question de savoir « [p]ourquoi (…) refuser
une copie des deux rapports, remis à la Ville par le cabinet de Liedekerke, à toute personne
justifiant d’un intérêt à un aménagement harmonieux du quartier nord de la Corbeille
comprenant le dernier espace arboré doté d’une végétation comprenant des arbres, dont
certains ont plus de 50 ans, donc jouant un rôle important pour les habitants et les voyageurs
fréquentant ce quartier de la gare, surtout durant cette période de changement climatique
entraînant une élévation de la température alarmante difficilement contrôlable à l’intérieur
d’une ville à certaines périodes de l’année » ; que, si légitime qu’il soit, l’intérêt qui sous-tend
ces considérations ne présente qu’un lien très limité avec l’intérêt à prendre connaissance du
contenu détaillé de l’examen juridique circonstancié et argumenté de la faisabilité de la
proposition de « switch » au regard de la législation relative aux marchés publics et des
principes d’égalité, de non-discrimination et de concurrence et des risques d’action en justice
auxquels la mise en œuvre de cette proposition pourrait donner lieu, dès lors du moins que,
comme tel est le cas en l’espèce, les éléments essentiels et les conclusions de cet examen ont
été portés à la connaissance du public ;

       Considérant, par contre, que la divulgation des documents réclamés par la partie
requérante est susceptible de porter une atteinte sensible aux intérêts de la partie adverse ; que
ces documents, établis sous le sceau du secret professionnel des avocats pour la partie
adverse, ont en effet été rédigés de manière à être lus uniquement par celle-ci et par ses
services ; que leur divulgation conduirait à porter à la connaissance de tiers des informations,
des analyses ou des arguments précis, susceptibles d’être utilisés et, le cas échéant, de se
retourner ultérieurement contre la partie adverse, notamment en cas de litige ; qu’elle
risquerait ainsi de compromettre la relation de confiance entre la partie adverse et les avocats
qui ont établi ces documents et, ce faisant, de toucher à la raison d’être même du secret
professionnel des avocats ;

        Considérant dès lors que, tout bien pesé, la balance penche en faveur de l’intérêt servi
par le refus de divulguer les documents réclamés par la partie requérante ;




                                    PAR CES MOTIFS,
                                LA COMMISSION DECIDE :




Article unique : Le recours est rejeté, en tant qu’il a pour objet de demander à la Commission
d’obtenir communication des rapports, rédigés par le cabinet d’avocats de Liedekerke, à
propos de la faisabilité juridique du « switch » proposé par le Forum Citoyen Namur, entre
l’îlot du square Léopold et la propriété communale située rue de Fer, pour construire un
nouvel hôtel de ville au square Léopold et un centre commercial en lieu et place de l’hôtel de
ville actuel.
Ainsi délibéré et prononcé à Namur le 25 juin 2018 par la Commission composée de
Monsieur B. JADOT, président, Madame Cl. COLLARD et Monsieur A. LEBRUN, membres
effectifs, et Messieurs Fr. FILLEE et S. PORTETELLE, membres suppléants.




      Le Président,                               Le Secrétaire,




      B. JADOT                                   Fr. FILLEE

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