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Avis n° 31
Concernant l’accès à des pièces préalables à une réunion et au procès verbal et minutes de cette réunion
Date: 01/04/2020
- Copie locale: avis-2020-031.pdf
Transposition
Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs Section publicité de l’administration 1er avril 2020 AVIS n° 2020-31 CONCERNANT L’ACCÈS À DES PIÈCES PRÉALABLES À UNE RÉUNION ET AU PROCÈS- VERBAL ET MINUTES DE CETTE RÉUNION (CADA/2020/20) 2 1. Aperçu 1.1. Par lettre ordinaire et par courriel du 31 janvier 2020, Maîtres Michel Delnoy et Martin Lauwers, agissant pour Ardent Group, demandent à la Commission des jeux de hasard de recevoir, par voie électronique : - Toutes les pièces préalables à la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019 et qui concernent la position publique concernant l’arrêté royal 24 octobre 2018 apparemment approuvée le même jour (études, avis et observations récoltés, etc.) ; - Le procès-verbal et les minutes de la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019. 1.2. Par courriel du 21 février 2020, la Commission des jeux de hasard fournit aux demandeurs une version du PV de la réunion de la Commission du 11 décembre 2019 dans laquelle les données personnelles ont été supprimées. Il s’agit des noms des personnes physiques et des données qui permettraient de les identifier ou quasi-identifier au sens du RGPD. Conformément à l’article 6, § 1er, 7°, de la loi du 11 avril 1994 ‘relative à la publicité de l’administration’ (ci-après : la loi du 11 avril 1994), la Commission des jeux de hasard y a aussi supprimé les informations d’entreprise qui ont un caractère par nature confidentiel. Il s’agit des informations qui peuvent avoir un effet économique négatif sur les entreprises concernées quand ces données sont rendues publiques. Les opinions personnelles des participants des délibérations de l’autorité responsable sont, quant à elles, exclues de la publicité par le recours à l’exception inscrite à l’article 6, § 2, 3°, de la loi du 11 avril 1994. Pendant les délibérations, les participants auraient fourni leurs opinions sur l’arrêté royal du 25 octobre 2018 ainsi que sur d’autres sujets. Ces opinions ont été supprimées du PV par la Commission des jeux de hasard afin de protéger la vie privée des participants à la réunion. Les décisions prises ont été maintenues dans les documents. La demande relative aux pièces préalables à la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019 et qui concernent la position publique concernant l’arrêté royal de 25 octobre 2018 est, quant à elle, refusée par la Commission des jeux de hasard par référence à l’article 6, § 3, 4°, de la 3 loi du 11 avril 1994 parce qu’elle considère que cette demande n’est pas suffisamment claire. Elle invite les demandeurs à spécifier plus exactement à quels documents ou quel genre de documents ils souhaitent avoir accès, ainsi que la période concernée par leur demande. 1.3. Parce qu’ils ne sont pas d’accord avec cette décision, les demandeurs introduisent une demande de reconsidération auprès de la Commission des jeux de hasard par lettre du 10 mars 2020. Par lettre du même jour, envoyée par courriel, ils s’adressent à la Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs, section publicité de l’administration, ci-après la Commission, pour obtenir un avis. 2. La recevabilité de la demande d’avis La Commission estime que la demande d’avis est recevable. Le demandeur a en effet envoyé simultanément sa demande de reconsidération à la Commission des jeux de hasard et sa demande d’avis à la Commission tel que prévu par l’article 8, § 2, de la loi du 11 avril 1994 ‘relative à la publicité de l’administration’ (ci-après : la loi du 11 avril 1994). 3. Le bien-fondé de la demande d’avis L’article 32 de la Constitution et la loi du 11 avril 1994 consacrent le principe du droit d’accès à tous les documents administratifs. L’accès aux documents administratifs ne peut être refusé que lorsque l’intérêt requis pour l’accès à des documents à caractère personnel fait défaut et lorsqu’un ou plusieurs motifs d’exception figurant à l’article 6 de la loi du 11 avril 1994 peuvent ou doivent être invoqués et qu’ils peuvent être motivés de manière concrète et pertinente. Seuls les motifs d’exception imposés par la loi peuvent être invoqués et doivent par ailleurs être interprétés de manière restrictive (Cour d’Arbitrage, arrêt n° 17/97 du 25 mars 1997, considérants B.2.1 et 2.2 et Cour d’Arbitrage, arrêt n° 150/2004 du 15 septembre 2004, considérant B.3.2). Par ailleurs, il découle du fait que le droit d’accès aux documents administratifs est un droit fondamental, que tout motif d’exception doit être interprété de manière restrictive. 4 3.1. Les motifs d’exception invoqués en ce qui concerne le procès-verbal et les minutes de la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019 La Commission constate que la Commission des jeux de hasard invoque une série de motifs d’exception pour refuser l’accès à certaines informations contenues dans le procès-verbal et les minutes de la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019. En premier lieu, la Commission des jeux de hasard invoque l’article 6, § 2, 1°, de la loi du 11 avril 1994 pour bannir la publicité des données à caractère personnel du procès-verbal. La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que, dans le cadre d’une demande d’accès aux documents administratifs, il peut seulement être tenu compte des motifs d’exception énoncés dans la loi du 11 avril 1994 et non du RGPD pour refuser la publicité. Le motif d’exception prévu par l’article 6, § 2, 1°, de la loi du 11 avril 1994 s’énonce comme suit : « L’autorité administrative fédérale ou non fédérale rejette la demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif qui lui est adressée en application de la présente loi si la publication du document administratif porte atteinte : 1° à la vie privée, sauf si la personne concernée a préalablement donné son accord par écrit à la consultation ou à la communication sous forme de copie ». Ce n’est pas l’ensemble des données à caractère personnel qui échappe à la publicité, mais uniquement les données à caractère personnel qui relèvent de la protection de la vie privée. Pour invoquer le motif d’exception prévu à l’article 6, § 2, 1°, de la loi du 11 avril 1994, un certain nombre de conditions doivent être remplies. Il ne suffit donc pas de mettre en avant le fait que les informations concernent la vie privée. Il doit être concrètement démontré que la publicité de ces informations pourrait porter atteinte à la protection de la vie privée. L’étendue de la vie privée n’est pas identique pour tout le monde. Un nom n’est donc protégé que dans la mesure où il y a une relation évidente avec la vie privée. Si le nom appartient à une personne qui agit en une qualité officielle, à savoir en tant que fonctionnaire d’un service public, il ne peut pas être considéré comme relevant du motif d’exception de l’article 6, § 2, 1°, de la loi du 11 avril 1994. En deuxième lieu, la Commission des jeux de hasard invoque l’article 6, § 1er, 7°, de la loi du 11 avril 1994 pour refuser l’accès à certaines 5 informations. Ce motif d’exception s’énonce comme suit : « L’autorité administrative fédérale ou non fédérale rejette la demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif si elle a constaté que l’intérêt de la publicité ne l’emporte pas sur la protection de l’un des intérêts suivants : 7° le caractère par nature confidentiel des informations d’entreprise ou de fabrication communiquées à l’autorité ». Il ne suffit toutefois pas d’affirmer qu’il s’agit d’« informations qui peuvent avoir un effet économique négatif sur les entreprises concernées quand rendues publiques » pour invoquer ce motif d’exception. La protection de ce motif d’exception s’applique en effet uniquement aux informations d’entreprise ou de fabrication qui sont par nature confidentielles. Toutes les informations d’entreprise et de fabrication ne peuvent par conséquent pas être considérées comme relevant de ce motif d’exception. De plus, ce motif d’exception protège uniquement les informations confidentielles qu’une entreprise « a communiquées à l’autorité ». Les informations que la Commission des jeux de hasard a elle-même rédigées à l’intention d’une organisation, n’entrent donc pas en considération pour être soustraites à la publicité sur cette base légale. La Commission souhaite en outre attirer l’attention sur le fait que le refus de publicité sur la base d’un motif d’exception n’est possible que s’il est concrètement fait référence aux risques réels et non aux risques potentiels ou hypothétiques pour l’intérêt protégé par le législateur. L’existence d’un intérêt protégé par les motifs d’exception prévus par l’article 6, § 1er, n’est pas une justification suffisante pour refuser l’accès à certaines informations dans un document administratif. Ce refus n’est possible qu’après une mise en balance permettant de démontrer que l’intérêt général servi par la publicité ne l’emporte pas sur l’intérêt invoqué. Les intérêts personnels ne peuvent pas être pris en compte dans cette mise en balance. Troisièmement, la Commission des jeux de hasard invoque l’article 6, § 2, 3°, de la loi du 11 avril 1994 pour refuser la publicité d’opinions personnelles des participants aux délibérations d’une autorité responsable. En ce qui concerne un motif d’exception du décret de gouvernance flamand du 7 décembre 2018, dont la formulation est similaire à celle de l’article 6, § 2, 3°, de la loi du 11 avril 1994, la Cour constitutionnelle a jugé ce qui suit dans son arrêt n° 43/2020 du 12 mars 2020 : « B.42.1. Au cours des travaux préparatoires de la disposition attaquée, il a été fait référence à l’exposé concernant l’article 6, § 2, 3°, de la loi 6 du 11 avril 1994 « relative à la publicité de l’administration », qui est analogue et dans lequel il est précisé que le motif d’exception attaqué « est relatif dans ce sens qu’il devra toujours être apprécié si et dans quelle mesure une délibération a un caractère secret. En effet, on ne peut supposer secrète une délibération qui a fait l’objet d’une publicité (…). Il est aussi bien possible qu’un document déterminé ne puisse pas être rendu public à un moment déterminé, parce que cela porterait atteinte au caractère secret d’une délibération, tandis que ceci n’est plus le cas à un moment ultérieur, ce qui implique que l’objection à la publicité tombe. Il est donc nécessaire de procéder à une appréciation concrète. S’il est jugé que la délibération concernée est secrète, et que la publicité du document demandé porte atteinte à ce caractère secret, la publicité doit être refusée » (Doc. parl., Parlement flamand, 2017- 2018, n° 1656/1, pp. 58-59, par référence à Doc. parl., Chambre, 1992- 1993, n° 1112/1, pp. 16-17). B.42.2. Le motif d’exception attaqué est pertinent pour atteindre le but mentionné en B.42.1, à savoir éviter que la publicité paralyse les délibérations ayant un caractère secret. À l’inverse de ce que soutiennent les parties requérantes, tel est également le cas en ce qu’il s’agit des délibérations des organes collégiaux d’instances environnementales. Cette disposition ne porte par ailleurs pas d’atteinte disproportionnée au droit des justiciables à la publicité des documents administratifs. Ainsi qu’il ressort des travaux préparatoires précités, ce motif d’exception ne peut en effet être admis qu’en ce que les délibérations des organes concernés revêtent un caractère secret et que la publicité du document demandé risque de porter atteinte à ce caractère secret. Selon les parties requérantes, le simple fait que le caractère secret des délibérations de ces instances environnementales ne découlerait pas d’une disposition législative ou décrétale mais ne découlerait, le cas échéant, que de leurs statuts ne prive pas le régime attaqué de sa justification raisonnable. Il appartient aux juridictions compétentes de veiller à ce que les instances concernées ne fassent pas un usage impropre de ce motif d’exception. » Pour la Commission, il découle de cet arrêt que ce motif d’exception, s’il peut être invoqué « pour éviter que la discussion politique ne soit 7 paralysée », peut également l’être pour toutes les opinions exprimées dans le cadre de délibérations qui se tiennent au sein d’une autorité administrative. Cette disposition veut en effet garantir que toute personne qui participe à des délibérations ne se sente pas freinée dans sa liberté d’exprimer son opinion pendant les délibérations et qu’il ou elle ne soit pas payé pour cela. Ce motif d’exception est un motif d’exception absolu, ce qui implique qu’aucune mise en balance des intérêts n’est nécessaire. Il suffit qu’il soit concrètement démontré que la publicité porterait atteinte à l’intérêt protégé. Ce motif d’exception présente par contre un caractère relatif en ce sens qu’il ne peut pas être invoqué si celui qui a exprimé une opinion pendant ces délibérations a lui-même divulgué cette opinion. La Commission souhaite en outre attirer l’attention sur le fait que les demandeurs ont sollicité la communication d’un document administratif spécifique. Le fait que les informations que les demandeurs entendent obtenir soient absentes du procès-verbal et des minutes de la réunion du 11 décembre 2019 n’implique pas que la Commission des jeux de hasard devrait produire ces informations sur la base de la loi du 11 avril 1994. Si elles devaient exister, d’éventuelles annexes ferraient par contre partie des documents demandés. 3.2. Le motif d’exception invoqué concernant « toutes les pièces préalables à la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019 et qui concernent la position publique concernant l’arrêté royal de 25 octobre 2018 » La Commission des jeux de hasard invoque l’article 6, § 3, 4°, de la loi du 11 avril 1994. Ce motif d’exception s’énonce comme suit : « L’autorité administrative fédérale peut rejeter une demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif dans la mesure où la demande : 4° est formulée de façon manifestement trop vague ». La Commission estime que ce motif d’exception ne peut pas être invoqué sans raison. L’article 5 de la loi du 11 avril 1994 dispose en effet ce qui suit : « La demande indique clairement la matière concernée, et si possible, les documents administratifs concernés, et est adressée par écrit à l’autorité administrative fédérale compétente ». Il n’est donc absolument pas requis que le demandeur identifie avec exactitude les documents administratifs demandés. Il suffit qu’un membre du personnel qui est suffisamment 8 familiarisé avec la matière puisse savoir quels documents administratifs relèvent de la description. Les demandeurs ont d’ailleurs clairement indiqué qu’ils souhaitaient avoir accès à « toutes les pièces préalables à la réunion de la Commission des jeux de hasard du 11 décembre 2019 et qui concernent la position publique concernant l’arrêté royal de 25 octobre 2018 » et qu’il s’agissait notamment des études, avis et observations récoltés. Étant donné que les demandeurs ne peuvent pas savoir quels documents administratifs existent, ils ont, selon la Commission, décrit l’objet de leur demande avec suffisamment de précision. De plus, il s’agit ici d’un motif d’exception facultatif, ce qui implique que la motivation concrète doit être plus détaillée que lorsqu’il s’agit d’un motif d'exception obligatoire. En effet, tous les documents administratifs sont par principe publics et il ne peut être dérogé à ce principe sans que l’on y soit contraint. 3.3. Décision La Commission constate que la motivation concrète fournie par la Commission des jeux de hasard est insuffisante pour refuser les documents administratifs demandés. Dans la mesure où la Commission des jeux de hasard ne motive pas suffisamment certains des motifs d’exception invoqués dans l’interprétation que la Commission leur donne, elle est tenue de divulguer les documents concernés. Bruxelles, le 1er avril 2020. F. SCHRAM K. LEUS secrétaire présidente
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