Wallonie - Craie > Recours 727
Commission de recours pour le droit d’accès à l’information en matière d’environnement Séance du 12 mai 2015 RECOURS N° 727 En cause de : l’A.S.B.L. X… Partie requérante, Contre : la ville de Verviers Bureau de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire Pont de Sommeleville, 2 4800 VERVIERS Partie adverse. Vu la requête du 2 mars 2015, par laquelle la partie requérante a introduit le recours prévu à l’article D.20.6 du livre Ier du code de l’environnement, contre l’absence de suite réservée à sa demande d’obtenir communication du dossier détenu par la partie adverse en ce qui concerne le projet d’aménagement de divers équipements (maison de repos, maison de repos et soins, résidence service, quatre immeubles, cinquante-six logements et parking) sur le site du Parc Peltzer, à Verviers ; Vu l’accusé de réception de la requête du 9 mars 2015 ; Vu la notification de la requête à la partie adverse, en date du 9 mars 2015 ; Vu la décision de la Commission du 13 mars 2015 prolongeant le délai pour statuer ; Considérant que les informations réclamées par la partie requérante constituent incontestablement des informations environnementales soumises au droit d’accès à l’information que consacre et organise le livre Ier du code de l’environnement ; Considérant que, contrairement à ce qu’indique la partie adverse dans un courriel adressé à la Commission, il ne peut être reproché à la partie requérante d’avoir formulé sa demande d’information de manière vague ; qu’en effet, au moment d’introduire cette demande, la partie requérante était dans une situation qui ne lui permettait pas d’avoir une connaissance telle du dossier qu’elle aurait pu énumérer de manière précise les pièces dont elle réclamait communication ; qu’en outre, lorsqu’elle a été avisée de l’introduction du recours, la partie adverse a pu dresser la liste des pièces en sa possession et transmettre une copie de celles-ci à la Commission, de sorte qu’elle a parfaitement compris l’objet de la demande et que le reproche qu’elle adresse à la partie requérante est donc dénué de tout fondement ; Considérant que la Commission a communiqué à la partie requérante la liste des pièces transmises par la partie adverse ; Considérant que, sur cette base, la partie requérante a indiqué à la Commission qu’elle souhaitait avoir accès aux pièces suivantes : le rapport et la décision du collège communal du 7 février 2014 prenant acte de la désignation du bureau Pissart pour la réalisation de l’étude d’incidences sur l’environnement, désignant l’échevin Pitance à la présidence de la réunion préalable d’information et les autres représentants de l’administration ; le procès-verbal de la réunion d’information du 25 février 2014 ; les courriers adressés le 25 mars 2014 à la S.A. Jean Wust et à la S.A. Entour-Âges, par lesquels la partie adverse sollicite l’analyse de diverses thématiques dans le cadre de la réalisation de l’étude d’incidences sur l’environnement ; une version provisoire de plans d’architecte ; des esquisses du projet réalisées par le bureau d’architecture ; un projet de plan d’implantation ; un projet de plan reprenant une proposition de parcours didactique, d’aménagements écologiques et de zones de gestion différenciée des espaces verts publics ; le rapport et la décision du collège communal du 21 novembre 2014 relativement à un avant-projet présenté en réunion de travail ; le courrier adressé par la partie adverse à la S.A. Jean Wust, le 12 décembre 2014, suite à l’examen de l’avant-projet ; et le courrier adressé par le Service public de Wallonie à la partie adverse, le 29 janvier 2015, relativement au refus d’inscription du parc du château Peltzer sur la liste de sauvegarde ; Considérant qu’il importe de constater que le rapport et la décision du collège communal du 21 novembre 2014 comprennent, en annexe, l’avis du Département technique de la gestion du territoire sur le projet en cause ; que cet avis fait donc partie du rapport et de la décision en question ; Considérant que, dans un courriel du 20 avril 2015, la partie adverse a signalé à la Commission qu’elle jugeait inopportun de transmettre à la partie requérante certains des documents qu’elle réclame ; qu’il ressort d’un courriel du 5 mai 2015 qu’il s’agit des documents suivants : la version provisoire de plans d’architecte, les esquisses du projet réalisées par le bureau d’architecture, le projet de plan d’implantation, le projet de plan reprenant une proposition de parcours didactique, d’aménagements écologiques et de zones de gestion différenciée des espaces verts publics, le rapport et la décision du collège communal du 21 novembre 2014 relativement à un avant-projet présenté en réunion de travail, et le courrier adressé par la partie adverse à la S.A. Jean Wust, le 12 décembre 2014, suite à l’examen de l’avant-projet ; qu’aucune objection n’est opposée, ni ne paraît se présenter, à la communication des autres documents réclamés par la partie requérante ; Considérant qu’il ressort des explications qu’elle a fournies à la Commission dans les deux courriels précités, que la partie adverse justifie tout particulièrement son refus de divulguer certains documents par la circonstance que ces derniers se rapportent à « un projet non abouti et non encore déposé » et qu’ils sont consécutifs à « des réunions de travail internes » ; Considérant qu’en faisant état de « réunions de travail internes », la partie adverse paraît suggérer qu’il y a lieu d’appliquer, quant aux documents en question, la disposition qui, à l’article D.18, § 1er, e), du livre Ier du code de l’environnement, permet de rejeter une demande d’information concernant des communications internes ; que le rapport et la décision du collège communal du 21 novembre 2014 et l’avis du Département technique de la gestion du territoire qui y est annexé peuvent éventuellement être qualifiés de communications internes à la partie adverse ; que, par contre, il n’en va pas de même des autres documents réclamés par la partie requérante, à savoir, d’une part, les esquisses et projets de plans transmis à la partie adverse par les personnes ou sociétés intervenant dans l’élaboration, la conception ou l’étude du projet en cause et, d’autre part, le courrier adressé par la partie adverse à la S.A. Jean Wust, le 12 décembre 2014, suite à l’examen de l’avant-projet ; Considérant que, comme l’indique la partie adverse, les documents réclamés par la partie requérante, présentés comme étant des « esquisses » ou accompagnés de la mention « version provisoire », se rapportent à un projet « non abouti et non encore déposé » ; que, de ce fait, l’on peut se demander s’il ne convient pas d’appliquer l’article D.18, § 1er, d), du livre Ier du code de l’environnement, qui permet de rejeter une demande d’information concernant des documents en cours d’élaboration ou des documents ou données inachevés ; Considérant que la Commission estime toutefois ne pas être tenue de trancher le point de savoir si l’article D.18, § 1er, d), a bien vocation à s’appliquer dans le cas d’espèce ; Considérant, en effet, qu’est de toute façon a priori applicable dans la présente affaire une autre disposition du livre Ier du code de l’environnement permettant de restreindre l’accès aux informations environnementales, en l’occurrence l’article D.19, § 1er, alinéa 1er, g) ; que cette disposition prévoit la possibilité de limiter l’accès à l’information en vue d’éviter qu’il ne soit porté atteinte « aux intérêts ou à la protection de toute personne qui a fourni les informations demandées sur base volontaire sans y être contrainte par le décret ou sans que le décret puisse l’y contraindre, à moins que cette personne n’ait consenti à la divulgation de ces données » ; que ce motif peut être invoqué en l’espèce, dès lors qu’aucun texte n’imposait aux personnes ou sociétés concernées l’obligation de transmettre à la partie adverse les documents qui ont servi de base à leurs discussions avec celle-ci, et qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier qu’elles auraient consenti à la divulgation des données concernées ; Considérant, en tout état de cause, que, quel que soit le motif pour lequel l’article D.18 ou l’article D.19 du livre Ier du code de l’environnement permet de restreindre le droit d’accès à l’information, il résulte de ces dispositions, d’une part, que les exceptions ou les limitations apportées au droit d’accès à l’information doivent être interprétées de manière restrictive en tenant compte de l’intérêt que présente pour le public la divulgation de l’information et, d’autre part, que l’autorité doit mettre en balance dans chaque cas particulier l’intérêt public servi par la divulgation avec l’intérêt servi par le refus de divulguer ; Considérant que la Commission a demandé à la partie adverse d’indiquer pour quels motifs concrets elle estime qu’en l’espèce les nécessités du maintien de la confidentialité des informations contenues dans les documents réclamés par la partie requérante l’emportent sur l’intérêt que présente leur divulgation pour le public ; que, pour l’essentiel, la partie adverse s’est limitée à rappeler qu’elle justifie son refus par le fait que les documents en question se rapportent à « un projet non abouti et non encore déposé » et qu’ils sont consécutifs à « des réunions de travail internes » ; qu’outre ce qui a été dit plus haut sur la pertinence de ces considérations, celles-ci ne sont pas suffisamment concrètes pour justifier le refus de communication desdits documents dans le cas d’espèce ; Considérant qu’il importe de constater qu’après avoir reçu l’avant-projet qui lui avait été adressé et au terme des discussions auxquelles cet avant-projet a donné lieu, la partie adverse a fait part à la S.A. Wust de ses observations sur l’avant-projet, en demandant que ce dernier soit adapté en conséquence ; qu’elle a ainsi exprimé un point de vue qui est susceptible d’orienter ou d’influencer le contenu de la demande de permis pour le projet en cause, ainsi que le contenu de la décision qui sera prise sur cette demande ; que les documents réclamés par la partie requérante se rapportent donc à des éléments qui ont vocation à avoir une incidence déterminante sur l’évolution du dossier ; qu’il convient d’en assurer la transparence, et ce d’autant plus que le projet en cause doit faire l’objet d’une enquête publique ; Considérant, en outre, que la Commission n’aperçoit pas, dans les documents réclamés par les parties requérantes, d’informations à ce point sensibles qu’il y aurait lieu d’en assurer la confidentialité ; Considérant qu’en conséquence, la balance des intérêts en présence penche du côté de la divulgation des documents réclamés par la partie requérante ; Considérant enfin que, dans son courriel précité du 5 mai 2015, la partie adverse fait encore valoir que certains des documents réclamés par la partie requérante « sont peut-être protégés par les droits intellectuels » ; qu’une autorité peut se fonder sur l’article D.19, § 1er, alinéa 1er, e), du livre Ier du code de l’environnement en vue de refuser la communication d’une copie de plans, pour autant, du moins, que ceux-ci puissent être qualifiés d’oeuvre originale ; que, de même, l’article 30 de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement n’autorise la communication sous forme de copie d’une information environnementale protégée par le droit d’auteur que moyennant l’accord de l’auteur ou de la personne à qui ses droits ont été transmis ; que, cependant, comme déjà indiqué, l’article D.19 du livre Ier du code de l’environnement précise que, dans chaque cas particulier, l’intérêt servi par la divulgation doit être mis en balance avec l’intérêt spécifique servi par le refus de divulguer ; qu’il en va de même de l’article 30 de la loi du 5 août 2006 ; qu’en l’espèce, à supposer qu’ils présentent un degré d’originalité suffisant pour être protégés par le droit d’auteur, les plans réclamés par la partie requérante sont appelés à constituer des pièces essentielles en vue de déterminer la teneur et les implications exactes de l’avant-projet en cause et du point de vue exprimé sur cet avant-projet par la partie adverse ; qu’ils doivent pouvoir être examinés en détail ; que, dans un souci d’efficacité, ceci implique que la partie requérante puisse recevoir une copie des plans ; que la balance des intérêts penche donc en faveur de la communication de ceux-ci en copie ; PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DECIDE : Article 1er : Le recours est recevable et fondé. Article 2 : La partie adverse communiquera à la partie requérante, dans les huit jours de la notification de la présente décision, une copie des documents suivants : le rapport et la décision du collège communal du 7 février 2014 prenant acte de la désignation du bureau Pissart pour la réalisation de l’étude d’incidences sur l’environnement, désignant l’échevin Pitance à la présidence de la réunion préalable d’information et les autres représentants de l’administration ; le procès-verbal de la réunion d’information du 25 février 2014 ; les courriers adressés le 25 mars 2014 à la S.A. Jean Wust et à la S.A. Entour-Âges, par lesquels la partie adverse sollicite l’analyse de diverses thématiques dans le cadre de la réalisation de l’étude d’incidences sur l’environnement ; une version provisoire de plans d’architecte ; des esquisses du projet réalisées par le bureau d’architecture ; un projet de plan d’implantation ; un projet de plan reprenant une proposition de parcours didactique, d’aménagements écologiques et de zones de gestion différenciée des espaces verts publics ; le rapport et la décision du collège communal du 21 novembre 2014 relativement à un avant-projet présenté en réunion de travail (y compris l’avis du Département technique de la gestion du territoire qui y est annexé) ; le courrier adressé par la partie adverse à la S.A. Jean Wust, le 12 décembre 2014, suite à l’examen de l’avant-projet ; et le courrier adressé par le Service public de Wallonie à la partie adverse, le 29 janvier 2015, relativement au refus d’inscription du parc du château Peltzer sur la liste de sauvegarde. Ainsi délibéré et prononcé à Namur le 12 mai 2015 par la Commission composée de Monsieur B. JADOT, président, Madame Cl. COLLARD, Messieurs A. LEBRUN et M. PIRLET, membres effectifs, et Monsieur Fr. MATERNE, membre suppléant. Le Président, Le Secrétaire, B. JADOT M. PIRLET