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Date: 25/6/2018
Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales 25 juin 2018 DÉCISION n° 2018-5 sur le refus de donner accès à l’ensemble des documents relatifs à la proposition de la Commission des provisions nucléaires élaboré en vue de modifier la loi du 11 avril 2003 (CFR/2018/2) NOLLET/COMMISSION DES PROVISIONS NUCLEAIRES 2 1. Un récapitulatif 1.1 Par lettre recommandée du 9 mars 2018, Monsieur Jean-Marc Nollet demande à la Commission des provisions nucléaires une copie « dans les meilleurs délais sous format électronique et sous format papier » de « l’ensemble des documents » relatifs à la « proposition de la Commission des provisions nucléaires élaboré en 2017-2017 et début 2018-2018 en vue de modifier la loi du 11-11 avril 2003-2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires et la gestion des matières fissiles irradiées dans ces centrales ». 1.2 Par courrier en date du 11 avril 2018, le président de la Commission des provisions nucléaires rejette la demande pour les raisons suivantes: « L’ensemble de documents demandé dans votre courrier concerne des propositions purement juridiques et ne contient pas des informations environnementales. C’est un avis qui a été adressé à la Ministre pour lequel le Ministre jugera de l’opportunité et du moment de son dépôt au parlement. Ainsi, il me semble donc que ces documents ne tombent pas sous le champ de la loi du 6 août 2003 relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement. » 1.3 Par courrier en date du 11 avril 2018, Monsieur Nollet reformule sa demande mais se limite à l’obtention « d’un avant-projet de loi en vue de renforcer le cadre légal pour assurer la disponibilité des provision nucléaires constituées par Electrabel pour financer le démantèlement de ses centrales ». 1.4. N’étant pas d’accord avec ce point de vue, Monsieur Jean-Marc Nollet introduit par lettre recommandée en date du 26 avril 2018, un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès à l’information environnementale, ci-après dénommée la Commission. L’objet du recours se limite à l’obtention de « la proposition que la Commission des provisions nucléaires a rédigée en vue de modifier la loi du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires et la gestion des matières fissiles irradiées dans ces centrales, proposition qui avait été remise à la Ministre Marghem ». La Commission reçoit ce courrier le 7 mai 2018. 1.5 Par e-mail en date du 7 mai 2018, le secrétariat de la Commission demande à la Commission des provisions nucléaires de lui transmettre les 3 documents concernés et lui donne la possibilité de justifier son point de vue. 1.6. Par courrier en date du 23 mai 2018, Monsieur Nollet transmet à la Commission un complément à son recours dans lequel il explique que l’objet de son recours est « la proposition que la Commission des provisions nucléaires a rédigée en vue de modifier la loi du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires et la gestion des matières fissiles irradiées dans ces centrales. » Il déclare ensuite ce qui suit: « Ma demande d’accès à ces documents relève d’un enjeu environnemental fondamental : sans la suffisance et la disponibilité de ces provisions, le risque est énorme de voir les déchets nucléaires (et le coût du démantèlement) rester en l’état et polluer dangereusement les sites concernés. Les exemples historiques récent (site Best Medical à Fleurus laissé à l’abandon) ou plus ancien (site de l’usine Eurochimic) sont là pour nous le montrer. » 1.7. Le lundi 4 juin 2018, le secrétaire de la Commission rencontre le secrétaire de la Commission des provisions nucléaires et la Commission reçoit l’avant-projet de loi modifiant la loi du 11 avril 2003. 2. La recevabilité du recours La Commission estime que le recours est recevable. L’article 35 de la loi du 5 août 2006 dispose que le demandeur peut former un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales contre une décision d’une instance environnementale visée à l’article 4, § 1er, si le délai imparti pour prendre la décision est venue à expiration ou, en cas de refus d’exécution ou d’exécution incorrecte d’une décision, ou en raison de toute autre difficulté qu’il rencontre dans l’exercice des droits que confère la présente loi. Le recours doit être introduit dans un délai de soixante jours. Le recours a été introduit par courrier en date du 26 avril 2018 contre la décision de la Commission des provisions nucléaires du 11 avril 2018. Le recours avait été introduit dans le délai prescrit par la loi et est donc recevable. 4 3. Le bien-fondé du recours La Commission doit préalablement déterminer si les informations demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006. La loi du 5 août 2006 est d’application aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité fédérale, ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, c) qui sont sous leur contrôle (Art.4 §1er de la loi du 5 août 2006) et qui disposent d’informations environnementales (article 18. § 1er de la loi). 3.1 Le champ d’application personnel Dans la décision du 28 avril 2016, le président de la Commission des provisions nucléaires ne nie pas que son institution relève du champ d’application personnel de la loi du 5 août 2006. Cette institution à personnalité civile a en effet été créée par l’article 3 du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion des matières fissiles irradiées dans ces centrales. Il s’agit donc indéniablement d’une instance environnementale au sens de l’article 3, 1°, a) de la loi du 5 août 2006 dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité fédérale. 3.2 Le champ d’application matériel 3.2.1. La loi du 5 août 2006 octroie un droit d’accès aux informations environnementales. La notion d’ « information environnementale » est décrite à l’article 3, 4° comme: « a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère, l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces éléments ; b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que 5 visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets dans l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b) ; e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou d; f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l’état des éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ; g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f); h) les rapports sur l’application de la législation environnementale ». 3.2.2. La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que la notion d’instance environnementale a une vaste interprétation. Le fait que la définition contienne de nombreuses énumérations d’exemples indique que l’on ne peut pas donner une interprétation trop restreinte à cette notion. 3.2.3. La Commission estime que l’objet du recours doit se limiter à l’avant-projet de loi tel qu’il a été rédigé par la Commission des provisions nucléaires et a été transmis au ministre compétent, bien que la demande initiale ait été formulée de manière plus vaste. Les courriers du 6 demandeur depuis le 11 avril 2018 montrent que sa demande doit être interprétée comme telle. 3.2.4. L’avant-projet de loi ‘portant modification de la loi du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires loi pour la gestion de matières fissiles irradiées dans ces centrales nucléaires’ compte 81 pages contient les éléments suivants: 1. Résumé 2. Exposé des motifs 1. Le financement du démantèlement des centrales nucléaires et la gestion du combustible usé : cadre international et européen 1.1. Généralités 1.2. La Convention du 5 septembre 1997 1.3. Euratom 1.4. Conclusion 2. Principes généraux relatifs au financement du démantèlement des centrales nucléaires et de la gestion du combustible usée – Evaluation de la loi du 11 avril 2003 3. Dispositions modificatives 4. Avant-projet de loi 5. Annexe : version consolidée de la loi du 11 avril 2003 avant et après l’avant-projet de loi La Commission constate que l’exposé des motifs du document demandé esquisse avant tout le cadre juridique qui est d’application au démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion de matières fissiles irradiées dans ces centrales nucléaires. Ce cadre légal doit être considéré comme un ensemble de mesures au sens de l’article 3, 4° e) et f) de la loi du 5 août 2006. La deuxième partie qui porte sur les « principes généraux relatifs au financement du démantèlement des centrales nucléaires et de la gestion du combustible usée » doit être qualifiée d’analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f) coûts-bénéfices telles que visées à l’article 3, 4°, g) de la loi du 5 août 2006. La loi du 11 avril 2003 doit être considérée comme une évaluation d’une mesure au sens de l’article 3, 4° e) et f) permettant de vérifier si les finalités visées ont été suffisamment réalisées. En ce qui concerne l’explication relative aux modifications que la Commission des provisions nucléaires propose et aux dispositions mêmes, 7 la Commission constate que celles-ci comportent deux parties: d’une part, elles portent purement sur des observations juridico-techniques qui en soi, n’ont aucune pertinence sur les mesures et les analyses économiques qui s’y rapportent; d’autre part, elles portent sur les mesures en tant que telles et les analyses économiques qui s’y rapportent. Pour autant que ce dernier soit le cas, il s’agit d’informations environnementales au sens de l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006. L’annexe qui reprend le texte de la loi du 11 avril 2003 sous sa forme actuelle et telle qu’elle devrait se présenter lorsque la modification proposée aura été effectuée, constitue une mesure au sens de l’article 3, 4°, e) et f) de la loi du 5 août 2006. La présence d’adaptations technico-juridiques contribuant à la compréhension de la proposition dans son ensemble et celles-ci étant seulement marginales, la Commission ne voit aucune raison de ne pas placer ces informations également sous le régime de l’accès aux informations environnementales. La Commission rejette dès lors le point de vue de la Commission des provisions nucléaires selon lequel les informations demandées ne doivent pas être considérées comme des informations environnementales au sens de la loi du 5 août 2006. 3.3. L’invocabilité d’éventuels motifs d’exception La Commission ne voit aucun motif d’exception, tel que figurant aux articles 27 et 32 de la loi du 5 août 2006, qui pourrait empêcher la publicité du document demandé. Cela n’est pas non plus le cas en ce qui concerne l’article 27, §1er, 6° de la loi du 5 août 2006 sur la base duquel la demande doit être rejetée si l’intérêt public de la publicité ne l’emporte pas sur la protection de l’un des intérêts suivants: le secret des délibérations du gouvernement fédéral et des autorités responsables qui en relèvent. Ce document ne révèle en effet rien du processus décisionnel et des points de vue individuels adoptés par les différents membres. Le document constitue en effet le point final d’un processus décisionnel au sein de la Commission des provisions nucléaires et il a quitté cet organisme après avoir été finalisé. 8 3.4. Décision La Commission estime que le document demandé doit être considéré comme une information environnementale au sens de l’article 3, 4° de la loi du 11 avril 1994 et qu’aucun motif d’exception s’opposant à la publicité de celui-ci ne doit ou ne peut être invoqué. Bruxelles, le 25 juin 2018. La Commission était composée comme suit : Jeroen Van Nieuwenhove, président Frankie Schram, secrétaire et membre Hrisanti Prasman, membre F. SCHRAM J. VAN NIEUWENHOVE secrétaire président