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Date: 28/9/2018
Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales 28 septembre 2018 DÉCISION n° 2018-13 sur le refus de donner accès à l’ensemble des documents relatifs à la proposition de la Commission des provisions nucléaires élaborée en vue de modifier la loi du 11 avril 2003 (CFR/2018/8) NOLLET/COMMISSION DES PROVISIONS NUCLEAIRES (3) 2 1. Un récapitulatif 1.1. Par lettre du 27 juin 2018, monsieur Jean-Marc Nollet demande à la Commission des provisions nucléaires une copie des remarques de l’exploitant des centrales nucléaires sur l’avant-projet de loi proposé par la Commission des provisions nucléaires visant à garantir la disponibilité des provisions nucléaires. 1.2. Par lettre du 27 juillet 2018 la Commission des provisions nucléaires refuse l’accès à ce document parce que « ces remarques ont été communiquées de façon volontaire et à titre confidentiel et la Commission n’est pas liée par ces remarques. La Commission a constaté que ces remarques ne contiennent pas d’information en matière d’environnement. La Commission considère que, même si les remarques formulées par l’exploitant avaient contenu des informations en matière d’environnement, elle tomberaient dès lors sous une exception de la loi du 5 août 2006, relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement ». 1.3. Par lettre du 13 août 2018 monsieur Nollet introduit un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales, ci-après nommée la Commission. 1.4. La Commission a reçu le recours le 16 août 2018. 1.5. Par courriel de 20 août 2018 le secrétariat de la Commission a contacté la Commission des provisions nucléaires et demande de lui faire parvenir le document concerné et lui donne la possibilité de justifier son point de vue. 1.6. Par courriel de 2 septembre 2018 le secrétariat de la Commission des provisions nucléaires réagit à la demande de la Commission et promet d’envoyer le document concerné le plus vite possible. 1.7. La Commission des provisions nucléaires délivre le document concerné le 18 septembre 2018. 3 2. La recevabilité La Commission estime que le recours est recevable. L’article 35 de la loi du 5 août 2006 dispose que le demandeur peut former un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales contre une décision d’une instance environnementale visée à l’article 4, § 1er, si le délai imparti pour prendre la décision est venu à expiration ou, en cas de refus d’exécution ou d’exécution incorrecte d’une décision, ou en raison de toute autre difficulté qu’il rencontre dans l’exercice des droits que confère la présente loi. Le recours doit être introduit dans un délai de soixante jours. Le recours a été introduit par courrier en date du 13 août 2018 contre la décision de la Commission des provisions nucléaires du 27 juillet 2018. Le recours avait été introduit dans le délai prescrit par la loi et est donc recevable. 3. Le bien-fondé du recours La Commission doit préalablement déterminer si les informations demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006. La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité fédérale, ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, c) qui sont sous leur contrôle (art. 4, §1er, de la loi du 5 août 2006) et qui disposent d’informations environnementales (article 18, § 1er, de la loi). 3.1 Le champ d’application personnel Dans la décision du 27 juillet 2018, le président de la Commission des provisions nucléaires ne nie pas que son institution relève du champ d’application personnel de la loi du 5 août 2006. Cette institution à personnalité civile a en effet été créée par l’article 3 du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion des matières fissiles irradiées dans ces centrales. Il s’agit donc indéniablement d’une instance environnementale au sens de l’article 3, 1°, a) de la loi du 5 août 2006 dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité fédérale. 4 3.2 Le champ d’application matériel 3.2.1. La loi du 5 août 2006 octroie un droit d’accès aux informations environnementales. La notion d’ « information environnementale » est décrite à l’article 3, 4° comme: « a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère, l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces éléments ; b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets dans l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b) ; e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou d; f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l’état des éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites 5 culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ; g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f); h) les rapports sur l’application de la législation environnementale ». 3.2.2. La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que la notion information environnementale a une vaste interprétation. Le fait que la définition contienne de nombreuses énumérations d’exemples indique que l’on ne peut pas donner une interprétation trop restreinte à cette notion. 3.2.3. Le document concerné contient le texte de l’avant-projet de loi portant modification de la loi du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion de matières fissiles irradiées dans ces centrales nucléaires y compris des adaptations et des commentaires par Electrabel dans le texte. 3.2.4. La Commission constate que le document esquisse avant tout le cadre juridique qui est d’application au démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion de matières fissiles irradiées dans ces centrales nucléaires. Ce cadre légal doit être considéré comme un ensemble de mesures au sens de l’article 3, 4° e) et f) de la loi du 5 août 2006. La deuxième partie qui porte sur les « principes généraux relatifs au financement du démantèlement des centrales nucléaires et de la gestion du combustible usée » doit être qualifiée d’analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f) coûts-bénéfices telles que visées à l’article 3, 4°, g) de la loi du 5 août 2006. La loi du 11 avril 2003 doit être considérée comme une évaluation d’une mesure au sens de l’article 3, 4° e) et f) permettant de vérifier si les finalités visées ont été suffisamment réalisées. Les commentaires et les adaptations par Electrabel ont un effet sur ses mesures et doit être pour cette raison considérées comme des informations environnementales. Les remarques et les adaptations ne sont pas seulement des observations juridico- techniques en soi, mais elles ont une influence sur les mesures. La Commission rejette dès lors le point de vue de la Commission des provisions nucléaires selon lequel les informations demandées ne doivent 6 pas être considérées comme des informations environnementales au sens de la loi du 5 août 2006. 3.3. L’invocabilité d’éventuels motifs d’exception La Commission considère que l’exception de l’article 27, 8° de la loi du 5 août 2006 invoqué par la Commission des provisions nucléaires est valable. L’article 27, 8° de cette loi prévoit en effet ce qui suit : « Pour chaque information environnementale faisant l’objet d’une demande de publicité, l’instance environnementale qui reçoit la demande vérifie si des exceptions sont d’application. Elle rejette la demande si l’intérêt du public servi par la publicité ne l’emporte pas sur la protection d’un des intérêts suivants : (…) 8° si la demande porte sur un avis ou une opinion communiqués volontairement et à titre confidentiel par un tiers à une instance environnementale, pour lesquels celui-ci a explicitement demandé la confidentialité, à moins qu’il n’ait consenti à la publicité. » Electrabel a communiqué ses remarques à la Commission des provisions nucléaires de façon volontaire et à titre confidentiel, deux conditions qui sont remplies cumulativement. La Commission est d'avis que, étant donné que la Commission des provisions nucléaires n'a pas tenu compte de ces remarques dans la version finale du projet de loi au profit du Gouvernement, l'intérêt public qui est servi avec la publicité ne l'emportera pas sur la protection que le législateur a voulu offrir aux opinions exprimées de plein gré et confidentielles afin d'assurer la sérénité du processus décisionnel. 3.3. Décision La Commission estime que le document demandé doit être considéré comme une information environnementale au sens de l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006 et que les conditions sont remplies pour refuser l’accès au document concerné. Bruxelles, le 28 septembre 2018. La Commission était composée comme suit : 7 Jeroen Van Nieuwenhove, président Frankie Schram, secrétaire et membre Hrisanti Prasman, membre Brecht Vercruysse, membre Steven Vandenborre, membre F. SCHRAM J. VAN NIEUWENHOVE secrétaire président