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Date: 8/5/2017
Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales 8 mai 2017 DÉCISION n° 2017-6 sur le refus implicite de donner accès aux résultats des tests de signaux sonores réalisés par INFRABEL sur la voie ferrée sise à hauteur de Profondeville (CFR/2017/3) COLLOT/INFRABEL 2 1. Un récapitulatif 1.1. Le 8 novembre 2016 Monsieur Paulet, en sa qualité de conseil de Monsieur Philippe Collot, adresse un courriel à Infrabel par lequel il sollicite l’obtention des résultats des tests de signaux sonores réalisés par INFRABEL sur la voie ferrée sise à hauteur de Profondeville. 1.2. Il adresse un rappel le 5 décembre 2016. 1.3. Par courriel du 8 décembre 2016 INFRABEL répond que le dossier est toujours en cours de traitement au Service Juridique, qui reprendra contact avec le demandeur dans les meilleurs délais. 1.4. N’ayant pas reçu de réponse, Monsieur Paulet adresse un rappel, par courriel et lettre en date du 19 décembre 2016, directement au service juridique d’Infrabel. 1.5. Par lettre et courriel en date du 21 février 2017, Monsieur Paulet introduit un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales, ci-après dénommée la Commission. 1.6. Par courriel en date du 7 mars 2017, le secrétariat de la Commission demande à Infrabel de lui fournir les documents concernés et lui donne la possibilité de justifier son point de vue. 1.7. Par courriel en date du 7 mars 2017 Infrabel indique qu’un dossier portant la référence INF-25870-NOR8C4 a été créé et que Infrabel ne manquera pas de reprendre contact avec la Commission dans les meilleurs délais. 1.8. Par courriel en date du 15 mars 2017 Infrabel confirme la demande d’information de la Commission et indique que la demande a été transmise le jour même au service Affaires juridiques (référence dossier : 16i1331) et qu’une réponse sera transmise dans les plus bref délais par ce service. 1.9 Par lettre du 30 mars 2017, reçu par la Commission le 18 avril 2017, le Service Juridique d’Infrabel informe la Commission que dans le cadre de l’installation du nouveau dispositif de sonnerie électronique 3 unidirectionnelle (en remplacement de la sonnerie mécanique) aux passages à niveau équipés de sonnerie, INFRABEL a chargé un bureau d’étude de mesurer et contrôler le niveau sonore de cette sonnerie électronique dans toutes les conditions d’utilisation et dans toutes les directions. Le but de cette étude étant de vérifier que l’avertisseur sonore satisfait aux dispositions de l’arrêté ministériel du 3 novembre 2011 fixant les normes techniques relatives aux dispositifs de sécurité à niveau a donc été mesuré de manière générale. Au regard de cette étude globale, la réalisation de mesurages spécifiques pour chacun des nombreux passages à niveau équipés d’une sonnerie n’est donc plus pertinente. En effet, il y a environ, 1.550 passages à niveau de ce type lesquels sont chacun équipés, en moyenne, de deux sonneries. On atteint donc le nombre de 3.100 nouvelles sonneries. 2. La recevabilité du recours La Commission estime que le recours est recevable. L’article 35 de la loi du 5 août 2006 dispose que le demandeur peut former un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales contre une décision d’une instance environnementale visée à l’article 4, § 1er, si le délai imparti pour prendre la décision est venu à expiration ou, en cas de refus d’exécution ou d’exécution incorrecte d’une décision, ou en raison de toute autre difficulté qu’il rencontre dans l’exercice des droits que confère cette loi. Le recours doit être introduit dans un délai de soixante jours. Le recours a été introduit le 21 février 2017 contre l’absence de décision dans le délai prévu par la loi du 5 août 2006. Le recours a été introduit dans le délai fixé par la loi et est par conséquent recevable. 3. Le bien-fondé du recours La Commission doit préalablement déterminer si les informations demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006. La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont régis par l’autorité fédérale ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, § 1er, de la loi du 5 août 2006) et disposent d’informations environnementales (article 18, § 1er de la loi). 4 3.1 Le champ d’application personnel L’article 4, § 1er de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement dispose qu’elle est d’application aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité fédérale, ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, c) qui sont sous leur contrôle. Cette loi définit la notion d’instance environnementale comme “a) une personne morale ou un organe créé par ou en vertu de la Constitution, d’une loi, d’un décret ou d’une règle visée à l’article 134 de la Constitution ; b) toute personne physique ou morale qui exerce des fonctions administratives publiques, y compris des tâches, activités ou services spécifiques en rapport avec l’environnement ; c) toute personne physique ou morale ayant des responsabilités ou des fonctions publiques, ou fournissant des services publics, en rapport avec l’environnement, sous le contrôle d’un organe ou d’une personne visé(e) au point a) ou b). Les organes et institutions avec une compétence judiciaire ne tombent pas sous cette définition à moins qu’ils agissent avec une autre fonction que judiciaire. Les assemblées législatives et les institutions y attachées ne relèvent pas de cette définition, sauf si elles agissent en qualité administrative.” Il ne fait aucun doute et il n’est pas contesté que INFRABEL tombe dans le champ d’application de la loi du 5 août 2006. 3.2 Le champ d’application matériel La loi du 5 août 2006 accorde un droit d’accès aux informations environnementales sur la base de l’article 18 sans qu’il faille justifier d’un intérêt à cette fin. L’objet du recours porte sur le Rapport de synthèse et d’évaluation des travaux réalisés par les institutions et entreprises concernées, établi en exécution de la résolution de la Chambre de 1993, mentionné à la page 23 du Programma national de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs, document établi par le Comité du programma national en application de la loi du 3 juin 2014 transposant la directive européenne 2011/70/Euratom du 19 juillet 2011. 5 L’information environnementale est définie comme “toute information, peu importe le support et la forme matérielle, dont dispose une instance environnementale concernant : a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère, l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces éléments ; b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées au point e) ; d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets dans l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b) ; e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou d ; f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l’état des éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ; g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f); h) les rapports sur l’application de la législation environnementale” La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que la notion d’information environnementale a une interprétation très vaste. Le fait qu’un grand nombre d’exemples soient mentionnés dans la définition indique que l’on ne peut pas donner une interprétation trop étroite à la notion. 6 La Commission a reçu d’Infrabel le document intitulé “Sonométrie Sonnerie Passages à niveau Infrabel, projet P007578-0350” du 11 septembre 2015 qui porte sur des mesures générales qui ont été réalisées en ce qui concerne la nouvelle sonnerie d’Infrabel aux passages à niveau et contient les informations spécifiques suivantes : 1. Table des matières 2. Liste des figures 3. Liste des tableaux 4. Objet 5. La sonnerie électrique 6. Critères relatifs aux signaux sonores 7. Types de mesures 8. Lieux de mesure 9. Principe du dispositif de mesure 10. Résultats de mesure des composantes spectrales 11. Directivité 12. Variation entre les sonneries mutuelles 13. L’effet d’objets cloisonnants 14. L’influence d’obstacles réfléchissants à proximité de la sonnerie 15. Variation en raison de l’effet de sol et de la hauteur de la sonnerie 16. Conclusion Le document comporte 22 pages et il est indiqué que le rapport ne peut être copié et/ou diffusé dans son ensemble que moyennant l’autorisation écrite de Technum. La Commission constate que bien que le rapport ne porte pas sur des données spécifiques de mesure pour “des signaux sonores réalisés par INFRABEL sur la voie ferrée sise à hauteur de Profondeville”, l’étude générale s’en rapproche étroitement. En principe, chaque installation sonore près d’un passage à niveau devrait en effet fournir ces résultats, même si cela n’exclut pas que dans un cas spécifique, les sonométries puissent être divergentes. Raison pour laquelle la Commission estime que, à défaut de disposer de mesures spécifiques, le rapport général correspond étroitement à la demande et doit par conséquent être divulgué pour autant qu’aucun motif d’exception ou toute autre restriction ne doive ou ne puisse être invoqué. 7 3.3. L’invocabilité des motifs d’exception La Commission souhaite avant tout attirer l’attention sur le fait que l’examen des motifs d’exception diffère selon que les informations concernées doivent être considérées comme des informations environnementales au sens large ou comme des émissions dans l’environnement. S’il s’agit d’émissions dans l’environnement, toutes les exceptions qui s’appliquent aux informations environnementales en général ne peuvent pas être invoquées et même lorsque certains motifs d’exception peuvent être invoqués, il y a alors particulièrement lieu de tenir compte du fait que lors la mise en balance des intérêts il faut vraiment tenir compte de l’intérêt général qui est servi par la publicité des émissions. La Commission doit toutefois constater que tant pour les informations environnementales en général que pour les émissions dans l’environnement, aucun motif d’exception ne peut être invoqué pour refuser la publicité. Elle doit bien tenir compte du fait que le mode de publicité doit être restreint en raison de l’existence de droits intellectuels lorsque le demandeur souhaite obtenir une copie du document demandé, ce qui est le cas dans cette demande. Dans ce cas, il faut en effet tenir compte de l’article 30 de la loi du 5 août 2006 qui s’énonce comme suit: “Lorsque la demande porte sur une information environnementale protégée par le droit d’auteur, l’autorisation de l’auteur ou de la personne à laquelle les droits de celui-ci ont été transmis n’est pas requise pour autoriser la consultation sur place du document ou pour fournir des explications à son propos. Lorsque la demande porte sur la communication sous forme de copie d’une information environnementale protégée par le droit d’auteur, l’autorisation de l’auteur ou de la personne à qui ces droits ont été transmis est requise conformément à la loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins. Dans chaque cas particulier, l’intérêt public servi par la divulgation est mis en balance avec l’intérêt spécifique servi par le refus de divulguer.” Ce n’est que dans la mesure où il est question de l’existence d’un ouvrage protégé par des droits d’auteur que la société Technum peut s’opposer à la diffusion du rapport dans son intégralité. De plus, la condition 8 d’approbation préalable est soumise à l’obligation d’évaluer les intérêts, ce qui implique que lorsque l’intérêt général qui est servi par la publicité l’emporte sur les dommages qui pourraient être causés à l’ouvrage protégé par des droits d’auteur, l’ouvrage concerné peut être divulgué sans l’autorisation du bénéficiaire des droits d’auteur. Dans ce cadre, la Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que le droit d’auteur peut uniquement porter sur la manière originale dont les idées sont reprises dans le rapport et non sur l’utilisation de certaines techniques ou sur les résultats de ces techniques ou méthodes. Bien que certaines techniques puissent faire l’objet de licences, un certain degré de publicité s’applique pour les obtenir afin que leur existence ne puisse toutefois pas être invoquée pour refuser la publicité dans le cadre de la loi du 5 août 2006. La Commission estime que le rapport en soi ne peut pas être considéré comme étant entièrement un ouvrage protégé par des droits d’auteur. Même si certains passages doivent être considérés comme constituant un ouvrage protégé par un droit d’auteur, la Commission estime que vu la nature des informations, l’intérêt qui est servi par la publicité l’emporte toutefois sur l’intérêt que constitue la publicité sur les droits patrimoniaux du bénéficiaire des droits d’auteur. La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que, dans la mesure où certains passages peuvent être considérés comme un ouvrage protégé par des droits d’auteur, et pour limiter au maximum la violation de la protection des droits d’auteur, le demandeur du document ne peut pas diffuser le document sans l’autorisation du bénéficiaire des droits d’auteur. 3.4. Décision La Commission ne voit aucun motif pour refuser la publicité du document demandé. Infrabel est donc tenu de fournir le document sous forme de copie au demandeur. Elle tient néanmoins à attirer l’attention du demandeur sur le fait qu’il ne peut pas diffuser le document concerné à moins d’avoir l’autorisation du bénéficiaire des droits d’auteur dans la mesure où certains passages dans le rapport peuvent être qualifiés d’ouvrage protégé par des droits d’auteur. Bruxelles, le 8 mai 2017. 9 La Commission était composée comme suit : Jeroen Van Nieuwenhove, président Frankie Schram, secrétaire et membre Hrisanti Prasman, membre Brecht Vercruysse, membre F. SCHRAM J. VAN NIEUWENHOVE secrétaire président