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Décision CFR 27

Sur le refus de donner accès aux rapports de la Commission des provisions nucléaires

Date: 24/10/2016

Transposition

Commission fédérale de recours pour
    l’accès aux informations
       environnementales



                 24 octobre 2016




            DÉCISION n° 2016-27

   sur le refus de donner accès aux rapports de la
        Commission des provisions nucléaires

                  (CFR/2016/12)

   NOLLET/COMMISSION DES PROVISIONS NUCLEAIRES (6)
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   1. Un récapitulatif

1.1. Par courrier recommandé en date du 23 mai 2016, Monsieur Jean-
Marc Nollet demande à la Commission des provisions nucléaires une
copie papier des deux rapports portant sur les prélèvements des années
2013 et 2014 pour le démantèlement des centrales nucléaires et la gestion
des combustibles irradiés.

1.2. Par courrier en date du 2 juin 2016, le président de la Commission
des provisions nucléaires refuse l’accès à ces documents. Il se réfère tout
d’abord à l’article 27, § 1er, 7° de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du
public à l’information en matière d’environnement. Il attire l’attention
sur le fait que la Commission des provisions nucléaires n’a pas eu
l’autorisation de publier ces informations. Il se réfère en outre à l’article 8
de la loi du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le
démantèlement des centrales nucléaires et pour la gestion des matières
fissiles irradiées dans ces centrales. Il affirme en outre que les documents
demandés sont uniquement destinés aux membres de la Commission qui
sont soumis au secret professionnel et à une interdiction de diffusion. Les
documents demandés sont des documents confidentiels qui sont
uniquement destinés aux membres de la Commission qui sont soumis au
secret professionnel et à une interdiction de diffusion. Ces documents
n’ont été communiqués ni au ministre ni à des tiers. Ils peuvent
seulement être partiellement communiqués par le biais, par exemple,
d’un résumé de leur contenu, après quoi certaines informations sont
communiquées au demandeur.

1.3. N’étant pas d’accord avec ce point de vue, Monsieur Jean-Marc
Nollet introduit par courrier recommandé en date du 13 juin 2016, un
recours auprès de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux
informations environnementales. La Commission reçoit ce courrier le 28
juin 2016.

1.4. Suite à un entretien avec le secrétariat de la Commission des
provisions nucléaires le lundi 11 juillet 2016, le secrétariat de la
Commission demande à la Commission des provisions nucléaires de lui
fournir les documents concernés et lui donne la possibilité de justifier
son point de vue.
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1.5. Le 11 juillet 2016, un entretien exploratoire a lieu entre le secrétaire
de la Commission et le secrétariat de la Commission des provisions
nucléaires et des accords sont pris en ce qui concerne la consultation des
documents concernés.

1.6. Le 27 juillet 2016 a lieu la consultation des documents par le
secrétariat de la Commission.

1.7. Le lundi 1er août 2016 a lieu l’audition d’un membre du secrétariat de
la Commission des provisions nucléaires. Il ressort de cet entretien qu’à
ce moment, la Commission des provisions nucléaires ne peut pas avancer
suffisamment d’arguments pouvant étayer un refus. La Commission
accorde à la Commission des provisions nucléaires un délai
supplémentaire jusqu’au 21 septembre 2016, pour fournir une note
explicative.

1.8. Par e-mail en date du 18 septembre 2016, la Commission des
provisions nucléaires informe la Commission fédérale de recours qu’elle a
entre-temps eu un premier contact avec Synatom et qu’elle est prête à
trouver les arguments conjointement avec la Commission des provisions
nucléaires. Elle s’engage toutefois à avoir un entretien avec le secrétaire
de la Commission afin de pouvoir comprendre quels arguments peuvent
être invoqués. Aucun délai supplémentaire n’est demandé et l’on avance
ce qui suit : « Dès que les documents ont été adaptés, la Commission des
provisions nucléaires promet de les examiner plus en détails ».

1.9. En réaction à ce mail, le secrétaire de la Commission répond à la
Commission des provisions nucléaires, par e-mail en date du 18
septembre 2016, que son argumentation ne peut pas dépendre de la
réaction de Synatom.

   2. La recevabilité du recours

La Commission estime que le recours est recevable. L’article 35 de la loi
du 5 août 2006 dispose que Le demandeur peut former un recours auprès
de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations
environnementales contre une décision d’une instance environnementale
visée à l’article 4, § 1er, si le délai imparti pour prendre la décision est
venu à expiration ou, en cas de refus d’exécution ou d’exécution
incorrecte d’une décision, ou en raison de toute autre difficulté qu’il
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rencontre dans l’exercice des droits que confère la présente loi. Le
recours doit être introduit dans un délai de soixante jours. Le recours a
été introduit par courrier en date du 13 juin 2016 contre la décision de la
Commission des provisions nucléaires du 2 juin 2016. Le recours a été
introduit dans le délai fixé par la loi et est par conséquent recevable.

   3. Le bien-fondé du recours

La Commission doit préalablement déterminer si les informations
demandées tombent dans le champ d’application de la loi du 5 août 2006.
La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont régis
par l’autorité fédérale ainsi qu’aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, §1er, de la loi du 5
août 2006) et disposent d’informations environnementales (article 18,
§1er de la loi).

   3.1 Le champ d’application personnel

Dans la décision du 28 avril 2016, le président de la Commission des
provisions nucléaires ne nie pas que son organisme tombe dans le champ
d’application de la loi du 5 août 2006. Cet organisme doté de la
personnalité juridique a en effet été créé par l’article 3 de la loi du 11
avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des
centrales nucléaires et pour la gestion des matières fissiles irradiées dans
ces centrales. Il s’agit donc indubitablement d’une instance
environnementale au sens de l’article 3, 1°, a), de la loi du 5 août 2006
dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité
fédérale.

   3.2 Le champ d’application matériel

3.2.1. La loi du 5 août 2006 octroie un droit d’accès aux informations
environnementales. La notion d’instance environnementale est décrite à
l’article 3, 4° comme :

         “toute information, peu importe le support et la forme
         matérielle, dont dispose une instance environnementale
         concernant :
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a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère,
l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y
compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la
diversité biologique et ses composantes, y compris les
organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces
éléments ;
b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la
contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie
des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés
par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou,
par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
au point e) ;
c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour
autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de
l’environnement tels que visés au point a) ou, par
l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
au point e) ;
d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les
rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs,
les émissions, les déversements et autres rejets dans
l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des
incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au
point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que
visés au point b) ;
e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des
incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou
d;
f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état,
protéger, restaurer, développer l’état des éléments de
l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de
l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites
culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c),
et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ;
g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses
économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités
visées aux points e) et f);
h) les rapports sur l’application de la législation
environnementale”.
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3.2.2. La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que la notion
d’information environnementale a une très vaste interprétation. Le fait
qu’un grand nombre d’exemples soient mentionnés dans la définition
indique que l’on ne peut pas donner une interprétation trop étroite à la
notion.

3.3.3. La Commission constate que la Commission des provisions
nucléaires ne conteste pas que les documents demandés contiennent des
informations environnementales au sens de la loi du 5 août 2006. La
Commission doit toutefois vérifier minutieusement si c’est le cas parce
que ses compétences se limitent en effet à l’accès à ce type
d’informations.

3.3.4. Après vérification sur place, il s’avère que les informations
concernent un rapport 2013 sur le démantèlement des centrales
nucléaires, un rapport 2014 sur le démantèlement des centrales
nucléaires et un rapport 2014 sur la gestion des matières fissiles.

Les rapports 2013 et 2014 concernant le démantèlement des centrales
nucléaires ont un contenu uniforme avec la structure suivante :
   1.    Introduction
   2.    Aperçu global du projet
   3.    Partie A: Période DSZ
   4.    Partie B: D&D
   5.    Partie F: Waste Management Facility
   6.    Partie I: Programm Management
   7.    Facturation – décompte final
   8.    Conclusion générale
   9.    Abréviations

Le rapport 2014 concernant la gestion des matières fissiles comprend les
éléments suivants :
   1.   Introduction
   2.   Rapport des coûts 2014
   3.   Dépenses estimées 2015 et 2016

3.3.5. La Commission estime que toutes les informations ne peuvent pas
être qualifiées d’information environnementale. Les rapports
contiennent des données de fait uniquement telles que l’utilisation de et
les coûts pour les containers pour le déplacement du matériel nucléaire
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qui, en soi, ne contiennent aucune information précise en rapport avec
l’environnement. Dans la mesure où il s’agit de telles informations, le
recours n’est dès lors pas fondé.

   3.3. L’invocabilité de motifs de recours éventuels

3.3.1. Dans la mesure où les informations peuvent être qualifiées
d’informations environnementales, la Commission estime que des motifs
d’exception ne peuvent être invoqués que dans une certaine mesure.
C’est le cas pour les quantités de matériel nucléaire stocké dont la
publicité pourrait être utilisée pour éventuellement perpétrer des
attentats ou un vol et qui pourrait porter préjudice tant aux libertés et
droits fondamentaux des administrés (article 27, § 1er, 1° de la loi du 5
août 2006) qu’à l’ordre public, la sécurité publique, en ce compris la
protection physique des matières radioactives, ou la défense du territoire
(article 27, §1er, 2° de la loi du 5 août 2006). La Commission estime
également que l’intérêt public qui est servi par la publicité ne l’emporte
pas dans ce cas sur l’intérêt servi par la protection des intérêts précités.

3.3.2. La Commission estime qu’il ne peut être fait usage de l’article 27,
§ 1er, 7° de la loi du 5 août 2006. Bien que des informations économiques
soient présentes dans les rapports, on ne peut pas supposer que celles-ci
puissent être considérées comme des informations commerciales et
industrielles confidentielles si ces informations sont protégées pour
garantir un intérêt économique légitimé. Il n’est en effet question de
telles informations que lorsque la publicité de celles-ci aurait des
conséquences négatives pour la position économique d’une entreprise.
Cela ne semble pas être le cas ici.

3.3.3. Que les membres de la Commission des provisions nucléaires
soient soumis au secret professionnel tel que défini à l’article 8 de la loi
du 11 avril 2003 sur les provisions constituées pour le démantèlement des
centrales nucléaires et pour la gestion des matières fissiles irradiées dans
ces centrales n’empêche pas que la loi du 5 août 2006 s’applique à
l’organisme lui-même. En tout cas, invoquer le secret professionnel n’est
pas compatible avec la loi du 5 août 2006 parce que vu la directive
2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès du
public à l’information en matière d’environnement et les articles 4 et 5
de la Convention d’Aarhus, il n’est possible d’invoquer aucun autre motif
d’exception que ceux repris dans ces textes. Toutefois, cela ne signifie pas
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que la publicité éventuelle ne peut pas être refusée en raison des intérêts
auxquels il pourrait être porté préjudice, des intérêts que le législateur a
voulu protéger en imposant le secret professionnel aux membres de la
Commission des provisions nucléaires si ceux-ci trouvent leur fondement
dans la loi du 5 août 2006 et peuvent être motivés de manière adéquate.
La Commission estime que si cela devait être le cas, elle a suffisamment
examiné aux points 3.3.1 et 3.3.2 dans quelle mesure certains motifs
d’exception peuvent être invoqués.

    3.4. Décision

3.4.1. La Commission estime que le recours est partiellement fondé, à
savoir dans la mesure où les informations peuvent être qualifiées
d’informations environnementales. Ce n’est pas le cas pour les
informations qui sont purement économiques et ne présentent pas un
lien direct avec l’environnement comme cela a été expliqué ci-avant.

3.4.2. Dans la mesure où il s’agit bien d’informations environnementales,
la Commission estime que la majorité des informations présentes dans ces
rapports doivent être divulguées sauf si ces informations tombent dans la
définition des motifs d’exception de l’article 27, § 1er, 1° et 2°. Il s’agit plus
spécifiquement de la mention des quantités de matériel nucléaire stocké.


Bruxelles, le 24 octobre 2016.

La Commission était composée comme suit :

Jeroen Van Nieuwenhove, président
Frankie Schram, secrétaire et membre
Hrisanti Prasman, membre




   F. SCHRAM                                              J. VAN NIEUWENHOVE
   secrétaire                                                    président