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Date: 9/3/2009
Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales 9 mars 2009 DECISION 2009-3 sur un refus de donner accès aux informations environnementales (CFR/2008/2) INTER ENVIRONNEMENT WALLONIE/SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement 2 Le 17 juillet 2008, l'asbl Inter Environnement Wallonie demandait au SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement d’avoir accès, sur la base de l’article 35 de la loi du 5 août 2006 relative à l'accès du public à l'information en matière d'environnement, aux quantités de composants actifs contenus dans les produits phytosanitaires mis sur le marché belge en 1990, 1995, 1998, 2000, et au cours des trois dernières années. Le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement n'a pas accédé à cette demande, estimant que les différents composants actifs ayant été mis sur le marché belge revêtaient un caractère confidentiel. 1. Les compétences de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales L'article 38 de la loi du 5 août 2006 stipule que la Commission fédérale de recours pour l'accès aux informations environnementales, ci-après dénommée « la Commission », statue sur le recours dans les plus brefs délais et notifie sa décision par écrit au demandeur et à l'instance environnementale dans un délai de trente jours calendrier au plus tard. Dans certains cas, ce délai peut être prolongé de quinze jours. Etant donné que le législateur n'a déterminé aucune sanction frappant le non- respect de ce délai, ce délai doit être considéré comme un délai d'ordre. Un dépassement des délais imposés par la loi à la Commission n'a donc pas pour conséquence de faire perdre à la Commission ses compétences décisionnelles. La Commission est donc bien compétente pour prendre une décision sur le litige qui lui est soumis. 2. La recevabilité du recours Le recours a été introduit le 1er septembre 2008 et reçu le 4 septembre 2008 par le secrétariat de la Commission fédérale de recours pour l’accès aux informations environnementales. La décision de refus a été prise le 4 août 2008 et réceptionnée par Inter Environnement le 5 août 2008. Le recours doit être introduit dans un délai de soixante jours suivant la réception de la décision de refus pour autant que, sur la base de l'article 8 de la loi du 5 août 2006, les possibilités de recours, les instances compétentes auprès desquelles le recours doit être introduit et les formes 3 et délais en vigueur soient portés à la connaissance du demandeur. La Commission constate que les possibilités de recours n’ont pas été communiquées de manière adéquate, conformément à l’article 8. L’introduction du recours dans les délais impartis ne peut donc être remise en cause. L’article 18 de la loi du 5 août 2006 stipule que quiconque le requiert a un droit d’accès aux informations environnementales dont dispose une instance environnementale, ce sans devoir justifier d’un intérêt. La loi ne contient aucune disposition exigeant qu’un intérêt spécifique doive être prouvé. Certains éléments de la demande d’Inter Environnement Wallonie semblent cependant le suggérer. Le fait qu’Inter Environnement soit représentée au sein de groupes de travail de différentes directions générales du SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement qui assurent le suivi du Plan belge de réduction des pesticides et biocides n’est donc pas pertinent en ce sens pour l'application de la loi du 5 août 2006. Cette loi n'accorde en effet aucun droit d'accès spécifique à des informations en vue d'une participation quelconque. Il n’y a aucun doute cependant quant au fait qu’Inter Environnement jouit d’un droit de principe d’accès aux informations environnementales en vertu de la loi du 5 août 2006. L’article 4, §1 stipule que la loi s'applique aux instances environnementales visées à l'article 3, 1°, a) et b), dont l'organisation et le fonctionnement sont réglés par l'autorité fédérale, ainsi qu'aux instances environnementales visées à l'article 3, 1°, c) qui sont sous leur contrôle. Une instance environnementale est, selon l’article 3, 1°, a) une personne morale ou un organe créé par ou en vertu de la Constitution, d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution. Le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement relève de cette catégorie (voir Doc. Parl. Chambre, 2005 – 2006, 51 2511/001, 12 – 13). Le recours est par conséquent adressé à l’encontre dune instance environnementale, dans le sens de la loi du 5 août 2006. 3. Le bien-fondé du recours Les données relatives aux quantités de différents composants actifs concernant les produits phytosanitaires mis sur le marché belge en 1990, 1995, 1998, 2000 et au cours des trois dernières années, sont incontestablement à qualifier d’informations environnementales au sens 4 de l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006 pour autant que ces informations soient également disponibles sur un support. La Commission a constaté à ce titre que les informations demandées étaient effectivement en possession du SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement. La Commission reconnaît que les quantités de différents composants actifs dans les produits phytosanitaires peuvent, dans certains cas, être considérées comme des informations commerciales et industrielles confidentielles au sens de l'article 27, § 1, 7° de la loi du 5 août 2006. Cette qualification ne peut cependant pas être accordée aux données remontant à plus de trois ans. C'est par ailleurs ce que prône le protocole de Phytofar, qui défend les intérêts du secteur, conclu avec le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement. En outre, il ressort de la lettre du secteur adressée à sa demande à la Commission que les données de consommation doivent être immédiatement rendues publiques par le biais de différentes sources, dès qu'elles ne présentent plus aucun caractère confidentiel pour le secteur. Par conséquent, il n'y a aucune raison de soustraire à la publicité les informations ayant trait aux années 1990, 1995, 1998 et 2000. Les données remontant à moins de 3 ans peuvent être considérées comme des informations commerciales et industrielles confidentielles car elles permettent à des concurrents étrangers d’examiner le marché national des produits phytopharmaceutiques. Il peut en effet être déduit de ces données quels sont les composants actifs qui remportent un succès économique de sorte que les entreprises étrangères peuvent, sur la base de ces informations, s'orienter vers certains segments du marché qui sont commercialement les plus intéressants pour elles, ce qui induit un avantage comparatif sur le plan des coûts. Il existe par conséquent un risque potentiel pour que cette situation porte un grave préjudice à la position concurrentielle des entreprises nationales par rapport aux entreprises étrangères. C’est d’autant plus le cas pour un petit marché comme la Belgique, particulièrement sensible à l'importation et à l'exportation. La Commission ne peut toutefois pas abonder dans le sens de l’argument selon lequel la publication de ces informations pourrait, en elle-même, faciliter l’imitation de produits phytosanitaires. 5 Il ne suffit toutefois pas que les informations demandées soient qualifiées d'informations commerciales et industrielles confidentielles. Il doit en outre être établi que l'intérêt de la publication ne l’emporte pas sur l’intérêt protégé. La Commission estime que, vu l’influence probable de certaines substances sur l’environnement et la santé publique, il y a un intérêt public dans la demande de publicité des informations demandées. La Commission désire indiquer en outre que ces informations ne pourront être réutilisées qu’aux conditions de la loi du 7 mars 2007 transposant la directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public (MB 19 mars 2007). 4. Conclusion La Commission estime que le recours est recevable et fondé et que les informations demandées doivent être rendues publiques. Bruxelles, le 9 mars 2009. La Commission était composée comme suit: Jo Baert, président Frankie Schram, secrétaire et membre Maud Istasse, membre Angélique Gérard, membre Steven Vandenborre, membre F. SCHRAM J. BAERT secrétaire président