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Décision CFR intérimaire 2

Sur le refus de donner accès aux documents transmis à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’État relatives à la garantie que la Belgique doit donner pour les accidents nucléaires et qui ont été transmis aux instances européennes

Transposition

Commission fédérale de recours pour
    l’accès aux informations
       environnementales



                    19 mars 2018




       DÉCISION intérimaire n° 2018-2

      sur le refus de donner accès aux documents
     transmis à la Commission européenne, dans le
  cadre des aides d’État relatives à la garantie que la
  Belgique doit donner pour les accidents nucléaires
   et qui ont été transmis aux instances européennes
                   (CFR/2017/10)

          NOLLET/MINISTRE DE FINANCES
                                                                            2

   1. Un récapitulatif

1.1. Par courrier en date du 12 septembre 2017, Monsieur Jean-Marc
Nollet demande à Monsieur Van Overtveldt, Ministre des Finances, une
copie papier du projet d’arrêté royal ainsi que les documents relatifs à la
garantie que la Belgique doit donner pour les accidents nucléaires et qui
ont été transmis aux instances européennes.

1.2. Par courrier en date du 12 octobre 2017, le Ministre répond
positivement à une partie de cette demande. Le demandeur reçoit le
projet d’arrêté royal établissant un programme de garantie de la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire soumis à
l’avis du Conseil d’État, une copie du communiqué de presse émanant de
la Commission européenne ainsi que la version publique (mais pas encore
publiée) de la décision rendue par cette dernière. Le Ministre ne donne
pas suite à la demande dans la mesure où il s’agit de documents qui ont
été transmis aux instances européennes dans le cadre de ce dossier et qui
contiennent des informations d’entreprises confidentielles qui relèvent
du secret professionnel sur la base de l’article 6, §1er, 7° de la loi du 11
avril 1994 relative à la publicité de l’administration et sur la base de
l’article 27, 7° de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à
l’information en matière d’environnement.

1.3. Par courrier en date du 16 novembre 2017, Monsieur Nollet
introduit un recours auprès de la Commission fédérale pour l’accès aux
informations environnementales, ci-après dénommée la Commission,
contre le refus partiel.

1.4. Par e-mail en date du 21 novembre 2017, le secrétaire de la
Commission demande au SPF Finances de lui transmettre les documents
concernés et il attire l’attention sur la possibilité de transmettre une note
circonstanciée pour le 1er décembre 2017 au plus tard.

1.5. Par e-mail en date du 30 novembre 2017, la Commission reçoit les
documents en question ainsi que la note circonstanciée du SPF Finances.
Cette note contient la justification suivante :
                                                                             3

   a) La loi du 5 août 2006 relative à l’accès public à l’information en
      matière d’environnement.

Attendu que Monsieur Nollet base sa demande d’information sur la loi du 5
août 2006 relative à l’accès public à l’information en matière
d’environnement et qu’il convient donc de s’y référer.

Qu’on rappelle que ladite loi transpose la directive européenne 2003/4/CE
du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès
du public à l’information en matière d’environnement.

Que le champ d’application de cette loi se limite à la communication
d’informations environnementales, au public dans la mesure où aucune
exception ne peut être invoquée par l’instance environnementale.

Qu’il y a donc lieu d’apprécier ces divers éléments au cas d’espèce.

   i) L’information environnementale

L’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006 définit la notion d’information
environnementale.
Le projet d’arrêté royal établissant un programme de garantie de la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire visé par la
demande de Monsieur Nollet tombe sous le champ d’application de l’article
3, 4°, f). Cette disposition précise qu’est considérée comme information
environnementale, toute information dont dispose une instance
environnementale concernant : « les mesures et activités ayant pour
objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l’état des
éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de
l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites culturels de
valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter toute
pression, la limiter ou la compenser ».
Le projet d’arrêté royal dont question vise à mettre en œuvre la garantie de
l’État prévue par l’article 10/1 de la loi du 22 juillet 1985 sur la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire, lequel permet
aux exploitants d’installations nucléaires de bénéficier d’une garantie de
l’État, moyennant rémunération, dans la mesure où le marché privé de
l’assurance et des garanties financières ne leur offre pas les couvertures
requises.
                                                                                              4

Actuellement, le marché des assurances en Belgique présente un déficit
dans deux segments 1 particuliers, à savoir les dommages
environnementaux et les dommages aux personnes se manifestant plus de
dix ans après l’accident nucléaire. En conséquence, en cas d’accident
nucléaire ayant des répercussions dommageables sur l’un de ces deux
segments, la garantie d’État pourrait intervenir. C’est donc bien [dans] ce
sens que le projet d’arrêté royal contient une information
environnementale (des mesures visant à compenser toute pression sur
l’état des éléments de l’environnement ou l’état de santé de l’homme).
Cette information environnementale a été intégralement communiquée
puisque l’entièreté du projet d’arrêté royal a été transmise à Monsieur
Nollet. Il a également obtenu copie du projet du rapport au Roi, lequel
détaille et explique chaque disposition du projet d’arrêté royal. Monsieur
Nollet a donc obtenu toutes les informations nécessaires.
En conséquence, l’on ne voit pas à quelle information environnementale
(telle que définie à l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006) supplémentaire
Monsieur Nollet prétend encore accéder.

    ii) L’accès du public

Il ressort de la directive européenne 2003/4/CE du 28 janvier 2003
concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement
que l’intention est de diffuser, le plus largement possible, auprès du grand
public l’information en matière d’environnement (voir le considérant n° 9
de ladite directive). La loi du 5 août 2006 reprend ce principe et c’est donc
bien en sa qualité de citoyen que Monsieur Nollet agit. Le citoyen
« lambda » pouvant demander l’accès à l’information environnementale, il
paraît évident qu’il fallait prévoir des exceptions à la publicité afin de
préserver des intérêts supérieurs.

    iii) Les exceptions à la publicité

La loi du 5 août 2006 prévoit en ses articles 27 à 32 une série d’exceptions à
la publicité. Ainsi, il existe certains cas de figure ou, bien qu’une
information environnementale existe, elle ne doit pas être communiquée au
demandeur.
En l’espèce, comme déjà mentionné ci‐dessus, l’on estime que Monsieur
Nollet a d’ores et déjà accédé à toute l’information environnementale
contenue dans ce dossier. Cependant, à titre subsidiaire, si l’on devait
considérer que d’autres informations environnementales existent (quod

1
 soit un sous‐ensemble du risque de responsabilité défini par référence à un type de péril ou de
dommage.
                                                                               5

non), il faudrait alors les considérer comme bénéficiant des exceptions
visées par les articles 27, §1er, 3° et 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006. En
effet, il semble que Monsieur Nollet considère que les documents transmis
à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’État, devraient
également lui être communiqués. Cela est inexact dans la mesure où ces
documents ne contiennent aucune autre information environnementale
que celles déjà communiquées par la transmission du projet d’arrêté royal,
du rapport au Roi et du projet de la décision publique de la Commission
européenne. Néanmoins, même à considérer que lesdits documents
contiendraient une information environnementale supplémentaire, ils ne
pourraient pas être transmis à Monsieur Nollet. En effet, ces documents
contiennent également des informations financières, commerciales et
industrielles confidentielles. Ainsi, la notification transmise à la Commission
européenne est frappée de confidentialité et contient la mention : « Strictly
privileged & confidential. Contains business secrets ». Ce document est
donc bien exclu de la publicité sur base de l’article 27, §1er, 7° lequel
précise que l’instance environnementale rejette la demande si l’intérêt du
public servi par la publicité ne l’emporte pas sur la protection de l’intérêt
suivant : « le caractère confidentiel des informations commerciales et
industrielles, lorsque ces informations sont protégées afin de préserver un
intérêt économique légitime (…) ».
En l’espèce, il convient de particulièrement protéger les secrets d’affaires
des assureurs et des exploitants nucléaires. Cette confidentialité est par
ailleurs reconnue par la Commission européenne elle‐même (voir point 2.b.
ci‐dessous).
Egalement, ces mêmes documents sont encore exclus de la publicité sur
base de l’article 27, §1er, 3° lequel protège « le caractère confidentiel des
relations fédérales internationales de la Belgique et des relations de la
Belgique avec les institutions supranationales (..) ». En l’occurrence, l’on ne
peut communiquer aux citoyens les documents confidentiels transmis par
l’État belge à la Commission européenne dans le cadre de la législation
relative aux aides d’État. Ces relations sont protégées et les documents
transmis sont exclus de la publicité.

   b) La législation européenne

Enfin, dans la mesure où l’on comprend que Monsieur Nollet prétend à un
droit d’accès aux documents échangés avec la Commission européenne
dans le cadre de la législation relative aux aides d’État, il convient donc de
se référer à la législation européenne applicable en cette matière et, plus
particulièrement, des dispositions relatives au secret professionnel et la
protection des informations confidentielles.
                                                                             6

En l’espèce, il s’agit notamment :
    ‐ du Règlement 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant
        modalités d’application de l’article 108 du traité sur le
        fonctionnement de l’Union européenne. Ce Règlement est
        d’application directe en Belgique et doit dès lors être respecté. L’on
        se réfère plus particulièrement à son article 24 sur le secret
        professionnel, lequel stipule : « La Commission et les États membres,
        ainsi que leurs fonctionnaires et autres agents, y compris les experts
        indépendants mandatés par la Commission, sont tenus de ne pas
        divulguer les informations couvertes par le secret professionnel
        qu’ils ont recueillies en application du présent règlement ».
    ‐ du Règlement 794/2004 de la Commission du 21 avril 2004
        concernant la mise en œuvre du règlement 659/1999 visé ci‐avant
        et, plus particulièrement, son nouvel article 11 ter.
    ‐ de la Communication de la Commission C(2003) 4582 du 1er
        décembre 2003 sur le secret professionnel dans les décisions en
        matière d’aides d’État.

Il résulte de ces différentes dispositions que lorsque des informations sont
reconnues par la Commission comme étant frappée de confidentialité, elles
ne peuvent être divulguées et sont couvertes par le secret professionnel.
Dans le dossier dont objet, la Commission européenne a bel et bien
considéré certaines informations comme étant confidentielles. Cela ressort
clairement de l’encadré figurant en première page de sa décision finale du
14 juillet 2017, publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 10
novembre 2017. C’est donc bien pour cette raison qu’elle a occulté
différentes informations. En conséquence, seule la décision (version
publique) rendue par la Commission européenne peut être divulguée.
Communiquer à Monsieur Nollet d’autres documents reviendrait à violer le
Règlement 659/1999 du 22 mars 1999.

1.6. Dans sa réunion de 11 décembre 2017 la Commission a pris une
décision intérimaire (décision n° 2017‐15) dans laquelle elle demande que
le Ministre des Finances lui transmet les documents demandé et invite le
Ministre à exposer des éléments concrets qui justifient l’invocation de
l’article 27, § 1, 7° de la loi du 5 août 2006 dans une note adressée à la
Commission pour le 15 février 2018 au plus tard.

1.7. Par lettre de 15 février 2018 l’administration générale de la
Trésorerie du SPF Finances a envoyé une deuxième note explicative à la
Commission avec un grande nombre de documents.
                                                                            7

   1. Transmission des documents demandés à la Commission
      fédérale de recours

Comme requis par la décision intérimaire du 11 décembre 2017 sur le
fondement de l’article 40 de la loi du 5 août 2006, les documents
demandés sont par la présente transmis à la Commission fédérale de
recours. Il est précisé, pour autant que de besoin, que les documents
demandés sont transmis à la Commission fédérale de recours à titre
confidentiel, uniquement pour les besoins de l’article 40 de la loi du 5 août
2006 afin de permettre à la Commission fédérale de recours d’exercer la
mission qui lui est conférée par la loi. Ces documents ne peuvent pas être
divulgués à des tiers.


   2. Position de l’État belge

Sur la base de la motivation ci‐dessous:

    à titre principal, l’État belge demande de déclarer la demande de
     Monsieur Nollet non fondée;
    à titre subsidiaire, l’État belge demande de déclarer que les
     documents demandés doivent être transmis à Monsieur Nollet en
     partie, c’est‐à‐dire, en noircissant les informations confidentielles
     s’y trouvant, telles qu’identifiées dans le tableau en annexe (annexe
     II).


   3. Motivation


           a) Champ d’application matériel de la loi du 5 août 2006

Il convient tout d’abord d’examiner plus avant la question du champ
d’application matériel de la loi du 5 août 2006.

Les informations demandées ne constituent pas une "information
environnementale" au sens de l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006. Les
risques nucléaires sous‐jacents concernent bien entendu l’environnement,
mais l’arrêté royal concerné ici porte uniquement sur la couverture
financière des responsabilités civiles qui résulteraient d’un éventuel
                                                                                 8

accident nucléaire. Il ne s’agit pas de la prévention des risques d’accidents
nucléaires ; il ne s’agit pas non plus de déterminer qui est responsable des
éventuels accidents et dans quelles limites (ceci est fixé de manière
exhaustive par la loi du 22 juillet 1985 sur la responsabilité civile dans le
domaine de l’énergie nucléaire, qui met cette responsabilité à charge de
l’exploitant), ni même d’imposer une obligation d’assurance pour couvrir
cette responsabilité (l’obligation d’assurance existe à charge des
exploitants en vertu de l’article 8 de la loi du 22 juillet 1985). Il s’agit
uniquement de fixer les modalités d’une garantie financière subsidiaire par
l’État, en faveur des victimes, lorsqu’un exploitant est responsable d’un
dommage nucléaire et n’est pas suffisamment assuré, et de savoir si cette
garantie constitue une aide d’État. Ceci ne se rapporte que de manière très
éloignée à l’environnement et n’est pas une "information
environnementale" au sens légal du terme.

Les informations demandées ne portent donc pas sur "l’état de
l’environnement" (article 3, 4°, a)), "l’état de santé de l’homme et sa
sécurité" (article 3, 4°, b)), ni sur "l’état de sites culturels de valeur et de
constructions" ((article 3, 4°, c), ou sur "des facteurs, tels que les
substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris
les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets
dans l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences
sur les éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de
santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b)" (article 3, 4°, d)).

Elles ne sont pas non plus visées par l’article 3, 4°, e) et f), qui ont trait aux
"mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des incidences sur
les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou d)", et aux "mesures et
activités ayant pour objectif de garder en état, protéger, restaurer,
développer l’état des éléments de l’environnement tels que visés au point
a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b),
ou les sites culturels de valeur et de constructions tels que visés au point
c), et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser".

Pour interpréter ces dispositions, il est utile de se référer à l’exposé des
motifs de la loi du 5 août 2006, ainsi qu’aux considérants de la Directive
européenne 2003/4/CE du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à
l’information en matière d’environnement.

Selon l’exposé des motifs:

    "Les notions de «mesures et activités» doivent – à l’instar de la
    Convention d’Aarhus et de la directive – être interprétées de manière
                                                                            9

large. Ces notions ne comprennent pas seulement les mesures et
activités qui sont réalisées par des acteurs du secteur privé mais
également celles des autorités. Le critère lié à l’acteur qui prend la
mesure ou qui exerce l’activité n’est donc pas pertinent. Afin de se
conformer à la directive 2003/4/CE concernant l’accès du public à
l’information en matière d’environnement, les analyses et les
évaluations de toutes ces mesures et activités sont reprises comme
composantes de la notion «d’information environnementale». Dans la
directive, il est en effet question de rapports sur l’application de la
législation environnementale (article 2.1) d)) et d’analyses d’ordre
économique (article 2.1) e)).

En ce qui concerne spécifiquement les mesures administratives, peuvent
être prises en considération toutes les parties du cycle politique. Il s’agit
notamment de la préparation politique et de l’enquête préparatoire, de
la formulation politique, de l’exécution politique, du maintien et de
l’évaluation. Cela concorde avec l’objectif de l’article 2.3 de la
Convention d’Aarhus (presque littéralement repris dans la directive) qui
précise que les mesures comprennent notamment «des mesures
administratives, des accords relatifs à l’environnement, des politiques,
lois, plans et programmes».

Les activités sont par exemple la production de biens, la culture,
l’élevage, la création et la construction de maisons, d’habitations, de
voyages, etc., mais aussi les politiques publiques.

Certains types d’activités sont donc réalisés par un groupe‐cible (par
exemple des entreprises, des agriculteurs, des éleveurs, des architectes
et des entreprises de construction, des ménages, des touristes, etc). Les
groupes‐cibles sont des ensembles sociaux reconnaissables. Ils sont à la
base d’activités auxquelles est associé un processus de perturbation de
l’environnement. Ces activités sont de cette manière tant une
composante du problème que la clef d’une approche préventive et
orientée vers la nature de celui‐ci. Les informations pertinentes pour
l’environnement et qui concernent des groupes‐cibles doivent, dans ce
sens,    être    aussi    considérées    comme      des    informations
environnementales.

Le projet de loi a repris les deux catégories «mesures et activités»
prévues dans la convention et la directive, en deux parties.

La partie e) comprend les mesures et activités pour lesquelles le seul
critère pertinent est qu’elles peuvent avoir des incidences sur l’état des
                                                                              10

   éléments de l’environnement ou de la santé de l’homme et sa sécurité,
   sur l’état des sites culturels de valeur et des constructions.

   La partie f) délimite l’autre catégorie de mesures et d’activités, via le
   critère selon lequel les mesures et activités visées ici ont pour objectif de
   garder en état, de restaurer et/ou de développer les éléments de
   l’environnement et les valeurs visées aux points b), c) et d) et d’éviter la
   pression sur l’environnement, de la limiter et/ou de la compenser. Il est
   ainsi évident que, dans cette partie, l’autorité fédérale développe des
   politiques environnementales. La politique peut intervenir à tous
   les échelons de la chaîne de perturbation de l’environnement décrite
   ici."

Le considérant 10 de la Directive énonce ce qui suit:

   "La définition des informations environnementales devrait être précisée
   de manière à inclure les informations, quelle que soit leur forme, se
   rapportant à l’état de l’environnement, aux facteurs, mesures ou
   activités affectant ou susceptibles d’affecter l’environnement ou visant
   à le protéger, aux analyses coût‐avantages et aux autres analyses
   économiques utilisées dans le cadre de ces mesures ou activités, ainsi
   que les informations relatives à l’état de santé de l’homme, à sa
   sécurité, y compris à la contamination de la chaîne alimentaire, et à ses
   conditions de vie, aux sites culturels et aux structures bâties dans la
   mesure où ils sont affectés ou pourraient être affectés par un de ces
   éléments."

L’on pourrait donc résumer l’article 3, 4°, e) et f) ainsi: il doit d’agir de
mesures ou activités pouvant affecter ou visant à protéger
l’environnement.

Or, les documents demandés par Monsieur Nollet, à savoir, le projet
d’arrêté royal, ainsi que les documents envoyés à la Commission
Européenne dans le cadre de la procédure "aides d’État", concernent
seulement les conditions de la garantie de l’État belge pour les exploitants
d’installations nucléaires (y compris les conditions financières de celle‐ci
pour les exploitants), et la question de savoir si cette garantie constitue
une aide d’État. Ces informations ne concernent donc pas des mesures ou
activités pouvant affecter ou visant à protéger l’environnement.

Le seul élément, dans la définition légale du concept d’"informations
environnementales", qui permettrait éventuellement de soutenir l’idée
que les documents demandés sont visés par ce concept est le mot
                                                                              11

"compenser" figurant à l’article 3, 4°, f) ("compenseren" dans la version
néerlandaise de la loi). Mais ce mot doit être interprété en fonction de son
contexte. Il vise ici les compensations environnementales, par exemple la
plantation d’un bois effectuée quelque part en compensation du
déboisement d’une parcelle située ailleurs, ou la remise de terres agricoles
à l’état de polders en compensation d’extensions du port d’Anvers ou de
Zeebruges. Le terme "compenser" n’a pas, dans ce contexte, l’acception
d’"indemniser financièrement". Le mécanisme de garantie par l’État de la
responsabilité civile des exploitants nucléaires, qui fait l’objet des
documents demandés par Monsieur Nollet, n’a rien à voir avec les
compensations environnementales visées à l’article 3, 4°, f).

Enfin, les documents demandés ne contiennent pas non plus
d’informations au sens de l’article 3, 4°, g) et h) (analyses coûts‐avantages
et rapports sur l’application de la législation environnementale).

Pour les raisons ci‐dessus, les documents demandés ne contiennent pas
d’information environnementale et le recours doit dès lors être déclaré
non fondé sur cette base.

           b) A titre subsidiaire: motifs d’exception
A titre subsidiaire, les documents demandés contiennent certaines
données qui, même à considérer qu’elles constituent des informations
environnementales, sont des informations confidentielles tombant dans le
champ d’application de l’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006. Ces
informations proviennent des assureurs actifs sur le marché des risques
nucléaires ; elles concernent principalement les tarifs des différents
assureurs et l’étendue des couvertures qu’ils offrent. Ces données sont
commercialement sensibles. Leur divulgation est susceptible de réduire la
concurrence entre assureurs en créant par exemple des effets
d’alignement des prix ou des conditions. Pour cette raison notamment,
l’intérêt du public qui serait servi par la publicité ne l’emporte pas sur la
protection des intérêts poursuivis par la confidentialité des informations en
question. Il faut noter que la Commission européenne a accepté d’occulter
ces données dans la version publique de sa décision "aides d’État" ; les
critères de confidentialité et d’intérêt public qui s’imposent à cet égard à la
Commission européenne sont les mêmes que ceux qui s’imposent à la
Commission fédérale de recours.

La non‐divulgation se justifie également par l’article 27, §1er, 3° de la loi du
5 août 2006 (caractère confidentiel des relations entre la Belgique et la
                                                                              12

Commission européenne). La Commission fédérale de recours ne pourrait
pas imposer la divulgation d’informations dont la Commission européenne
a délibérément reconnu le caractère confidentiel en acceptant leur
noircissement dans la version publique de sa décision.

Enfin, certains des documents demandés contiennent également des
informations qui, même à considérer qu’elles constituent des informations
environnementales, ne peuvent pas être divulguées, soit en raison de la
confidentialité des délibérations du gouvernement fédéral (article 27, §1er,
6° de la loi du 5 août 2006), soit parce qu’il s’agit d’un avis ou d’une
opinion communiqués volontairement et à titre confidentiel par un tiers
(article 27, §1er, 8° de la loi du 5 août 2006).

L’annexe II est un tableau indiquant quelles données précisément sont des
informations qui, si elles constituent des informations environnementales
(quod non), doivent être considérées comme des données confidentielles
au sens de l’article 27, §1er, 3° et 7° ou l’article 27, §1er, 6° de la loi du 5
août 2006, et pour quelles raisons. La méthode de travail qui a été suivie
pour élaborer ce tableau est la suivante. Le premier document traité dans
le tableau est la version confidentielle de la décision de la Commission
Européenne – qui ne fait pas partie des documents demandés, mais qu’il
est logique de prendre comme base: les données indiquées dans le tableau
comme étant des informations confidentielles sont les mêmes que celles
que la Commission européenne a accepté d’occulter dans la version
officielle de sa décision pour les mêmes motifs (à savoir, essentiellement,
pour protéger les secrets d’affaires des assureurs et des exploitants
nucléaires), sur la base du Règlement 659/1999 du Conseil du 22 mars
1999 portant modalités d’application de l’article 108 du traité sur le
fonctionnement de l’Union européenne (voir annexe III). Le même exercice
est ensuite reproduit pour les documents demandés.

Annexes:

I. Les documents demandés

   ‐   Formulaire du 15 mars 2017 de notification à la Commission
       européenne d’une mesure d’une constitue pas une aide d’État mais
       qui est notifiée à la Commission européenne pour des raisons de
       sécurité juridique
   ‐   Mémo "Notification – Belgian Nuclear Guarantee Scheme" du 15
       mars 2017 et ses annexes:
                                                                           13

          a. annexe 1 – "Convention on Third Party Liability in the Field
              of Nuclear Energy of 29 July 1960"
          b. annexe 2 – "Protocol to amend the Convention on Third
              Party Liability in the field of Nuclear Energy of 29 July 1960"
          c. annexe 3 – Loi sur la responsabilité civile dans le domaine de
              l’énergie nucléaire
          d. annexe 4 – Projet d’arrêté royal établissant un programme
              de garantie de la responsabilité civile dans le domaine de
              l’énergie nucléaire (projet du 14 mars 2017)
          e. annexe 5 – projet de Tableau des commissions
          f. annexe 6 – "Term Sheet for a Nuclear Operator’s Liability
              Guarantee Scheme" (projet du 8 mars 2017)
          g. annexe 7 – "Calcul de la Fee Table – application de la
              méthode"
          h. annexe 8 – "arbre de décision"
          i. annexe 9 – Arrêtés ministériels du 22 mars 2016
          j. annexe 10 – Note au conseil des ministres
          k. annexe 11 – "Council decision of 8 March 2004"
   ‐   Mémo complémentaire du 19 mai 2017 et ses annexes:
          a. annexe 1 – Tableau primes Elini
          b. annexe 2 – Tableau primes Syban
   ‐   Mémo du 16 septembre 2016 "Note – Preliminary Meeting with
       European Commission"
   ‐   Mémo du 7 novembre 2016 "Note – Additional Information on the
       Belgian Nuclear Guarantee Scheme"
   ‐   Mémo du 9 janvier 2017 "Questions Commission re. Belgian
       Nuclear Guarantee Scheme"
   ‐   Email du 21 février 2017 "Belgian guarantee scheme: Response to
       your question from our discussion on February 13"
   ‐   Email du 2 mars 2017 "Re: Belgian guarantee scheme: Response to
       your question from our discussion on February 13"

II. Tableau des informations confidentielles

III. Décision confidentielle de la Commission européenne et tableau des
informations confidentielles soumis à la Commission européenne

   1. Tableau des informations confidentielles soumis le 5 septembre
      2017 à la Commission européenne
   2. Décision confidentielle de la Commission européenne du 14 juillet
      2017
                                                                              14

   2. La recevabilité du recours

La Commission a examiné la recevabilité du recours dans sa décision
intérimaire n° 2017-15 et constaté que le recours est recevable.

   3. Le bien-fondé du recours

La Commission doit préalablement déterminer si les informations
demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006.
La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont régis
par l’autorité fédérale ainsi qu’aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, § 1er, de la loi du
5 août 2006) et disposent d’informations environnementales (article 18,
§ 1er de la loi).

   3.1 Le champ d’application personnel

L’article 4, § 1er de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à
l’information en matière d’environnement dispose qu’elle est
d’application aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et
b), dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité
fédérale, ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°,
c) qui sont sous leur contrôle. Cette loi définit la notion d’instance
environnementale comme “a) une personne morale ou un organe créé
par ou en vertu de la Constitution, d’une loi, d’un décret ou d’une règle
visée à l’article 134 de la Constitution ;
b) toute personne physique ou morale qui exerce des fonctions
administratives publiques, y compris des tâches, activités ou services
spécifiques en rapport avec l’environnement ;
c) toute personne physique ou morale ayant des responsabilités ou des
fonctions publiques, ou fournissant des services publics, en rapport avec
l’environnement, sous le contrôle d’un organe ou d’une personne visé(e)
au point a) ou b).
Les organes et institutions avec une compétence judiciaire ne tombent
pas sous cette définition à moins qu’ils agissent avec une autre fonction
que judiciaire. Les assemblées législatives et les institutions y attachées ne
relèvent pas de cette définition, sauf si elles agissent en qualité
administrative.”
                                                                            15

En sa qualité de représentant de l’État fédéral, le Ministre des Finances
appartient à la catégorie mentionnée à l’article 3, 1°, a) de la loi du 5 août
2006 (voir Doc. Parl. Chambre, 2005-2006, 51-2511/001, 12-13). Le
recours est par conséquent dirigé contre une instance environnementale
au sens de cette loi.

   3.2 Le champ d’application matériel

La loi du 5 août 2006 accorde un droit d’accès aux informations
environnementales sur la base de l’article 18 sans qu’il faille justifier d’un
intérêt à cette fin. L’objet du recours porte sur des documents transmis
aux instances européennes dans le cadre du dossier relative à un
programme de garantie de la responsabilité civile dans le domaine de
l’énergie nucléaire transmis à la Commission européenne.

L’information environnementale est définie comme “toute information,
peu importe le support et la forme matérielle, dont dispose une instance
environnementale concernant :
        a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère,
        l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y
        compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la
        diversité biologique et ses composantes, y compris les
        organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces
        éléments ;
        b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la
        contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie
        des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés
        par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou,
        par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
        visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
        au point e) ;
        c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour
        autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de
        l’environnement tels que visés au point a) ou, par
        l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
        visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
        au point e) ;
        d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les
        rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs,
        les émissions, les déversements et autres rejets dans
                                                                           16

         l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des
         incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au
         point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que
         visés au point b) ;
         e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des
         incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou
         d;
         f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état,
         protéger, restaurer, développer l’état des éléments de
         l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de
         l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites
         culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c),
         et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ;
         g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses
         économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités
         visées aux points e) et f);
         h) les rapports sur l’application de la législation
         environnementale”

On peut déduire de la note du SPF Finances qu’à défaut d’une description
claire par le demandeur, les documents non transmis sont “les documents
transmis à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’État”.
Une fraction ou une partie des informations environnementales qui ont
été transmises au demandeur est également présente dans ces documents.
Contrairement à ce qu’affirme le SPF Finances, cela n’empêche pas que le
ministre soit tenu d’également de divulguer les informations concernées
dans ces documents complémentaires. Le demandeur doit en effet avoir
la possibilité de vérifier l’affirmation qu’il s’agit des mêmes informations.

Le point de vue du SPF Finances selon lequel les informations restantes
contiennent “également des informations financières, commerciales et
industrielles”, ne peut pas mener à la conclusion qu’il ne s’agirait pas
d’informations environnementales.

Dans sa deuxième note explicative, le SPF Finances donne davantage
d’explications au sujet de l’information demandée : « Il s’agit uniquement
de fixer les modalités d’une garantie financière subsidiaire par l’État, en
faveur des victimes, lorsqu’un exploitant est responsable d’un dommage
nucléaire et n’est pas suffisamment assuré, et de savoir si cette garantie
constitue une aide d’État. Ceci ne se rapporte que de manière très
                                                                             17

éloignée à l’environnement et n’est                pas    une    ‘information
environnementale’ au sens légal du terme. »

La commission considère que l’information demandée ne concerne ni
« l’état des éléments de l’environnement » visé à l’article 3, 4°, a) de la loi
du 5 août 2006, ni « l’état de santé de l’homme et sa sécurité » visé à
l’article 3, 4, b) de la loi du 5 août 2006. L’information demandée ne
concerne également pas « l’état de site culturels de valeur et de
constructions » visé à l’article 3, 4°, d), ni « des facteurs qui ont ou sont
susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement »
visés à l’article 3, 4°, d) de la loi du 5 août 2006. La commission estime
également que l’information concerne « les mesures et activités ayant
pour objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l’état des
éléments de l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé
de l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites culturels
de valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter
toute pression, la limiter ou la compenser » comme le révèle l’article 3,
4°, f) de la loi du 5 août 2006. Selon les travaux préparatoires de l’article
10/1 de la loi du 22 juillet 1985 sur la responsabilité civile dans le
domaine de l’énergie nucléaire introduite par la loi du 29 juin 2014
modifiant la loi du 22 juillet 1985 sur la responsabilité civile dans le
domaine de l’énergie nucléaire, cette disposition a en fait été prise car un
certain nombre de traités prévoient une responsabilité objective et
limitée de l’exploitant de centrales nucléaires pour des dommages à des
tiers (Doc. parl. Chambre, 2013-2014, n° 53-3431/001, pp. 19-20):

« L’extension du champ de la responsabilité civile de l’exploitant
nucléaire, tant au niveau des risques couverts que de la durée des délais
de prescription, exigerait normalement que le secteur des assurances
soit prêt à y répondre ou que des garanties financières soient
disponibles. L’expérience montre toutefois que certains éléments du
dommage à l’environnement ainsi que le remplacement de la
prescription décennale par la trentenaire pour les dommages corporels,
par exemple, sont ou risquent de s’avérer difficiles à couvrir à l’avenir.
Cette question n’est pas propre à la Belgique; elle se pose à des degrés
divers pour la plupart des Parties à la Convention de Paris; bien que les
pouvoirs publics entendent inciter les exploitants à tout faire pour
trouver une solution sur le marché, la plupart des États entendent offrir
une solution temporaire et strictement subsidiaire prenant le plus
souvent la forme de garanties étatiques (comme par exemple aux Pays-
                                                                            18

Bas ou encore en Espagne et au Royaume-Uni, où le risque historique
du terrorisme a été couvert de cette façon). Cette solution doit par
ailleurs rester ouverte, l’évolution à venir des capacités d’assurance
étant difficilement prévisible.
C’est pour faire face à ces préoccupations que le projet de loi, permet à
l’État, pour autant que de besoin, de mettre en place une garantie de
l’État pour les risques qui ne trouveraient pas d’assureur.
L’article 10/1, inséré dans la loi du 22 juillet 1985 par l’article 8 du
présent projet, requiert d’abord que l’exploitant établisse qu’il est dans
l’impossibilité d’obtenir pour certains risques une assurance ou une
garantie financière répondant aux exigences de la loi. Il peut alors
demander à l’État, d’octroyer une garantie, moyennant le paiement
d’une indemnité. Cette indemnité se justifie tant pour ne pas fausser la
concurrence par rapport au secteur des assurances, que pour inciter les
assurés à rechercher activement des couvertures ou garanties
alternatives. Elle devra en outre tenir compte des frais d’expertise requis
pour sa fixation, pour vérifier la réalisation effective du sinistre et de
coûts de gestion et de règlement des demandes de victimes de
dommages nucléaires. »

La loi devrait donc permettre aux exploitants d’encore prendre leur
responsabilité comme le prévoient les traités applicables, lorsqu’il ne leur
serait pas possible, ou très difficile, de faire autrement, parce que certains
risques sont en réalité pas ou presque pas assurables. Par conséquent, la
Commission considère qu’il existe un lien direct avec la possibilité
d’exploiter correctement les centrales nucléaires. En l’absence d’un tel
règlement, l’exploitant pourrait décider qu’il ne peut plus exploiter les
centrales nucléaires en question parce que les coûts d’assurance sont trop
élevés. Le fait qu’une centrale nucléaire puisse ou non être exploitée a un
effet indéniable sur l’environnement. Le régime de garantie permet aux
exploitants d’exploiter des centrales nucléaires dans le cadre du régime
de responsabilité prévu par la Convention de Paris.

Même si les documents sont liés à la question si « les conditions de la
garantie de l’État belge pour les exploitants d’installations nucléaires (y
compris les conditions financières de celle-ci pour les exploitants »
constitue une aide d’État, l’information dedans se rapporte à la notion
‘information environnementale’ comme définie dans l’article 3, 4 de la
loi du 5 août 2006.
                                                                             19

Par ailleurs, au cours des travaux préparatoires de la loi, il a été
indiqué ce qui suit (Doc. parl. Chambre, 2013-2014, n° 53-3431/001, p.
21):

« Cette garantie de l’État ne constitue pas une aide incompatible avec les
règles du droit européen de la concurrence.
En effet, l’article 87, 2, b, du Traité CE stipule explicitement que les aides
destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou
par d’autres événements extraordinaires sont compatibles avec le marché
commun.
Le régime de garantie prévu à l’article 10/1 afin d’assurer l’indemnisation
des victimes d’un dommage nucléaire peut donc tomber dans le champ
d’application de cette disposition, l’accident nucléaire pouvant être
considéré comme un événement extraordinaire, même s’il ne résulte pas
d’une calamité naturelle.
De plus, il convient de noter qu’en tout état de cause, l’article 10, c), de la
Convention de Paris révisée fait obligation à la Partie contractante dont
la couverture de la responsabilité d’un exploitant s’avère défaillante, de se
substituer à ce dernier. Le législateur belge avait anticipé ce besoin, avec
l’article 22 de la loi du 22 juillet 1985 (renvoi infra).
L’article 10, c) de la Convention a un effet réparateur; le dispositif de
l’article 10/1 introduit dans la loi a par contre pour but de prévenir toute
absence de couverture, de façon anticipée.
Ce faisant, l’impact financier et concurrentiel de cette intervention
éventuelle de l’État dans l’indemnisation du dommage nucléaire doit être
relativisé, d’une part par le fait que les exploitants doivent payer de ce
chef une indemnité et, d’autre part, par le fait qu’en cas d’appel à la
garantie, l’État deviendra créancier de l’exploitant à concurrence des
sommes payées au titre de la garantie. »

Contrairement à ce que le SPF des Finances remarque dans sa note, il
faut donner à l’article 3, 4°, f) une interprétation plus large qu’il ne lui
donne. Le fait qu’il s’agisse d’un mécanisme de garantie par l’État de la
responsabilité civile des exploitants nucléaires qui n’est pas considéré
comme des compensations environnementales, est donc également
insuffisant pour décider que l’article 3, 4°, f) n’est pas d’application,
nonobstant la question de savoir si l’article 3, 4°, g) (concernant l’analyse
coûts-avantages et d’autres analyses et hypothèses économiques utilisées
dans le cadre, entre autre, des mesures et activités visées à l’article 3, 4°,
f)), n’est également pas applicable.
                                                                            20



La Commission doit toutefois noter que cela ne signifie pas que toutes les
informations pour lesquelles le demandeur souhaite l’accès sont reprises
ci-dessous. Dans le cas contraire, ces informations peuvent entrer dans le
champ d’application de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de
l’administration et les règles de procédure de cette loi sont applicables.
Dans la mesure où les informations demandées n’ont rien à voir avec les
mesures visées à l’article 3, 4°, f) de la loi du 5 août 2006, la Commission
considère que le recours n’est pas fondé.

   3.3 La possibilité d’invoquer des motifs d’exception

La Commission tient à souligner que les documents de la Commission
européenne montrent que certaines informations et certains documents
ne peuvent en tout état de cause pas être considérés comme
« confidentiels ».

3.3.1. L’invocabilité du motif d’exception mentionné à l’article 27, §1er, 7°
de la loi du 5 août 2006

L’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale doit rejeter la publicité d’informations si elle estime
que l’intérêt public servi par la publicité ne l’emporte pas sur la
protection du caractère confidentiel des informations commerciales et
industrielles, lorsque ces informations sont protégées afin de préserver un
intérêt économique légitime, à moins que la personne d’où proviennent
les informations n’ait consenti à la publicité. Ce motif d’exception ne
permet pas de soustraire toutes les informations commerciales et
industrielles à la publicité mais uniquement les informations qui, par leur
nature, ont un caractère confidentiel. Pour invoquer ce motif
d’exception, il est donc nécessaire de démontrer que toutes les
informations présentes dans le document demandé, ou une partie de
celles-ci, ont un caractère confidentiel et que celui-ci peut être démontré
concrètement. Il est notamment possible de déduire le caractère
confidentiel du fait que les informations ne quittent pas une entreprise
sauf s’il y a une obligation légale à cette fin et l’entreprise fait tout pour
empêcher que ces informations soient diffusées d’une manière ou d’une
autre. Il ne suffit pas de se référer à la notification dans laquelle les
documents qui ont été fournis à la Commission européenne doivent être
                                                                           21

considérés comme étant confidentiels et contient la mention : « Strictly
privileged & confidential. Contains business secrets ».

De plus, il ne suffit pas que des informations commerciales et
industrielles confidentielles soient en jeu, il faut encore examiner si
l’intérêt qui est servi par la publicité ne l’emporte pas. En tout cas, on ne
peut nier qu’un intérêt général est servi par la publicité d’informations
sur l’assurance en cas d’accidents nucléaires.

Ce n’est que si toutes les conditions sont remplies que le motif
d’exception concerné peut être invoqué et même si c’est le cas, il peut
être procédé à la publicité si celui dont l’intérêt est protégé consent à
celle-ci. Le consentement ne joue dès lors un rôle qu’après qu’il a été
décidé que les informations relèvent de l’intérêt protégé par la loi et
après que la balance des intérêts n’a pas montré qu’il faut procéder à la
publicité.

Bien qu’une instance environnementale soit tenue de protéger les secrets
d’affaires des assureurs et des exploitants nucléaires, il faut encore
démontrer de manière convaincante que les informations concernées
peuvent être qualifiées comme telles.

En tout cas, il ne suffit pas de chercher un appui dans la réglementation
européenne en la matière et plus spécifiquement dans « des dispositions
relatives au secret professionnel et la protection des informations
confidentielles ».

En l’espèce, selon le SPF Finances, il s’agit notamment :

   ‐   du Règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999
       portant modalités d’application de l’article [93 du traité CE]. Ce
       Règlement est d’application directe en Belgique et doit dès lors
       être respecté. L’on se réfère plus particulièrement à son article 24
       sur le secret professionnel, lequel stipule : « La Commission et les
       États membres, ainsi que leurs fonctionnaires et autres agents, y
       compris les experts indépendants mandatés par la Commission,
       sont tenus de ne pas divulguer les informations couvertes par le
       secret professionnel qu’ils ont recueillies en application du
       présent règlement ».
                                                                              22

   ‐   du Règlement 794/2004 de la Commission du 21 avril 2004
       concernant la mise en œuvre du règlement 659/1999 visé ci-avant
       et, plus particulièrement, son nouvel article 11ter.
   ‐   de la Communication de la Commission C(2003) 4582 du 1er
       décembre 2003 sur le secret professionnel dans les décisions en
       matière d’aides d’État.

La Commission tient avant tout à signaler que le règlement (UE)
2015/1589 portant modalités d’application de l’article 108 du traité sur le
fonctionnement de l’Union européenne a entre-temps été adopté à la
place du règlement (CE) 659/1999. L’article 30 de ce règlement contient
une disposition identique à celle de l’article 24 de cet ancien règlement.

Le SPF Finances déclare être tenu au secret professionnel qui est à
présent réglé à l’article 30 du règlement (UE) 2015/1589 et que cela
ressort de “l’encadré figurant en première page de sa décision finale du 14
juillet 2017, publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 10
novembre 2017”. À cet égard, la Commission tient à souligner que
l’article 30 ne livre pas lui-même de secret professionnel, mais révèle
seulement que: « La Commission et les États membres, ainsi que leurs
fonctionnaires et autres agents, y compris les experts indépendants
mandatés par la Commission, sont tenus de ne pas divulguer les
informations couvertes par le secret professionnel qu’ils ont recueillies en
application du présent règlement.” Ce n’est donc que dans la mesure où
les informations sont sous la protection du secret professionnel qu’elles
ne peuvent être divulguées. Toutefois, nous ne savons pas exactement ce
qui est sous la protection du « secret professionnel » : en effet, le concept
ne peut pas être interprété selon le droit interne dans le règlement.

Selon le droit belge, cela ne suffit toutefois pas pour refuser la publicité
sur cette base. La Commission est tenue d’évaluer elle-même le secret
professionnel, indépendamment de l’évaluation de la Commission
européenne, qui est d’ailleurs basée sur des règles de droit (européennes)
autres que la notion de « caractère confidentiel des informations
commerciales et industrielles » figurant à l’article 27, §1er, 7° de la loi du 5
août 2006. D’ailleurs, l’éventuelle obligation de réserve dans le cadre du
régime d’aides d’État est avant tout basée sur l’initiative de la Belgique
afin de considérer certaines informations comme confidentielles
conformément à l’article 11ter du règlement (CE) n° 794/2004.
                                                                             23



La conclusion est dès lors qu’il est requis que, indépendamment de
l’argumentation relative à l’éventuelle obligation de réserve dans le cadre
du régime d’aides d’État, il soit concrètement démontré quelles
informations doivent être spécifiquement considérées comme des
informations commerciales et industrielles confidentielles au sens de la
disposition légale précitée. À cet égard, il ne suffit pas d’affirmer que
certaines informations ne sont pas rendues publiques et constituent des
secrets d’affaires. En vertu de la directive 2016/943/UE du Parlement
européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et
des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre
l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites de ces informations (Pb.
L. 157, 15 juin 2016, pp. 1-18), un « secret d’affaires » ne s’applique
qu’aux informations qui remplissent les conditions cumulatives
suivantes :
       a. elles sont secrètes en ce sens que, dans leur globalité ou dans la
       configuration et l’assemblage exacts de leurs éléments, elles ne
       sont pas généralement connues des personnes appartenant aux
       milieux qui s’occupent normalement du genre d’informations en
       question, ou ne leur sont pas aisément accessibles ;
       b. elles ont une valeur commerciale parce qu’elles sont secrètes ;
       c. elles ont fait l’objet, de la part de la personne qui en a le
       contrôle de façon licite, de dispositions raisonnables, compte tenu
       des circonstances, destinées à les garder secrètes; (Art. 2,
       paragraphe 1er de la directive 2016/943/UE).

Dans le cas présent, les preuves ne sont pas suffisantes pour démontrer
que les conditions pour être sous la protection du secret professionnel
sont remplies. En outre, la Commission tient à souligner que le fait que
les informations sont couvertes par le secret professionnel n’est pas un
motif suffisant pour invoquer l’exception prévue à l’article 27, § 1er, 7° de
la loi du 5 août 2006. En effet, il faut démontrer concrètement que
l’intérêt général servi par la divulgation des informations en question ne
l’emporte pas sur l’intérêt que le législateur a voulu protéger. Il n’existe
aucune justification de ce genre.

3.3.2. L’invocabilité du motif d’exception mentionné à l’article 27, § 1er,
3° de la loi du 5 août 2006
                                                                              24

L’article 27, § 1er, 3° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale rejette la publicité d’informations en matière
d’environnement si elle estime que l’intérêt du public servi par la
publicité ne l’emporte pas sur le caractère confidentiel des relations
fédérales internationales de la Belgique et des relations de la Belgique
avec les institutions supranationales et les relations de l’autorité fédérale
avec les communautés et régions.

Le fait que la Commission européenne a délibérément reconnu le
caractère confidentiel en acceptant leur noircissement dans la version
publique de sa décision, n’est pas un motif suffisant en droit belge pour
justifier l’invocation du motif d’exception de l’article 27, § 1er, 3° de la loi
du 5 août. Toutefois, les considérants 19 et 20 du règlement (UE)
2015/1589 du Conseil du 13 juillet 2015 concernant la mise en place de
dispositions supplémentaires pour l’application de l’article 108 du Traité
sur le fonctionnement de l’Union européenne, suscitent une
préoccupation quant à la protection d’informations considérées comme
confidentielles :

« Il y a lieu que la Commission tienne dûment compte de l’intérêt
légitime des entreprises à ce que leurs secrets d’affaires soient protégés.

Dans les cas où les informations désignées comme confidentielles ne
semblent pas couvertes par l’obligation de secret professionnel, il
convient de disposer d’un mécanisme permettant à la Commission de
décider dans quelle mesure ces informations peuvent être divulguées. »

Il convient toutefois de noter que cette préoccupation cible
principalement les informations reprises dans les décisions que prend la
Commission européenne quant aux entreprises.
La Commission considère que les motifs pour lesquels la confidentialité
des relations internationales et les relations de la Belgique avec les
organisations supranationales devraient être affectés par la divulgation de
certaines informations, ne sont pas suffisamment soutenus. De plus, il ne
suffit pas de refuser la divulgation de ces informations, même si tel est le
cas. Il est nécessaire de démontrer que l’intérêt général de la divulgation
ne l’emporte pas sur l’intérêt que le législateur a voulu protéger. La
divulgation ne peut être refusée que si le refus est précisément justifié.
                                                                           25

3.3.3 L’invocabilité du motif d’exception mentionné à l’article 27, § 1er, 6
de la loi du 5 août 2006

L’article 27, § 1er, 3° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale rejette la publicité d’information en matière
d’environnement si elle estime que l’intérêt du public servi par la
publicité ne l’emporte pas sur la confidentialité des délibérations du
gouvernement fédéral et des autorités responsables qui en relèvent. La
Commission tient à rappeler que la confidentialité des délibérations du
gouvernement fédéral ne porte que sur les multiples positions adoptées
par les différents participants à une délibération, et non sur le résultat de
cette délibération. La Commission note que, dans la mesure où les
informations demandées portent sur le contenu d’un projet d’arrêté
royal, cette exception ne peut être invoquée.

3.3.4. L’invocabilité du motif d’exception mentionnée à l’article 27, § 1 er,
8° de la loi du 5 août 2006

L’article 27, § 1er, 8° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale rejette la publicité d’informations en matière
d’environnement si elle estime que l’intérêt du public servi par la
publicité ne l’emporte pas si la demande porte sur un avis ou une opinion
communiquée volontairement et à titre confidentiel par un tiers à une
instance environnementale, pour lesquels celui-ci a explicitement
demandé la confidentialité, à moins qu’il n’ait consenti à la publicité. La
Commission tient à rappeler que cette exception ne peut être invoquée
que si les différentes conditions prévues par cette disposition sont
remplies. Premièrement, les informations doivent avoir été fournies à
l’autorité environnementale sur une base volontaire. Cela signifie qu’il
n’existe aucune obligation juridique de fournir de telles informations à
l’autorité environnementale. Deuxièmement, une fois que ces
informations ont été fournies à l’autorité environnementale, la
confidentialité doit être demandée par l’émetteur. De plus, cette
exception ne s’applique pas à toutes les informations, mais seulement aux
conseils et opinions. Elle ne s’applique pas non plus aux informations
factuelles.

Un document qui tombe sous l’objet de la demande, une analyse
officieuse communiquée par les services compétents de la Banque
Nationale de Belgique (BNB), ne peut être considérée comme des
                                                                           26

informations répondant aux conditions de l’article 27, §1er, 8° de la loi du
5 août 2006. En effet, la BNB ne peut être considérée comme un tiers
dans le cadre de la présente loi.

3.3.5 Conclusion

La Commission considère que les informations demandées entrent dans
le champ d’application de la loi du 5 août 2006 et que, par conséquent, la
divulgation ne peut être refusée que si un ou plusieurs motifs
d’exceptions sont précisément justifiés. La Commission considère que
l’invocation des motifs d’exceptions, et donc l’entrave à la divulgation,
dans l’article 27, §1er, 3° et 7° n’est pas suffisamment justifiée.
De plus, la Commission considère qu’il n’y a pas de raison d’invoquer les
motifs d’exceptions repris dans l’article 27, §1er, 6° et 8°.
La Commission invite donc le ministre à soumettre suffisamment
d’éléments convaincants en ce qui concerne l’article 27, §1er, 3° et 7° de la
loi du 5 août 2006 au plus tard le 15 juin 2018.




Bruxelles, le 19 mars 2018.


La Commission était composée comme suit :

Jeroen Van Nieuwenhove, président
Frankie Schram, secrétaire et membre
Hrisanti Prasman, membre
Steven Vandenborre, membre
Brecht Vercruysse, membre




   F. SCHRAM                                          J. VAN NIEUWENHOVE
   secrétaire                                                président

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