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Décision intérimaire CFR 15

Sur le refus de donner accès aux documents transmis à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’État relatives à la garantie que la Belgique doit donner pour les accidents nucléaires et qui ont été transmis aux instances européennes

Transposition

Commission fédérale de recours pour
    l’accès aux informations
       environnementales



                  11 décembre 2017




      DÉCISION intérimaire n° 2017-15

      sur le refus de donner accès aux documents
     transmis à la Commission européenne, dans le
  cadre des aides d’État relatives à la garantie que la
  Belgique doit donner pour les accidents nucléaires
   et qui ont été transmis aux instances européennes
                   (CFR/2017/10)

          NOLLET/MINISTRE DE FINANCES
                                                                           2

   1. Un récapitulatif

1.1. Par courrier en date du 12 septembre 2017, Monsieur Jean-Marc
Nollet demande à Monsieur Van Overtveldt, Ministre des Finances, une
copie papier du projet d’arrêté royal ainsi que les documents relatifs à la
garantie que la Belgique doit donner pour les accidents nucléaires et qui
ont été transmis aux instances européennes.

1.2. Par courrier en date du 12 octobre 2017, le ministre répond
positivement à une partie de cette demande. Le demandeur reçoit le
projet d’arrêté royal établissant un programme de garantie de la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire soumis à
l’avis du Conseil d’Etat, une copie du communiqué de presse émanant de
la Commission européenne ainsi que la version publique (mais pas encore
publiée) de la décision rendue par cette dernière. Le ministre ne donne
pas suite à la demande dans la mesure où il s’agit de documents qui ont
été transmis aux instances européennes dans le cadre de ce dossier et qui
contiennent des informations d’entreprises confidentielles qui relèvent
du secret professionnel sur la base de l’article 6, §1er, 7° de la loi du 11
avril 1994 relative à la publicité de l’administration et sur la base de
l’article 27, 7° de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à
l’information en matière d’environnement.

1.3. Par courrier en date du 16 novembre 2017, Monsieur Nollet
introduit un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour
l’accès aux informations environnementales, ci-après dénommée la
Commission de recours, contre le refus partiel.

1.4. Par e-mail en date du 21 novembre 2017, le secrétaire de la
Commission de recours demande au SPF Finances de lui transmettre les
documents concernés et il attire l’attention sur la possibilité de
transmettre une note circonstanciée pour le 1er décembre 2017 au plus
tard.

1.5. Par e-mail en date du 30 novembre 2017, la Commission de recours
reçoit les documents en question ainsi que la note circonstanciée du SPF
Finances. Cette note contient la justification suivante :
                                                                             3

   a) La loi du 5 août 2006 relative à l’accès public à l’information en
      matière d’environnement.

Attendu que Monsieur Nollet base sa demande d’information sur la loi du 5
août 2006 relative à l’accès public à l’information en matière
d’environnement et qu’il convient donc de s’y référer.

Qu’on rappelle que ladite loi transpose la directive européenne 2003/4/CE
du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès
du public à l’information en matière d’environnement.

Que le champ d’application de cette loi se limite à la communication
d’informations environnementales, au public dans la mesure où aucune
exception ne peut être invoquée par l’instance environnementale.

Qu’il y a donc lieu d’apprécier ces divers éléments au cas d’espèce.

   i) L’information environnementale

L’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006 définit la notion d’information
environnementale.
Le projet d’arrêté royal établissant un programme de garantie de la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire visé par la
demande de Monsieur Nollet tombe sous le champ d’application de l’article
3, 4°, f). Cette disposition précise qu’est considérée comme information
environnementale, toute information dont dispose une instance
environnementale concernant : « les mesures et activités ayant pour
objectif de garder en état, protéger, restaurer, développer l'état des
éléments de l'environnement tels que visés au point a) ou l'état de santé de
l'homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites culturels de
valeur et de constructions tels que visés au point c), et de leur éviter toute
pression, la limiter ou la compenser ».
Le projet d’arrêté royal dont question vise à mettre en œuvre la garantie de
l’État prévue par l’article 10/1 de la loi du 22 juillet 1985 sur la
responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire, lequel permet
aux exploitants d’installations nucléaires de bénéficier d’une garantie de
l’État, moyennant rémunération, dans la mesure où le marché privé de
l’assurance et des garanties financières ne leur offre pas les couvertures
requises.
                                                                                              4

Actuellement, le marché des assurances en Belgique présente un déficit
dans deux segments 1 particuliers, à savoir les dommages
environnementaux et les dommages aux personnes se manifestant plus de
dix ans après l’accident nucléaire. En conséquence, en cas d’accident
nucléaire ayant des répercussions dommageables sur l’un de ces deux
segments, la garantie d’État pourrait intervenir. C’est donc bien [dans] ce
sens que le projet d’arrêté royal contient une information
environnementale (des mesures visant à compenser toute pression sur
l’état des éléments de l’environnement ou l’état de santé de l’homme).
Cette information environnementale a été intégralement communiquée
puisque l’entièreté du projet d’arrêté royal a été transmise à Monsieur
Nollet. Il a également obtenu copie du projet du rapport au Roi, lequel
détaille et explique chaque disposition du projet d’arrêté royal. Monsieur
Nollet a donc obtenu toutes les informations nécessaires.
En conséquence, l’on ne voit pas à quelle information environnementale
(telle que définie à l’article 3, 4° de la loi du 5 août 2006) supplémentaire
Monsieur Nollet prétend encore accéder.

    ii) L’accès du public

Il ressort de la directive européenne 2003/4/CE du 28 janvier 2003
concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement
que l’intention est de diffuser, le plus largement possible, auprès du grand
public l’information en matière d’environnement (voir le considérant n° 9
de ladite directive). La loi du 5 août 2006 reprend ce principe et c’est donc
bien en sa qualité de citoyen que Monsieur Nollet agit. Le citoyen
« lambda » pouvant demander l’accès à l’information environnementale, il
paraît évident qu’il fallait prévoir des exceptions à la publicité afin de
préserver des intérêts supérieurs.

    iii) Les exceptions à la publicité

La loi du 5 août 2006 prévoit en ses articles 27 à 32 une série d’exceptions à
la publicité. Ainsi, il existe certains cas de figure ou, bien qu’une
information environnementale existe, elle ne doit pas être communiquée au
demandeur.
En l’espèce, comme déjà mentionné ci‐dessus, l’on estime que Monsieur
Nollet a d’ores et déjà accédé à toute l’information environnementale
contenue dans ce dossier. Cependant, à titre subsidiaire, si l’on devait
considérer que d’autres informations environnementales existent (quod

1
 soit un sous‐ensemble du risque de responsabilité défini par référence à un type de péril ou de
dommage.
                                                                               5

non), il faudrait alors les considérer comme bénéficiant des exceptions
visées par les articles 27, §1er, 3° et 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006. En
effet, il semble que Monsieur Nollet considère que les documents transmis
à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’Etat, devraient
également lui être communiqués. Cela est inexact dans la mesure où ces
documents ne contiennent aucune autre information environnementale
que celles déjà communiquées par la transmission du projet d’arrêté royal,
du rapport au Roi et du projet de la décision publique de la Commission
européenne. Néanmoins, même à considérer que lesdits documents
contiendraient une information environnementale supplémentaire, ils ne
pourraient pas être transmis à Monsieur Nollet. En effet, ces documents
contiennent également des informations financières, commerciales et
industrielles confidentielles. Ainsi, la notification transmise à la Commission
européenne est frappée de confidentialité et contient la mention : « Strictly
privileged & confidential. Contains business secrets ». Ce document est
donc bien exclu de la publicité sur base de l’article 27, §1er, 7° lequel
précise que l’instance environnementale rejette la demande si l’intérêt du
public servi par la publicité ne l’emporte pas sur la protection de l’intérêt
suivant : « le caractère confidentiel des informations commerciales et
industrielles, lorsque ces informations sont protégées afin de préserver un
intérêt économique légitime (…) ».
En l’espèce, il convient de particulièrement protéger les secrets d’affaires
des assureurs et des exploitants nucléaires. Cette confidentialité est par
ailleurs reconnue par la Commission européenne elle‐même (voir point 2.b.
ci‐dessous).
Egalement, ces mêmes documents sont encore exclus de la publicité sur
base de l’article 27, §1er, 3° lequel protège « le caractère confidentiel des
relations fédérales internationales de la Belgique et des relations de la
Belgique avec les institutions supranationales (..) ». En l’occurrence, l’on ne
peut communiquer aux citoyens les documents confidentiels transmis par
l’Etat belge à la Commission européenne dans le cadre de la législation
relative aux aides d’Etat. Ces relations sont protégées et les documents
transmis sont exclus de la publicité.

   b) La législation européenne

Enfin, dans la mesure où l’on comprend que Monsieur Nollet prétend à un
droit d’accès aux documents échangés avec la Commission européenne
dans le cadre de la législation relative aux aides d’Etat, il convient donc de
se référer à la législation européenne applicable en cette matière et, plus
particulièrement, des dispositions relatives au secret professionnel et la
protection des informations confidentielles.
                                                                             6

En l’espèce, il s’agit notamment :
    ‐ du Règlement 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant
        modalités d’application de l’article 108 du traité sur le
        fonctionnement de l’Union européenne. Ce Règlement est
        d’application directe en Belgique et doit dès lors être respecté. L’on
        se réfère plus particulièrement à son article 24 sur le secret
        professionnel, lequel stipule : « La Commission et les Etats membres,
        ainsi que leurs fonctionnaires et autres agents, y compris les experts
        indépendants mandatés par la Commission, sont tenus de ne pas
        divulguer les informations couvertes par le secret professionnel
        qu’ils ont recueillies en application du présent règlement ».
    ‐ du Règlement 794/2004 de la Commission du 21 avril 2004
        concernant la mise en œuvre du règlement 659/1999 visé ci‐avant
        et, plus particulièrement, son nouvel article 11 ter.
    ‐ de la Communication de la Commission C(2003) 4582 du 1er
        décembre 2003 sur le secret professionnel dans les décisions en
        matière d’aides d’Etat.

Il résulte de ces différentes dispositions que lorsque des informations sont
reconnues par la Commission comme étant frappée de confidentialité, elles
ne peuvent être divulguées et sont couvertes par le secret professionnel.
Dans le dossier dont objet, la Commission européenne a bel et bien
considéré certaines informations comme étant confidentielles. Cela ressort
clairement de l’encadré figurant en première page de sa décision finale du
14 juillet 2017, publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 10
novembre 2017. C’est donc bien pour cette raison qu’elle a occulté
différentes informations. En conséquence, seule la décision (version
publique) rendue par la Commission européenne peut être divulguée.
Communiquer à Monsieur Nollet d’autres documents reviendrait à violer le
Règlement 659/1999 du 22 mars 1999.

   2. La recevabilité du recours

La Commission de recours estime que le recours est recevable.
L’article 35 de la loi du 5 août 2006 dispose que le demandeur peut
former un recours auprès de la Commission fédérale de recours pour
l'accès aux informations environnementales contre une décision d'une
instance environnementale visée à l'article 4, § 1er, si le délai imparti
pour prendre la décision est venu à expiration ou, en cas de refus
d'exécution ou d'exécution incorrecte d’une décision, ou en raison de
toute autre difficulté qu’il rencontre dans l'exercice des droits que
                                                                              7

confère cette loi. Le recours doit être introduit dans un délai de soixante
jours. Le recours a été introduit le 16 novembre 2017 contre une décision
prise le 17 octobre 2017. Par conséquent, le recours a été introduit dans
le délai fixé par la loi et est donc recevable.

Le recours n’est toutefois recevable que dans la mesure où les documents
demandés par le demandeur n’ont pas déjà été fournis. La
correspondance avec le SPF Finances montre que c’est le cas pour les
documents suivants :
    ‐ L’entièreté du projet d’arrêté royal établissant un programme de
       garantie de la responsabilité civile dans le domaine de l’énergie
       nucléaire
    ‐ le rapport au Roi
    ‐ le projet de la décision publique de la Commission européenne.

   3. Le bien-fondé du recours

La Commission doit préalablement déterminer si les informations
demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006.
La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont régis
par l’autorité fédérale ainsi qu’aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, § 1er, de la loi du
5 août 2006) et disposent d’informations environnementales (article 18,
§ 1er de la loi).
   3.1 Le champ d’application personnel

L’article 4, § 1er de la loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à
l’information en matière d’environnement dispose qu’elle est
d’application aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°, a) et
b), dont l’organisation et le fonctionnement sont réglés par l’autorité
fédérale, ainsi qu’aux instances environnementales visées à l’article 3, 1°,
c) qui sont sous leur contrôle. Cette loi définit la notion d’instance
environnementale comme “a) une personne morale ou un organe créé
par ou en vertu de la Constitution, d’une loi, d’un décret ou d’une règle
visée à l’article 134 de la Constitution ;
b) toute personne physique ou morale qui exerce des fonctions
administratives publiques, y compris des tâches, activités ou services
spécifiques en rapport avec l’environnement ;
                                                                             8

c) toute personne physique ou morale ayant des responsabilités ou des
fonctions publiques, ou fournissant des services publics, en rapport avec
l’environnement, sous le contrôle d’un organe ou d’une personne visé(e)
au point a) ou b).
Les organes et institutions avec une compétence judiciaire ne tombent
pas sous cette définition à moins qu’ils agissent avec une autre fonction
que judiciaire. Les assemblées législatives et les institutions y attachées ne
relèvent pas de cette définition, sauf si elles agissent en qualité
administrative.”

En sa qualité de représentant de l’État fédéral, le Ministre des Finances
appartient à la catégorie mentionnée à l’article 3, 1°, a) de la loi du 5 août
2006 (voir Doc. Parl. Chambre, 2005 – 2006, 51 2511/001, 12 – 13). Le
recours est par conséquent dirigé contre une instance environnementale
au sens de cette loi.

   3.2 Le champ d’application matériel

La loi du 5 août 2006 accorde un droit d’accès aux informations
environnementales sur la base de l’article 18 sans qu’il faille justifier d’un
intérêt à cette fin. L’objet du recours porte sur des documents transmis
aux instances européennes dans le cadre du dossier relative à un
programme de garantie de la responsabilité civile dans le domaine de
l’énergie nucléaire transmis à la Commission européenne.

L’information environnementale est définie comme “toute information,
peu importe le support et la forme matérielle, dont dispose une instance
environnementale concernant :
        a) l’état des éléments de l’environnement, tels que l’atmosphère,
        l’air, le sol, les terres, l’eau, le paysage, les sites naturels, y
        compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la
        diversité biologique et ses composantes, y compris les
        organismes génétiquement modifiés, et l’interaction entre ces
        éléments ;
        b) l’état de santé de l’homme et sa sécurité y compris la
        contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie
        des personnes, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés
        par l’un des éléments de l’environnement visés au point a) ou,
        par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
                                                                           9

         visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
         au point e) ;
         c) l’état de sites culturels de valeur et de constructions, pour
         autant qu’ils soient ou puissent être altérés par les éléments de
         l’environnement tels que visés au point a) ou, par
         l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs tels que
         visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
         au point e) ;
         d) des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les
         rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs,
         les émissions, les déversements et autres rejets dans
         l’environnement qui ont ou sont susceptibles d’avoir des
         incidences sur les éléments de l’environnement tels que visés au
         point a) ou l’état de santé de l’homme et sa sécurité tels que
         visés au point b) ;
         e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d’avoir des
         incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou
         d;
         f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état,
         protéger, restaurer, développer l’état des éléments de
         l’environnement tels que visés au point a) ou l’état de santé de
         l’homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites
         culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c),
         et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser ;
         g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses
         économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités
         visées aux points e) et f);
         h) les rapports sur l’application de la législation
         environnementale”

On peut déduire de la note du SPF Finances qu’à défaut d’une description
claire par le demandeur, les documents non transmis sont “les documents
transmis à la Commission européenne, dans le cadre des aides d’Etat”.
Une fraction ou une partie des informations environnementales qui ont
été transmises au demandeur est également présente dans ces documents.
Contrairement à ce qu’affirme le SPF Finances, cela n’empêche pas que le
ministre soit tenu d’également divulguer les informations concernées
dans ces documents complémentaires. Le demandeur doit en effet avoir
la possibilité de vérifier l’affirmation qu’il s’agit des mêmes informations.
                                                                            10

Le point de vue du SPF Finances selon lequel les informations restantes
contiennent “également des informations financières, commerciales et
industrielles”, ne peut pas mener à la conclusion qu’il ne s’agirait pas
d’informations environnementales. Selon la Commission de recours, ces
informations doivent être qualifiées comme telles parce qu’en effet, “les
analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques
utilisées dans le cadre des mesures et activités visées aux points e) et f)”
doivent également être considérées comme telles.

   3.3 La possibilité d’invoquer des motifs d’exception

3.3.1. L’évaluation du motif d’exception invoqué dans la décision du
ministre

La Commission de recours constate que le ministre des Finances invoque
l’article 6, § 1er, 7° de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de
l’administration et l’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006 relative à
l’accès du public à l’information en matière d’environnement pour
refuser la publicité. La Commission souhaite souligner qu’étant donné
qu’elle estime que les informations concernées dans les documents
demandés doivent être considérées comme des informations
environnementales, seul l’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006 peut
être invoqué.

Selon la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et du Conseil d’État,
un motif d’exception peut seulement être valablement invoqué lorsque
son application peut être motivée concrètement. Le ministre a omis de
motiver concrètement la raison pour laquelle il estime que l’article 27,
§ 1er, 7° de la loi du 5 août 2006 peut être invoqué à juste titre pour
refuser les documents concernés.

3.3.2. L’évaluation par la Commission de recours

Après analyse des documents lui confiés et après avoir pris connaissance
de la note détaillée du SPF Finances, la Commission de recours en vient à
l’analyse suivante :
                                                                            11

3.3.2.1. L’invocabilité du motif d’exception mentionné à l’article 27, §1er,
7° de la loi du 5 août 2006

L’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale doit rejeter la publicité d’informations si elle estime
que l’intérêt public servi par la publicité ne l’emporte pas sur la
protection du caractère confidentiel des informations commerciales et
industrielles, lorsque ces informations sont protégées afin de préserver un
intérêt économique légitime, à moins que la personne d'où proviennent
les informations n'ait consenti à la publicité. Ce motif d’exception ne
permet pas de soustraire toutes les informations commerciales et
industrielles à la publicité mais uniquement les informations qui, par leur
nature, ont un caractère confidentiel. Pour invoquer ce motif
d’exception, il est donc nécessaire de démontrer que toutes les
informations présentes dans le document demandé, ou une partie de
celles-ci, ont un caractère confidentiel et que celui-ci peut être démontré
concrètement. Il est notamment possible de déduire le caractère
confidentiel du fait que les informations ne quittent pas une entreprise
sauf s’il y a une obligation légale à cette fin et l’entreprise fait tout pour
empêcher que ces informations soient diffusées d’une manière ou d’une
autre. Il ne suffit pas de se référer à la notification dans laquelle les
documents qui ont été fournis à la Commission européenne doivent être
considérés comme étant confidentiels et contient la mention : « Strictly
privileged & confidential. Contains business secrets ».

De plus, il ne suffit pas que des informations commerciales et
industrielles confidentielles soient en jeu, il faut encore examiner si
l’intérêt qui est servi par la publicité ne l’emporte pas. En tout cas, on ne
peut nier qu’un intérêt général est servi par la publicité d’informations
sur l’assurance en cas d’accidents nucléaires.

Ce n’est que si toutes les conditions sont remplies que le motif
d’exception concerné peut être invoqué et même si c’est le cas, il peut
être procédé à la publicité si celui dont l’intérêt est protégé consent à
celle-ci. Le consentement ne joue dès lors un rôle qu’après qu’il a été
décidé que les informations relèvent de l’intérêt protégé par la loi et
après que la balance des intérêts n’a pas montrée qu’il faut procéder à la
publicité.
                                                                         12

Bien qu’une instance environnementale soit tenue de protéger les secrets
d’affaires des assureurs et des exploitants nucléaires, il faut encore
démontrer de manière convaincante que les informations concernées
peuvent être qualifiées comme telles.

En tout cas, il ne suffit pas de chercher un appui dans la réglementation
européenne en la matière et plus spécifiquement dans “des dispositions
relatives au secret professionnel et la protection des informations
confidentielles”.

En l’espèce, selon le SPF Finances, il s’agit notamment :

   ‐   du Règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999
       portant modalités d’application de l’article [93 du traité CE]. Ce
       Règlement est d’application directe en Belgique et doit dès lors
       être respecté. L’on se réfère plus particulièrement à son article 24
       sur le secret professionnel, lequel stipule : « La Commission et les
       Etats membres, ainsi que leurs fonctionnaires et autres agents, y
       compris les experts indépendants mandatés par la Commission,
       sont tenus de ne pas divulguer les informations couvertes par le
       secret professionnel qu’ils ont recueillies en application du
       présent règlement ».
   ‐   du Règlement 794/2004 de la Commission du 21 avril 2004
       concernant la mise en œuvre du règlement 659/1999 visé ci-
       avant et, plus particulièrement, son nouvel article 11ter.
   ‐   de la Communication de la Commission C(2003) 4582 du 1er
       décembre 2003 sur le secret professionnel dans les décisions en
       matière d’aides d’Etat.

La Commission de recours tient avant tout à signaler que le règlement
(UE) 2015/1589 portant modalités d’application de l’article 108 du traité
sur le fonctionnement de l’Union européenne a entre-temps été adopté à
la place du règlement (CE) 659/1999. L’article 30 de ce règlement
contient une disposition identique à celle de l’article 24 de cet ancien
règlement.

Le SPF Finances déclare être tenu au secret professionnel qui est à
présent réglé à l’article 30 du règlement (UE) 2015/1589 et que cela
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ressort de “l’encadré figurant en première page de sa décision finale du 14
juillet 2017, publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 10
novembre 2017”. Selon le droit belge, cela ne suffit toutefois pas pour
refuser la publicité sur cette base. La Commission de recours est tenue
d’évaluer elle-même le secret professionnel, indépendamment de
l’évaluation de la Commission européenne, qui est d’ailleurs basée sur des
règles de droit (européennes) autres que la notion de « caractère
confidentiel des informations commerciales et industrielles » figurant à
l’article 27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006. D’ailleurs, l’éventuelle
obligation de réserve dans le cadre du régime d’aides d’Etat est avant tout
basée sur l’initiative de la Belgique afin de considérer certaines
informations comme confidentielles conformément à l’article 11ter du
règlement (CE) n° 794/2004.

La conclusion est dès lors qu’il est requis que, indépendamment de
l’argumentation relative à l’éventuelle obligation de réserve dans le cadre
du régime d’aides d’Etat, il soit concrètement démontré quelles
informations doivent être spécifiquement considérées comme des
informations commerciales et industrielles confidentielles au sens de la
disposition légale précitée.

3.3.2.2. L’invocabilité du motif d’exception mentionné à l’article 27, § 1er,
3° de la loi du 5 août 2006

L’article 27, § 1er, 3° de la loi du 5 août 2006 dispose qu’une instance
environnementale rejette la publicité d’informations en matière
d’environnement si elle estime que l’intérêt du public servi par la
publicité ne l’emporte pas sur le caractère confidentiel des relations
fédérales internationales de la Belgique et des relations de la Belgique
avec les institutions supranationales et les relations de l’autorité fédérale
avec les communautés et régions.

La formulation de cette disposition légale et les circonstances de l’affaire
montrent que l’invocabilité de ce motif d’exception peut être
préalablement évaluée si la Commission de recours a une idée précise des
informations qui doivent être considérées comme des informations
économiques et commerciales confidentielles au sens de l’article 27, § 1er,
7°, de la loi du 5 août 2006.
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   4. Décision

La Commission de recours estime que le document demandé doit être
considéré comme des informations environnementales en la possession
d’une instance environnementale et que pour le moment, un nombre
insuffisant d’arguments ont été avancés pour démontrer que les
informations demandées doivent être considérées comme des
informations commerciales et économiques confidentielles qui
tomberaient dans le champ d’application de l’article 27, § 1er, 7° de la loi
du 5 août 2006.

La Commission demande dès lors sur la base de l’article 40 de la loi du 5
août 2006 que le Ministre des Finances lui transmette les documents
demandés afin qu’elle puisse exercer la mission qui lui est conférée par la
loi. Aucun motif d’exception ne peut être invoqué contre la Commission
sur la base de la loi du 5 août 2006. La Commission invite le Ministre à
exposer des éléments concrets qui justifient l’invocation de l’article 27, §
1, 7° de la loi du 5 août 2006 dans une note adressée à la Commission. La
Commission souhaite recevoir ces informations et éventuellement ces
arguments pour le 15 février 2018 au plus tard.




Bruxelles, le 11 décembre 2017.


La Commission était composée comme suit :

Jeroen Van Nieuwenhove, président
Frankie Schram, secrétaire et membre
Hrisanti Prasman, membre
Henri Kevers, membre suppléant




   F. SCHRAM                                         J. VAN NIEUWENHOVE
   secrétaire                                               président

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