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Décision CFR 18

Sur le refus implicite de donner accès aux accords et documents en relation avec l’exploitation de l’aéroport de Zaventem

Transposition

Commission fédérale de recours pour
    l'accès aux informations
       environnementales



                   6 juillet 2015




            DÉCISION n° 2015-18

  sur le refus implicite de donner accès aux accords
   et documents en relation avec l’exploitation de
                l’aéroport de Zaventem

                   (CFR/2015/5)

          DESMAELE/ MINISTRE DE LA MOBILITE
                                                                           2

   1. Un récapitulatif

1.1 Par courrier recommandé en date du 31 janvier 2015, Madame X
demande à obtenir “sous forme de copie soit à mon domicile, soit par
courriel à l’adresse desmaele.nathalie@belgacom.net”:
- tous accords, conventions, actes unilatéraux:
        - soit garantissant ou autorisant à l’exploitant de l’aéroport de
        Zaventem des heures d’ouverture de l’aéroport et un (des)
        nombres de mouvements qui y sont autorisés, de même que les
        sanctions qui seraient prévues en cas de non-respect;
        - soit contraignant l’exploitant de l’aéroport de faire en sorte
        qu’un nombre déterminé de mouvements soit possible et/ou que
        des heures d’ouverture de l’aéroport soient assurées;
- tous documents adressés à l’exploitant de l’aéroport, ou par lui, soit
avant la délivrance de la licence d’exploitation, soit après celle-ci et qui
concernent les heures d’ouverture de l’aéroport et le nombre de
mouvements à garantir, de même que les sanctions qui seraient prévues
en cas de non-respect.”

1.2 La ministre n’ayant pas donné suite à sa demande dans le délai de 30
jours prescrit par la loi, Madame X introduit, par courrier recommandé
avec accusé de réception en date du 25 mars 2015, un recours auprès de
la Commission fédérale de Recours pour l’accès aux informations
environnementales, ci-après dénommée la Commission. Par courrier
recommandé avec accusé de réception à la même date, elle informe
également la ministre compétente pour la mobilité de l’introduction de
ce recours.

1.3 Par e-mail en date du 3 avril 2015, le secrétariat de la Commission
demande à la Ministre de lui transmettre les documents demandés pour
le 15 avril 2015 au plus tard.

1.4 Le secrétariat de la Commission a pris, à plusieurs reprises, contact
par téléphone avec le Cabinet de la Ministre compétente. Il en ressort
que les documents demandés ne sont pas présents au cabinet et que le
cabinet s’engage à demander les documents demandés auprès des
différentes administrations qui relèvent des compétences de la ministre.

1.5 Le mercredi 24 juin 2015, une réunion de concertation a eu lieu avec
le cabinet de la ministre compétente et un représentant du SPF Mobilité.
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L’administration ne semble pas être au courant du recours introduit. Par
ailleurs, il s’avère qu’en réponse au courrier du 25 mars 2015, un courrier
a été envoyé à Madame Desmaele et que cette réponse a également été
transmise à la Commission. La Commission n’a pas reçu ces courriers et
en reçoit une copie le 25 juin 2015 dont on ne peut clairement affirmer
qu’il a effectivement été envoyé. Dans la réponse donnée à Madame
Desmaele, l’accès aux documents demandés est refusé sur la base de
l’article 27, §1er de la loi du 5 août 2006 et à titre de justification, on
avance qu’il s’agit d’un contrat de vente signé le 10 novembre 2004 entre
l’Etat belge et plus particulièrement Macquarie et que les autres
documents portent sur cette transaction. Ces documents contiennent des
informations commerciales et, pour cette raison, elles sont couvertes par
des clauses de confidentialité que l’Etat belge s’est engagé à respecter. Le
secrétaire a informé le représentant du cabinet que cette motivation
n’était pas suffisante et que, par conséquent, il était requis que la
Commission soit mise en possession de ces documents et ce, d’ici la
réunion de la Commission du 6 juillet 2015.

1.6 Le lundi 6 juillet 2015, le cabinet de la ministre compétente a informé
la Commission par téléphone que le contrat de vente n’est pas transmis à
la Commission et qu’il est examiné par un bureau d’avocats.


   2. La recevabilité du recours

La Commission estime que le recours est recevable. L’article 35 de la loi
du 5 août 2006 dispose que Le demandeur peut former un recours auprès
de la Commission fédérale de recours pour l'accès aux informations
environnementales contre une décision d'une instance environnementale
visée à l'article 4, § 1er, si le délai imparti pour prendre la décision est
venue à expiration ou, en cas de refus d'exécution ou d'exécution
incorrecte d'une décision, ou en raison de toute autre difficulté qu'il
rencontre dans l'exercice des droits que confère la présente loi. Le
recours doit être introduit dans un délai de soixante jours. Le recours a
été introduit le 25 mars 2015 contre l’absence d’une décision dans les
délais impartis.
                                                                                4

   3. Le bien-fondé du recours

   3.1 Le champ d’application personnel

La Commission doit préalablement déterminer si les informations
demandées tombent sous le champ d’application de la loi du 5 août 2006.
La loi du 5 août 2006 s’applique aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, a) et b), dont l’organisation et le fonctionnement sont régis
par l’autorité fédérale ainsi qu’aux instances environnementales visées à
l’article 3, 1°, c), qui sont sous leur contrôle (article 4, §1er, de la loi du 5
août 2006) et disposent d’informations environnementales (article 18,
§1er de la loi).

Cette loi définit la notion d’instance environnementale comme “a) une
personne morale ou un organe créé par ou en vertu de la Constitution,
d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la
Constitution;
b) toute personne physique ou morale qui exerce des fonctions
administratives publiques, y compris des tâches, activités ou services
spécifiques en rapport avec l'environnement;
c) toute personne physique ou morale ayant des responsabilités ou des
fonctions publiques, ou fournissant des services publics, en rapport avec
l'environnement, sous le contrôle d'un organe ou d'une personne visé(e)
au point a) ou b).
Les organes et institutions avec une compétence judiciaire ne tombent
pas sous cette définition à moins qu'ils agissent avec une autre fonction
que judiciaire. Les assemblées législatives et les institutions y attachées ne
relèvent pas de cette définition, sauf si elles agissent en qualité
administrative.”

Il ne fait aucun doute que la Ministre compétente pour la Mobilité doit
être considérée comme un organe de la personne morale ‘Etat fédéral’ et
doit donc être considérée comme une instance environnementale au sens
de la loi du 5 août 2006.

   3.2 Le champ d’application matériel

La loi du 5 août 2006 octroie un droit d’accès à l’information en matière
d’environnement. La notion “d’information environnementale” est
décrite à l’article 3, 4° comme:
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“toute information, peu importe le support et la forme
matérielle, dont dispose une instance environnementale
concernant:
a) l'état des éléments de l'environnement, tels que l'atmosphère,
l'air, le sol, les terres, l'eau, le paysage, les sites naturels, y
compris les biotopes humides, les zones côtières et maritimes, la
diversité biologique et ses composantes, y compris les
organismes génétiquement modifiés, et l'interaction entre ces
éléments;
b) l'état de santé de l'homme et sa sécurité y compris la
contamination de la chaîne alimentaire, les conditions de vie
des personnes, pour autant qu'ils soient ou puissent être altérés
par l'un des éléments de l'environnement visés au point a) ou,
par l'intermédiaire de ces éléments, par l'un des facteurs tels que
visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
au point e) ;
c) l'état de sites culturels de valeur et de constructions, pour
autant qu'ils soient ou puissent être altérés par les éléments de
l'environnement tels que visés au point a) ou, par
l'intermédiaire de ces éléments, par l'un des facteurs tels que
visés au point d) ou par les mesures et activités telles que visées
au point e) ;
d) des facteurs, tels que les substances, l'énergie, le bruit, les
rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs,
les émissions, les déversements et autres rejets dans
l'environnement qui ont ou sont susceptibles d'avoir des
incidences sur les éléments de l'environnement tels que visés au
point a) ou l'état de santé de l'homme et sa sécurité tels que
visés au point b) ;
e) les mesures et activités ayant ou étant susceptibles d'avoir des
incidences sur les éléments tels que visés aux points a), b), c) ou
d;
f) les mesures et activités ayant pour objectif de garder en état,
protéger, restaurer, développer l'état des éléments de
l'environnement tels que visés au point a) ou l'état de santé de
l'homme et sa sécurité tels que visés au point b), ou les sites
culturels de valeur et de constructions tels que visés au point c),
et de leur éviter toute pression, la limiter ou la compenser;
                                                                               6

         g) les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses
         économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités
         visées aux points e) et f);
         h) les rapports sur l'application de la législation
         environnementale”.

La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que la notion
d’information environnementale a une très vaste interprétation. Le fait
qu’un grand nombre d’exemples soient mentionnés dans la définition
indique que l’on ne peut pas donner une interprétation trop étroite à la
notion.

   3.3 La possibilité éventuelle d’invoquer un ou plusieurs motifs
       d’exception

Bien que la Ministre ne se réfère qu’à l’article 27, §1er, de la loi du 5 août
2006, il semble quand même qu’elle refuse principalement la publicité
sur la base de l’article 27, §1er, 7° de cette loi qui implique qu’une
instance environnementale rejette la demande si l’intérêt de la publicité
ne l’emporte pas sur la protection du caractère confidentiel des
informations commerciales et industrielles, lorsque ces informations sont
protégées afin de préserver un intérêt économique légitime, à moins que
la personne d'où proviennent les informations n'ait consenti à la
publicité. La Commission souhaite avant tout signaler qu’une clause de
confidentialité dans un contrat ne tombe pas du tout dans le champ
d’application de la loi du 5 août 2006 et qu’en soi, il n’y a aucune raison
de refuser la publicité. Des dispositions légales ne peuvent bien entendu
pas perdre leur effet de par l’application d’une clause de confidentialité.
Par ailleurs, il y a lieu d’attirer l’attention sur le fait que la loi du 5 août
2006 garantit un droit d’accès minimal auquel le citoyen peut toujours
avoir recours. Cela n’empêche pas que dans le contrat figurent des
éléments qui doivent être soustraits à la publicité sur la base de l’article
27, §1er, 7° de la loi du 5 août 2006. Cependant, cela ne peut certainement
pas s’appliquer à toutes les informations. Cela s’applique uniquement aux
informations commerciales et industrielles confidentielles dont la
confidentialité doit être évaluée au moment de la demande. De plus, ce
motif d’exception ne peut être invoqué que pour des informations qui
sont protégées afin de préserver un intérêt économique légitime. Enfin,
il y a lieu, par le biais d’un alignement des intérêts de vérifier si l’intérêt
de la publicité ne l’emporte pas sur l’intérêt protégé. Cela doit être évalué
                                                                          7

de manière concrète. La Commission doit en tout cas constater qu’en ce
qui concerne les activités de et autour de l’aéroport de Zaventem, il y a
un intérêt public qui est servi par la publicité vu les nombreux groupes
d’action, le nombre de procédures judiciaires intentées et l’instauration
d’un service de médiation spécifique à l’égard des ‘”voisins”.

   3.4 Décision

En l’absence d’une collaboration effective avec le cabinet qui aurait
permis à la Commission d’avoir accès aux documents sur lesquels porte le
recours, la Commission n’a pas eu la possibilité d’exercer les missions qui
lui sont conférées par la loi dans un délai raisonnable. Cette loi est la
transposition de la Directive 2003/4/CE et du Traité d’Aarhus, de sorte
que la Belgique est tenue d’en exécuter les obligations. La Commission ne
peut que regretter le choix de la ministre de ne pas lui avoir donné accès
aux documents demandé. Elle entrave ainsi le bon fonctionnement de la
Commission et discrédite le système belge au niveau européen et
international.


Bruxelles, le 6 juillet 2015.


La Commission était composée comme suit:

Martine Baguet, présidente
Frankie Schram, secrétaire et membre
Claudia Hildebrand, membre suppléante




   F. SCHRAM                                              M. BAGUET
   secrétaire                                              présidente

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