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COMMISSION D’ACCÈS
AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS
Section Publicité de l’administration
DÉCISION N° 80
24 aout 2020
Commune – Procès-verbaux du collège communal – Confidentialité (non) –
Informations environnementales – Demande manifestement abusive (oui) –
Communication (non)
Commission d’accès aux documents administratifs
Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes
Secrétariat – Tél. : 081/33 31 80
support.cada@spw.wallonie.be
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RÉGION WALLONNE
COMMISSION D’ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS
Séance du 24 aout 2020
Décision n° 80
En cause : […],
Partie requérante,
Contre : Commune de Fléron,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, tel qu’il a été modifié par le
décret du 2 mai 2019, l’article 8, § 1er ;
Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, les articles L3231-1 et suivants ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la
Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 29 juin 2020 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 3 juillet 2020 et reçue le 6 juillet 2020 ;
Vu la réponse de la partie adverse reçue le 13 juillet 2020.
Objet et recevabilité du recours
1. La demande du 26 mai 2020 porte sur l’obtention des « PV du Collège du 19 mars 2020 jusqu'à
ce jour ».
Dans son courrier de saisine de la Commission, le requérant indique ce qui suit :
« La Commune de Fléron n’a toujours pas répondu à ma demande du 26 mai 2020 concernant
les copies des PV du Collège pendant la période des pouvoirs spéciaux confiés à ceux-ci suite
au confinement crise Covid.
Ils se sont mélangé les pinceaux avec une réponse sur une autre demande n’ayant rien à voir
avec celle-ci ».
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Cependant, il ressort de l’examen de la délibération du 18 juin 2020 du collège communal de
Fléron que cette délibération est relative à la demande d’accès du 26 mai 2020 du requérant,
qui demande à la commune de lui « envoyer tous les PV du Collège du 19 mars 2020 jusqu'à ce
jour ». Cette décision a été notifiée au requérant par email du 22 juin 2020.
Il y a donc lieu d’interpréter le recours de manière bienveillante, en décidant qu’il vise la
décision explicite de la commune, et non une décision implicite de rejet par l’effet du décret1.
2. Les documents sollicités sont des documents administratifs au sens de l’article L3211-3 du
Code de la démocratie locale et de la décentralisation.
3. En ce qui concerne les modalités d’introduction du recours, la partie requérante n’a pas
introduit son recours par recommandé, ni par tout autre moyen conférant date certaine à
l’envoi. En soi, le simple courrier électronique n’est pas de nature à conférer une date
certaine. Toutefois, la date du courrier recommandé envoyé à la partie adverse en application
de l’article 8bis, alinéa 3, du décret du 30 mars 19952, confère, le cas échéant, date certaine au
recours.
La Commission attire l’attention sur le risque que prend la partie requérante en termes
d’expiration du délai de recours dans un tel cas3.
4. En l’espèce, le courrier recommandé en application de l’article 8bis, alinéa 3, susmentionné a
été envoyé à la partie adverse le 3 juillet 2020. Dès lors, il y a lieu de considérer cette date
certaine comme celle du présent recours. Or la demande date du 26 mai 2020 et a été rejetée
explicitement par l’entité concernée le 22 juin 2020.
La partie requérante a donc introduit valablement son recours dans le délai de 30 jours prévu
à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du décret du 30 mars 1995, prenant cours le lendemain
de la réception du rejet explicite.
Examen du recours
5. Par une délibération du 18 juin 2020, la décision dont recours indique ce qui suit, en réponse à
la demande du requérant :
« Considérant que les séances du collège communal se tiennent à huis-clos; que les contenus
des procès-verbaux contiennent de nombreuses informations qui vont au delà de la simple
mention des décisions prises et qui peuvent être soumises à des exceptions légales; qu'en l'état
il s'agit d'un motif suffisant pour ne pas communiquer tout ou partie des procès-verbaux
réclamés;
Considérant que la demande telle que formulée n'est pas ciblée et partant, manifestement
disproportionnée et abusive;
1 Si la Commission devait tenir compte d’une décision implicite de rejet, le recours serait irrecevable ratione temporis.
2 Le courrier par lequel la Commission sollicite auprès de l’entité concernée la copie du document litigieux et le cas échéant
une note d’observation.
3 Voir en ce sens C.E., n° 243.796 du 22 février 2019, Evrard et consorts ; C.E. (A.G.), n°234.869 du 26 mai 2016, S.A.
Kantoorinrichting Stulens ; CADA wallonne, décision n°5 du 7 octobre 2019.
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Considérant que la sélection et l'examen de chacun des documents susvisés relève d'une
logistique très conséquente notamment en termes de temps, de moyens financiers et de
vérification au regard des différentes législations à respecter (transparence administrative,
respect de la vie privée, RGPD, secret des affaires, marchés publics, droits d'auteurs, ...);que
concrètement cela représente plusieurs centaines de pages ; que l'examen de chacun de ces
documents constitue en soi un travail considérable;
Considérant que le collège communal est fondé à rejeter une demande manifestement abusive
selon le prescrit de l'article L 3231-3 du CDLD;
Considérant qu'une demande abusive est une demande qui nécessite pour y répondre un travail
qui mette en péril le bon fonctionnement de la commune;
Considérant que l'examen auquel il doit ainsi être procédé ne se réduit pas à une simple
opération matérielle consistant à d'abord rassembler des pièces de dossiers mais encore à en
extraire certaines; qu'il II faut aussi dresser la liste précise des pièces retirées des dossiers et
rendre compte de manière concrète et pertinente des motifs pour lesquels elles le sont; que vu
le nombre de pièces en cause et la minutie qui doit présider à l'examen auquel il y a lieu de
procéder, la charge de travail qu'occasionne celui-ci est d'une ampleur considérable;
Considérant que réserver une suite favorable à une demande d'information qui, comme en
l'espèce, porterait, sur plusieurs centaines de pages, impliquerait une charge de travail
disproportionnée au regard des intérêts en cause; qu'il convient en effet d'avoir égard au fait
que les missions dont ce service est chargé présentent un caractère d'intérêt général et qu'il
importe de veiller à ce que leur exercice ne soit pas entravé ou déraisonnablement perturbé;
que si l'information du public doit faire partie des préoccupations de l'autorité administrative,
toutefois, celle-ci ne peut être tenue de consacrer une charge de travail d'une ampleur de celle
décrite ci-dessus, en vue de répondre à la demande de la partie requérante; que si légitimes
que soient les intérêts de cette dernière, ils ne suffisent pas à justifier que soient mises à la
charge de la commune des obligations d'une telle ampleur,
Considérant que, pour ces motifs, il y lieu de rejeter la demande ».
6. Dans sa réponse du 13 juillet 2020, la partie adverse soulève que les documents sollicités
comportent des décisions d’intérêt communal et d’intérêt général, dont un certain nombre
porte sur des données à caractère personnel.
7. La Commission rappelle que, lorsque les documents sollicités relèvent d’informations relatives
à l’environnement visées à l’article D.10 du Code de l’environnement ou d’information
environnementale telle que définie par l’article D.6, 11°, du Code de l’environnement, la
présente Commission n’est pas compétente, seule la Commission régionale d’accès à
l’information environnementale (CRAIE) étant compétente. Il ressort, en effet, des travaux
parlementaires que l’intention des auteurs de l’avant-projet de Code de l’environnement était
établie en ce sens que l’application des textes généraux relatifs à la publicité de
l’administration (notamment pour les pouvoirs locaux) ne s’étend pas aux matières
environnementales4.
Les documents sollicités regroupent plusieurs thématiques dont certaines en lien direct avec
des informations environnementales (permis d’urbanisme entre autres). La Commission n’est
dès lors pas compétente concernant les points relatifs aux informations environnementales
présents dans les différents procès-verbaux sollicités.
4 Voy. notamment les avis nos 74 et 75 du 2 mars 2015, n° 97 du 23 novembre 2015, n° 100 du 11 janvier 2016, n° 127 du 18
avril 2017, n° 138 du 12 juin 2017 et n° 309 du 2 décembre 2019.
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8. Statuer sur une telle demande implique de vérifier l’application des exceptions légales
applicables à chacun des points de chacun des 13 procès-verbaux sollicités.
Ainsi, plusieurs points présents dans les documents sollicités contiennent des informations
relatives à la vie privée de différentes personnes physiques. Conformément à l’article 6, §2, 1°,
du décret du 30 mars 1995, les mentions relatives à la vie privée doivent être occultées.
9. Par ailleurs, l’article L3231-3 du CDLD dispose notamment comme suit :
« Sans préjudice des autres exceptions établies par la loi ou le décret pour des motifs relevant
de l’exercice des compétences de l’autorité fédérale, de la Communauté ou de la Région,
l’autorité administrative provinciale ou communale peut rejeter une demande de consultation,
d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif dans la
mesure où la demande:
3° est manifestement abusive ou répétée (…) »
Eu égard à l’ampleur de la vérification susmentionnée, la Commission rappelle qu’elle s’est
déjà prononcée à plusieurs reprises sur la communication d’un nombre important de procès-
verbaux du collège communal5. Elle y a notamment admis que le travail de vérification des
exceptions légales pouvait constituer une demande manifestement abusive, au sens de
l’article L3231-3 du CDLD, tout en rappelant que : « Une demande abusive est une demande
qui nécessite pour y répondre un travail qui mette en péril le bon fonctionnement de la
commune. Un simple surcroît de travail ne peut suffire à considérer une demande comme
manifestement abusive » 6.
Il a par ailleurs été jugé récemment par le Conseil d’Etat7 que :
« L'examen auquel il doit ainsi être procédé, d'abord pour vérifier si une pièce contient
des informations environnementales, et ensuite, le cas échéant, pour XIII - 7825 - 31/32
déterminer s'il y a lieu d'y appliquer l'une ou l'autre des restrictions au droit d'accès aux
informations environnementales, ne se réduit pas à une simple opération matérielle
consistant à extraire des pièces des dossiers. Il faut aussi dresser la liste précise des
pièces retirées des dossiers et rendre compte de manière concrète et pertinente des
motifs pour lesquels elles le sont. Vu le nombre de pièces en cause et la minutie qui doit
présider à l'examen auquel il y a lieu de procéder, la charge de travail qu'occasionne
celui-ci est d'une ampleur considérable.
Compte tenu de ce qui précède, réserver une suite favorable à une demande
d'information qui, comme en l'espèce, porterait, selon la partie intervenante, sur pas
moins de 10.000 pages, lesquelles ne sont pas toutes rédigées dans une des langues
nationales, impliquerait une charge de travail disproportionnée au regard des intérêts
5 Voy. notamment les avis n° 255 du 4 février 2019 et n° 288 du 6 mai 2019 de la Commission ; décision n° 31 de la CADA
wallonne du 6 janvier 2020.
6 Voy. avis n° 199 du 18 juin 2018 de la Commission. Voy. également l’arrêt n° 243.357 rendu par le Conseil d’Etat le 8
janvier 2019.
7 Voy. arrêt n° 243.357 du 8 janvier 2019.
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en cause. Il convient en effet d'avoir égard au fait que les missions dont ce service est
chargé présentent un caractère d'intérêt général et qu'il importe de veiller à ce que leur
exercice ne soit pas entravé ou déraisonnablement perturbé. Si l'information du public
doit faire partie des préoccupations de l'autorité administrative, toutefois, celle-ci ne
peut être tenue de consacrer une charge de travail d'une ampleur de celle décrite ci-
dessus, en vue de répondre à la demande de la partie requérante, fût-elle une
association de défense de l'environnement. Si légitimes que soient les intérêts de cette
dernière, ils ne suffisent pas à justifier que soient mises à la charge du S.P.F. concerné
des obligations d'une telle ampleur ».
A cet égard, la demande implique une quantité de travail importante pour un ensemble de
documents volumineux (318 pages), sollicités en bloc et en général, sans qu’aucune
thématique particulière ne soit visée. Cette vérification minutieuse apparaît d’une ampleur
telle que la demande peut être considérée comme manifestement abusive.
10. La partie requérante reste libre de réitérer sa demande en la précisant auprès de l’entité dans
des proportions raisonnables8, par exemple en ciblant les points relevant de la compétence du
conseil communal eu égard à l’arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n° 59.
8 V. en ce sens la décision de la CADA n°31 du 6 janvier 2020.
9 Arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n° 5 du 18 mars 2020 relatif à l'exercice des compétences attribuées
au conseil communal par l'article L1122-30 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation par le collège communal
tel que modifié par l’arrêté du Gouvernement wallon de pouvoirs spéciaux n° 17 du 17 avril 2020.
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Par ces motifs, la Commission décide :
La demande est manifestement abusive, de sorte que les documents sollicités ne doivent pas être
communiqués.
Ainsi décidé le 24 août 2020 par la Commission d’accès aux documents administratifs, délibéré par
visioconférence, par Madame MICHIELS, Présidente, et Messieurs de BROUX, vice-président et
membre effectif, LEVAUX, membre effectif et rapporteur, et CHOME, membre suppléant, et en
présence de Mesdames DREZE, membre effective, et GRAVAR, membre effective.
Le Secrétaire, La Présidente,
E. BOSTEM V. MICHIELS
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