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COMMISSION D’ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS Section Publicité de l’administration AVIS n° 224 24 septembre 2018 Province – Fonction publique – Composition des cabinets des membres du collège provincial – Vie privée – Incidence de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée – Incidence du Règlement général sur la protection des données (RGPD) - Communication Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be RÉGION WALLONNE COMMISSION D’ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS Séance du 24 septembre 2018 Avis n° 224 En cause : Monsieur X Partie demanderesse, Contre : La Province de Luxembourg, Place Léopold, 1 à 6700 ARLON Partie adverse, Vu l’article 32 de la Constitution ; Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, l’article 8, § 1er ; Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, l’article L3231-1 et suivants ; Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ; Vu la demande d’avis datée du 20 août 2018 ; Vu la demande initiale du 22 juin 2018 et la demande de reconsidération du 20 août 2018, adressées à la partie adverse via la plateforme internet www.transparencia.be ; Vu l’accusé de réception et la demande d’informations adressée à la partie adverse le 28 août 2018 ; Vu la réponse de la partie adverse en date du 6 septembre 2018 ; Objet de la demande La demande initiale porte sur la communication, sous format électronique, de la composition des cabinets de chacun des membres du Collège, pour les trois dernières législatures (2000-2006, 2006- 2012 et 2012 à ce jour). Pour chaque collaborateur ou expert externe de ces cabinets provinciaux, la demanderesse souhaiterait connaître : - sa date d'entrée en fonction et de sortie éventuelle ; - la modalité de son engagement (détachement interne, détachement externe, contrat de travail, etc.) ; - son volume d'emploi (temps plein, mi-temps, etc.) ; - son titre et ses attributions et ou compétences ; Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be - son barème ; - les mandats dérivés éventuels pour lesquels la Province/le Collège provincial l'a désigné. Recevabilité de la demande d’avis La demande initiale et la demande de reconsidération ont été introduites via la plate-forme www.transparencia.be et la partie demanderesse a transmis à la Commission les captures d’écrans de ces demandes. Par ce procédé, elle les a valablement authentifiées1. La demande d’avis est donc recevable. Examen de la demande Dans sa réponse à la Commission, la partie adverse précise, par la voie du Directeur général provincial, ce qui suit : « La problématique est en tout point identique à celle des autres provinces, auprès desquelles la même demande a été formulée. Je m’en réfère donc aux différents échanges ayant eu lieu en la matière avec les provinces de Liège et Brabant wallon. Dès réception de la réponse de votre organisme, un dossier sera présenté au Collège provincial ». Il ressort donc de la réponse de la province que celle-ci n’est pas opposée à la communication des données, mais qu’elle souhaite le faire dans le respect des législations applicables. La Commission constate que : - le demandeur du présent avis a adressé la même demande aux provinces de Namur et de Liège (voir avis n° 225 et 226 de ce jour) ; - la Commission a déjà rendu des avis suite à des demandes d’accès similaires adressées aux provinces de Hainaut et Brabant wallon (voir avis n° 205 du 10 juillet 2018 et n° 212 du 3 août 2018) ; - suite à ces demandes et aux avis précités, les provinces se sont concertées et ont chargé la Province de Brabant wallon de consulter une nouvelle fois la Commission au sujet de cette problématique. En effet, cette province a sollicité l’avis de l’Autorité de protection des données le 6 août 2018 et, avant de poursuivre l’instruction du dossier, cette dernière souhaite obtenir l’interprétation de la Commission au sujet des textes applicables et afin de déterminer précisément la base de légitimité sur laquelle reposerait la transmission des données demandées (voir l’avis n° 229 de ce jour). En tout état de cause, la Commission réitère ses avis antérieurs2 rendus à l’égard d’une commune ou d’une province. Informations relevant de la vie privée contenues dans les documents demandés Le décret wallon du 30 mars 1995 interdit à l’autorité provinciale de transmettre des informations qui portent atteinte à la vie privée. La Commission rappelle tout d’abord que les données à caractère personnel, notamment au sens du droit européen3, sont les informations relatives à une personne physique identifiée ou identifiable, et 1 Voyez les avis n°135, 136 et 137 du 22 mai 2017. 2 Voyez notamment les avis n° 176 et 178 du 5 mars 2018, n° 185 du 19 mars 2018, n° 188 du 16 avril 2018, n° 205 du 10 juillet 2018 et n° 212 du 3 août 2018, accessibles sur internet via le lien : http://www.cada-wb.be/index.php?id=6333. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be notamment les informations spécifiques propres à l’identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale de la personne concernée. La Commission rappelle néanmoins que les données déjà rendues publiques, ou que les données de personnes exerçant une fonction publique ne bénéficient pas d’une protection équivalente à celles des autres personnes physiques. Elle partage également l’avis de l’ancienne Commission de protec on de la vie privée, selon laquelle le fait même d exercer une fonc on publique ou d u liser des ressources publiques ne peut pas abou r à une néga on totale du droit au respect de la vie privée des personnes concernées »4. En l’espèce, la Commission estime que les informations relatives à la profession et à l’employeur précédent des membres et des experts des cabinets, les informations relatives au volume d’emploi, ainsi que la copie de la fiche de rémunération annuelle brute, relèvent de la vie privée des personnes concernées. Pour ces informations, l’exception doit s’appliquer. En revanche, l’identité des membres et des experts externes des cabinets ne relève pas de leur vie privée, dès lors qu’ils exercent une fonction publique au service du Collège provincial ou de ses membres, ou qu’ils exécutent un contrat de service, et dès lors que ce e fonc on ou ce contrat ne su sent pas pour être considérés comme une manifesta on de l’opinion politique des personnes concernées. Pour les mêmes motifs, leur date d’entrée en fonction et de sortie éventuelle, la modalité de leur engagement, leur titre et leurs attributions et compétences, ou enfin leurs mandats dérivés éventuels, ne relèvent pas non plus de la vie privée des personnes concernées. Traitement de données à caractère personnel au sens du Règlement général sur la protection des données ( RGPD) La Commission est par ailleurs consciente que la plus grande partie des informations dont la communication est demandée constituent des données à caractère personnel au sens du RGPD. Selon l’article 4, 1) de ce Règlement, en effet, ces données visent « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable »5. La communication de ces données à un tiers sur la base de la législation relative à la publicité de l’administration est néanmoins possible lorsque la personne concernée a donné son consentement (article 6, § 1er, a) du RGPD), ou bien lorsqu’elle est rendue nécessaire par l e respect d’une obligation légale ou l’exécution d’une mission d’intérêt public (article 6, § 1er, c) et e) du RGPD. Il appartient à la province et, dans le doute, à l’Autorité de protection des données, d’apprécier la légitimité et la proportionnalité du traitement qui consiste à communiquer à un tiers, en application de la législation relative à la publicité de l’administration, les informations visées par la présente demande, et ce en tenant le plus grand compte des objectifs poursuivis par le droit fondamental à la publicité des documents administratifs, du caractère public des fonctions exercées ainsi que de la contribution de la transparence de ces informations pour la confiance que le public peut avoir dans les institutions publiques concernées. Il n’appartient en revanche pas à la Commission de procéder à cet examen, qui 3 Voyez notamment l’article 4, 1° du Règlement 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, J.O., L119 du 4 mai 2016. 4 Voyez les avis 9/2018, 8/2018 et 3/2018 du 17 janvier 2018, lesquels renvoient à l’avis 35/2007, considérant 9. 5 Voy. dans ce sens l’avis de la Commission de la protection de la vie privée n° 17/2002 du 13 mai 2002, à propos de primes de performance accordées à certains agents de la Région flamande. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be ne relève pas de sa compétence, étant entendu que la législation relative à la publicité de l’administration se superpose à la législation relative à la protection des données6. La Commission souligne néanmoins que l’ancienne Commission de protection de la vie privée a rendu plusieurs avis le 17 janvier 2018, à propos d’avant-projets de décrets wallons imposant davantage de transparence administrative à une série d’autorités locales, et selon lesquels Les personnes visées par les mesures mises en place sont celles qui exercent des fonc ons publiques et ou u lisent des ressources publiques, en tout ou en par e, de la égion allonne. Il est donc légi me qu’en ressorte par ailleurs une transparence accrue a n de perme re un contr le approprié de l’utilisation des deniers publics »7. Communication partielle des documents demandés La Commission rappelle que, selon l’article L3231-3, al. 2 du CDLD, « lorsque, en application de l'alinéa précédent, un document administratif ne doit ou ne peut être soustrait que partiellement à la publicité, la consultation, l'explication ou la communication sous forme de copie est limitée à la partie restante ». L’existence d’informations relatives à la vie privée parmi les documents demandés ne permet donc pas à la partie adverse de refuser en bloc la communication de l’ensemble de ces documents. Elle doit communiquer toutes les informations qui ne relèvent pas de la vie privée des membres de cabinets. En ce sens, en ce qui concerne la rémunération des membres de ces cabinets, un montant global brut annuel doit être fourni à la place des fiches de rémunération annuelle brute ; de même, en ce qui concerne le volume d’emploi, un nombre global d’équivalent temps plein doit être communiqué. Enfin, l’existence d’informations couvertes par le RGPD parmi les documents demandés, pour autant qu’il soit établi qu’elles ne peuvent être communiquées conformément aux articles 6 § 1er, a), c) ou e) de ce Règlement, ne permettrait donc pas à la partie adverse de refuser en bloc la communication de l’ensemble des informations demandées. En ce sens, la province serait à tout le moins tenue de communiquer les informations demandées en supprimant les données qui permettraient de lier ces informations à une personne identifiée ou identifiable. Il appartient donc à la partie adverse d’établir et de justifier l’impossibilité de communiquer les informations demandées conformément aux articles 6 § 1er, a), c) ou e) du RGPD avant de recourir à la communication partielle des informations demandées. Il conviendrait notamment d’établir que l’accord des personnes concernées a été sollicité et refusé par celles-ci ; ou que la transparence individuelle de ces rémunérations ne serait pas compatible avec les exigences du RGPD, le cas échéant en saisissant l’Autorité de protection des données. La Commission renvoie, pour le surplus, aux motifs de l’avis n° 229 de ce jour. 6 Voy. en ce sens C. de Terwangne, « Le droit à la transparence administrative », in M. Verdussen, N. Bonbled (dir.), Les droits constitutionnels en Belgique, vol. 2, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 716 ; D. Déom, Th. Bombois et L. Gallez, « Les exceptions au droit d’accès aux documents administratifs », in D. Renders (dir.), L’accès aux documents administratifs, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 212. 7 Voyez les avis 9/2018, 8/2018 et 3/2018 du 17 janvier 2018. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be Compétence de l’auteur de la décision de refus de communication Il appar ent en n à la par e adverse de veiller à ce que la décision prise à la suite de la demande de reconsidéra on soit adoptée par l’autorité administra ve compétente, conformément à l’arrêt du Conseil d’Etat n° 238.457 du 8 juin 2017, à savoir en l’espèce le collège provincial. » La Commission rend l’avis suivant : Les documents demandés relatifs à l’identité, la date d’entrée en fonction et de sortie éventuelle, la modalité d’engagement, le titre, les attributions et/ou compétences et enfin, les mandats dérivés éventuels pour lesquels la Province/le Collège provincial a désigné les membres des cabinets concernés doivent être communiqués, ainsi que le montant global brut de la rémunération concernée et le volume global d’équivalent temps plein concerné. Ainsi délibéré le 24 septembre 2018 par la Commission d’accès aux documents administratifs composée de Madame MICHIELS, Présidente, et de Messieurs DE BROUX, membre effectif et Vice- Président, et PILCER, membre suppléant. La Secrétaire, La Présidente, F. JOURETZ V. MICHIELS Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be