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COMMISSION D’ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS Section publicité de l’administration AVIS n°188 16 avril 2018 Commune – Mandataire élu – Rémunération – Document à caractère personnel (non) – Vie privée – Incidence de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée – Communication Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be -2- RÉGION WALLONNE COMMISSION D’ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS Séance du 16 avril 2018 Avis n°188 En cause : Monsieur X, domicilié …, Partie demanderesse, Contre : La ville de Mons, Hôtel de Ville, Grand Place, à 7000 Mons, Partie adverse, Vu l’article 32 de la Constitution, Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, l’article 8, § 1 ; Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, l’article L3231-5 ; Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ; Vu la demande d’avis du 24 mars 2018 ; Vu la demande initiale du 12 février 2018 et la demande de reconsidération du 24 mars 2018 ; Vu l’accusé de réception envoyé à la partie demanderesse le 27 mars 2018 et la demande d’information adressée à la partie adverse le même jour ; Vu la réponse de la partie adverse par courrier du 12 avril 2018 ; Objet de la demande La partie demanderesse souhaite obtenir la communication du montant individuel brut versé à chaque membre du conseil communal et du collège communal pour les années 2013 à 2017. La partie adverse semble disposée à communiquer les informations demandées, pour autant que les données permettant de lier les montants à une personne identifiée ou identifiable aient été supprimées. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be -3- Informations relevant de la vie privée contenues dans les documents demandés A l’instar d’une série d’avis rendus antérieurement1, la Commission estime utile de rappeler la portée de l’article 6, §2 de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration, lequel interdit à une autorité non fédérale, telle une commune, de transmettre des informations qui portent atteinte à la vie privée. La Commission rappelle tout d’abord que les données à caractère personnel, notamment au sens du droit européen2, sont les informations relatives à une personne physique identifiée ou identifiable, et notamment les informations spécifiques propres à l’identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale de la personne concernée. La Commission rappelle néanmoins que les données déjà rendues publiques, ou que les données de personnes exerçant une fonction publique ne bénéficient pas d’une protection équivalente à celles des autres personnes physiques. En ce sens, et conformément à son avis 2018-174 du 5 mars 2018, la Commission estime que « les informations relatives aux montants annuels versés aux membres du conseil communal et du collègue communal sont attachées à l’exercice d’un mandat électif et aux responsabilités qui y sont liées, et ne relèvent pas de l’identité spécifique des personnes concernées, ni sur le plan politique, ni sur le plan économique ou social. L’exercice de ce mandat est par nature public, puisqu’il a été confié directement ou indirectement à la suite d’une élection. Les montants alloués à ces mandataires élus sont en outre encadrés par le CDLD et fixés par le Gouvernement wallon pour le collège communal, ou votés en séance publique par le conseil communal en ce qui concerne les jetons de présence accordés aux membres de ce conseil. Les montants alloués sont donc tous liés à la fonction exercée, et non aux caractéristiques personnelles de ceux qui l’exercent. Un mandat public est en effet par définition hors commerce, en dehors des tractations contractuelles. La rémunération qui y est attachée est réglementée et ne peut être négociée sur la base des caractéristiques personnelles de celui qui l’exerce ». La Commission estime donc que la communication de ces informations ne porte pas atteinte à la vie privée des personnes concernées, au sens de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration. Traitement de données à caractère personnel au sens de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée Comme l’a rappelé la partie adverse dans sa réponse, la Commission s’est également prononcée, dans son avis 2018-174 du 5 mars 2018, sur l’incidence sur la demande de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée, et ce dans les termes suivants : 1 Voyez spécialement l’avis 2018-174 du 5 mars 2018, ainsi que les avis 2018-185 du 19 mars 2018 et 2018-176 et 2018-178 du 5 mars 2018, disponibles sur le site internet de la Commission (www.cada-wb.be). 2 Voyez notamment l’article 4, 1° du Règlement 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, J.O., L119 du 4 mai 2016. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be -4- « La Commission est en revanche consciente que les montants individualisées dont la communication est demandée constituent des données à caractère personnel au sens de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée. Selon l’article 1er, §1er de cette loi, en effet, ces données visent « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable »3. La communication de ces données à un tiers sur la base de la législation relative à la publicité de l’administration est néanmoins possible lorsque la personne concernée a donné son consentement (article 5, a) de la loi), ou bien lorsqu’elle est rendue nécessaire par l’intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement (article 5, f) de la même loi). Il appartient à la commune et, dans le doute, à la Commission de la protection de la vie privée, d’apprécier la légitimité et la proportionnalité du traitement qui consiste à communiquer à un tiers, en application de la législation relative à la publicité de l’administration, les montants visés par la présente demande, et ce en tenant le plus grand compte des objectifs poursuivis par le droit fondamental à la publicité des documents administratifs, des spécificités des montants bruts alloués aux mandataires élus rappelées dans le présent avis, ainsi que de la contribution de la transparence de ces montants pour la confiance que le public peut avoir dans les institutions publiques concernées et dans leurs mandataires élus. Il n’appartient en revanche pas à la Commission de procéder à cet examen, qui ne relève pas de sa compétence, étant entendu que la législation relative à la publicité de l’administration se superpose à la législation relative à la protection de la vie privée4 ». La Commission rappelle à titre subsidiaire que, selon l’article L3231-3, al. 2 du CDLD, « lorsque, en application des alinéas précédents, un document administratif ne doit ou ne peut être soustrait que partiellement à la publicité, la consultation, l'explication ou la communication sous forme de copie est limitée à la partie restante ». L’existence d’informations couvertes par la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée parmi les documents demandés, pour autant qu’il soit établi qu’elles ne peuvent être communiquées conformément aux articles 5 a) ou 5 f) de cette loi, ne permettrait donc pas à la partie adverse de refuser en bloc la communication de l’ensemble des informations demandées. En ce sens, la partie adverse serait tenue de communiquer les montants demandés en supprimant les données qui permettrait de lier ces montants à une personne identifiée ou identifiable. Il appartient donc à la partie adverse d’établir et de justifier l’impossibilité de communiquer les informations demandées conformément aux articles 5 a) ou 5 f) de la loi du 8 décembre 1992 avant de recourir à la communication partielle des informations demandées. Il conviendrait notamment d’établir que l’accord des personnes concernées a été sollicité et refusé par celles-ci ; ou que la transparence individuelle de ces rémunérations ne constitue pas en l’espèce un intérêt légitime au sens de l’article 5 f) de la même loi, le cas échéant en saisissant la Commission de la protection de la vie privée. 3 Voy. dans ce sens l’avis de la Commission de la protection de la vie privée n° 17/2002 du 13 mai 2002, à propos de primes de performance accordées à certains agents de la Région flamande. 4 Voy. en ce sens C. de Terwangne, « Le droit à la transparence administrative », in M. Verdussen, N. Bonbled (dir.), Les droits constitutionnels en Belgique, vol. 2, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 716 ; D. Déom, Th. Bombois et L. Gallez, « Les exceptions au droit d’accès aux documents administratifs », in D. Renders (dir.), L’accès aux documents administratifs, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 212. Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be -5- La Commission rend l’avis suivant : Les montants bruts alloués à chaque membre du conseil communal et du collège communal doivent être communiqués, dans le respect de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée. Ainsi délibéré le 16 avril 2018 par la Commission d’accès aux documents administratifs composée de Mesdames MICHIELS, présidente, ROSOUX, présidente suppléante, DREZE et GRAVAR, membres effectives, et de Monsieur DE BROUX, vice-président et rapporteur. La Secrétaire, La Présidente, F. JOURETZ V. MICHIELS Commission d’accès aux documents administratifs Place de la Wallonie, 1 – 5100 Jambes Secrétariat – Tél. : 081/33 38 19 support.cada@spw.wallonie.be