(article lùbis de l'ordonnance du 30 mars 1995 relative à la publicité de l'administration)
Monsieur et Madame LEFEVRE-STRYBOL, domiciliés rue du Repos, 123 à 1180 Bruxelles, agissant à l'intervention de l'avocat Jacques Sambon introduisent un recours en application de l'article 20bis de l'ordonnance du 30 mars 1995 relative à la publicité de l'administration, inséré par l'article 25, § 2, de l'ordonnance du 18 mars 2004, et demandent «qu'il soit enjoint à l'I.B.G.E. de transmettre une copie de la demande de permis d'environnement et des pièces actuellement présentes dans le dossier de demande» de permis d'environnement introduite par l'a.s.b.l. Fond'Roy pour l'exploitation d'une maison de soins psychiatriques, d'un lycée et d'un internat thérapeutique dans un bien sis Dieweg, 69, et chaussée de Saint-Job, 294.
L'article 20ta, alinéa 2, de l'ordonnance du 30 mars 1995 relative à la publicité de l'administration prévoit que «lorsqu'elle statue sur les recours visés à l'alinéa 1er, la composition de la Commission comprend au moins un membre de l'Institut Bruxellois pour la Gestion de l'Environnement». Comme il ressort de la liste des présences ci-dessous, Mme Valérie Goret, membre de la Commission et agent de FI.B.GE. est présente ce 25 août 2010. La Commission est constituée valablement pour statuer sur le recours introduit.
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Par lettre du 30 juillet 2010 réceptionnée le 2 août, l'avocat Jacques Sambon, agissant en sa qualité de conseil de Monsieur et Madame LEFEVRE-STRYBOL, domiciliés rue du Repos, 123, à 1180 Bruxelles, expose qu'il a adressé le 7 juillet 2010, à l'Institut bruxellois pour la gestion de l'environnement (LB.G.E.) une demande d'accès à l'information visant à obtenir une copie de la demande de permis d'environnement introduite par l'a.s.b.l. Fond'Roy pour l'exploitation d'une maison de soins psychiatriques, d'un lycée et d'un internat thérapeutique dans un bien sis Dieweg, 69, et chaussée de Saint-Job, 294.
Il indique qu'un permis d'environnement de classe IB a été octroyé, sur base d'une première demande, par l'I.B.GE. le 7 janvier 2010, mais que, sur recours, le Collège d'environnement a réformé cette décision et a refusé le permis sollicité. A la suite de quoi, le demandeur a introduit une nouvelle demande de permis d'environnement, parallèlement à une nouvelle demande de permis d'urbanisme.
Le 7 juillet, il a demandé à l'I.B.GE., au nom de ses clients, de lui transmettre une copie du dossier de la demande de permis d'environnement et notamment des documents suivants:
Le 19 juillet, l'I.B.GE. a refusé d'accéder à cette demande, pour les raisons exposées comme suit: «Nous nous permettons de souligner que les documents dont vous demandez copie ne peuvent encore pour l'heure vous être communiqués. La demande de permis mieux identifiée sous rubrique est encore en instruction, le dossier de demande n'étant pas encore déclaré complet par nos soins, et ce sans préjuger de l'état d'avancement du dossier pour le volet urbanistique.
Nous nous appuyons sur l'article 11, § 1er, 4° de l'ordonnance précitée qui vise les procédures en cours d'élaboration. Par ailleurs nous invitons à ce qu'une personne que vous mandaterez passe en nos bureaux pour exercer ce droit d'accès, et ce dans les semaines qui viennent, le temps que le dossier soit déclaré complet par nos services.» Le 20 juillet, l'avocat des requérants s'est adressé en ces termes à
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l'I.B.G.E.:
«Je fais suite à votre courrier daté de ce 19 juillet 2010. Par celui-ci vous estimez pouvoir refuser la demande de communication de la nouvelle demande de permis d'environnement de classe IB pour une maison de soins psychiatriques, un lycée et un internat thérapeutique, sis Dieweg, 69 et Chée de Saint-Job, 294, au motif de l'existence d'une “procédure en cours d'élaboration'1 (art. 11, § 1er, 4° de l'ordonnance du 18 mars 2004).
Le motif ainsi énoncé est manifestement erroné dans la mesure où la communication de la demande de permis d'environnement déposée est requise même si l'autorité compétente n'a pas encore statué sur le dossier sous rubrique. En effet, l'article 4.1, d) et e) de la directive 2003/4/CE ne prévoit d'exception au droit d'accès, pour des raisons formelles, que pour les “documents inachevés11. Cette limite est reprise en droit interne, l'article 11, § 1er, 4° de l'ordonnance du 18 mars 2004 n'édictant une exception que lorsque “la demande concerne des documents en cours d'élaboration ou des documents et données inachevés”.
Les “documents préparatoires” à une telle décision, tels que la demande de permis, ne peuvent être assimilés aux “documents inachevés”.
Ces “documents préparatoires”, quoique ne revêtant qu'un caractère préparatoire d'une décision ultérieure et s'intégrant dans le cadre d'une procédure encore en cours, ont vu leur processus d'élaboration complètement finalisé. Ces documents qui précèdent les décisions demeurent accessibles au public, même si le processus de décision dans lequel ils s'inscrivent n'est pas achevé.
Une des finalités essentielles du droit d'accès à l'information est, d'ailleurs, le renforcement de la participation du public à l'action des pouvoirs publics dans le domaine de l'environnement, participation qui serait bien souvent ineffective si elle devait avoir lieu après l'adoption de décisions définitives. A cet égard, la communication des documents préparatoires est un des éléments clé de la reconnaissance du droit à l'information. Cette analyse est corroborée par la doctrine:
“Quant aux documents inachevés, ils ne se confondent pas avec les documents préparatoires de la décision… Ainsi l'accès aux études préparatoires à l'attribution d'un marché public, arrivées au tenue de leur processus d'élaboration, ne peut être refusé sur le pied de cette exception, quand bien même la demande intervient avant l'attribution du marché en cause…” (D. DEOM, Th. BONBOIS et L. GALLEZ, “les exceptions au droit d'accès” in L'accès aux documents administratifs, Bruylant, 2008, p. 406-407 et références citées).
La Commission wallonne de recours pour le droit d'accès à l'information l'a explicitement confirmé: “Il faut se garder de confondre 'documents inachevés' et 'dossiers en cours d'instruction'; que ce serait en effet réduire sensiblement la portée du
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décret que de considérer que les actes préparatoires à la décision finale par laquelle se clôture une procédure administrative ne doivent être communiqués qu'après que la décision finale a été prise et que le dossier est clôturé; que ces actes préparatoires doivent être communiqués dès qu'ils peuvent être considérés comme achevés, c'est-à-dire qu'ils ne sont plus à l'état d'ébauche ou de simple projet, sans attendre l'issue de la procédure en cours” (Commission wallonne de recours pour le droit d'accès à l'information en matière d'environnement, recours n° 152, décision du 9 juin 1998).
Je vous remercie dès lors de me transmettre une copie de la nouvelle demande de permis d'environnement par retour de courrier.»
N'ayant pas obtenu de réponse, les requérants ont introduit le présent recours à la Commission d'accès aux documents administratifs.
Les requérants soutiennent que l'absence de communication viole l'article 4 de la Convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, faite à Aarhus le 25 juin 1998, l'article 4 de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement ainsi que l'article 11 de l'ordonnance du 18 mars 2004 sur l'accès à l'information relative à l'environnement dans la Région de Bruxelles-Capitale.
En effet, aucun motif ne s'oppose à la communication de la demande de permis d'environnement. Ils contestent la pertinence du motif pris de l'existence d'une «procédure en cours d'élaboration» dans la mesure où est sollicitée la communication d'un document achevé qu'est la demande de permis d'environnement et qu'est tout avis ou rapport transmis à l'autorité compétente.
La requête a été communiquée le 17 août à l'I.B.G.E., qui, par lettre du 19 août 2010, a formulé les observations suivantes:
«Nous nous référons à la note de Monsieur Sambon pour rappeler la chronologie de l'affaire. Le dossier sur lequel porte la demande d'accès à l'information a été introduit à l'I.B.G.E. le 29 juin 2010. La demande d'accès à l'information de
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Maître Sambon a été adressée à PI.B.GE. le 7 juillet 2010. A cette date, nous nous trouvions dans la période de 20 jours pour examiner la complétude du dossier de demande de permis d'environnement et ce, en vertu de l'article 39 de l'ordonnance du 5 juin 1997 relative aux permis d'environnement.
Il est clair qu'à cette étape de l'instruction du dossier, celui-ci ne pouvait déjà être considéré comme complet car son examen était toujours en cours.
En date du 19 juillet 2010, le demandeur de permis d'environnement était d'ailleurs avisé du caractère incomplet de son dossier. Celui-ci n'a toujours pas été complété à ce jour.
Le dossier dont la communication a été demandée par Maître Sambon est donc bien un document inachevé au sens de la directive 2003/4/CE puisque des compléments d'information doivent être apportés au dossier pour le déclarer complet et pouvoir procéder à la suite de la procédure qui est d'application dans le cas d'espèce. . Ce dossier ne peut donc pas être communiqué actuellement.»
Le recours soutient que le refus d'accès contrevient à trois dispositions:
L'article 4 de la Convention d'Aarhus est rédigé en des termes qui imposent des obligations aux États signataires, et qui laissent à ceux-ci un pouvoir d'appréciation quant à la mise en uvre de ces obligations. Le passage de cet article qui est le plus pertinent en l'espèce est le point 3, c, rédigé comme suit:
«3. Une demande d'informations sur l'environnement peut être refusée si: … c) La demande porte sur des documents qui sont en cours d'élaboration ou concerne des communications internes des autorités publiques à condition que cette exception soit prévue par le droit interne ou la coutume, compte tenu de l'intérêt que la divulgation des informations demandées présenterait pour le public.»
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Ce passage de la Convention renvoie expressément au droit interne «ou» à la coutume. Il s'en déduit que la Convention d'Aarhus ne contient pas de disposition directement applicable en l'occurrence. La demande n'est pas fondée en tant qu'elle se fonde sur cette Convention.
En ce qui concerne la directive 2003/4/CE, l'article 288 du Traité sur l'Union européenne (version consolidée), porte: «La directive lie tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens». Dès lors qu'il n'est pas allégué que la demande d'accès à l'information soulèverait un problème en rapport avec une éventuelle applicabilité directe de cette directive, la demande n'est pas fondée en tant qu'elle se fonde sur elle.
Dans l'article 11 de l'ordonnance du 18 mars 2004 sur l'accès à l'information relative à l'environnement dans la Région de Bruxelles-Capitale, le passage pertinent pour l'examen de la demande est rédigé comme suit: «Art. 11. § 1er. Un refus à la demande d'information peut être opposé dans les cas suivants: … 4° la demande concerne des documents en cours d'élaboration ou des documents et données inachevés. Dans ce cas, l'autorité publique désigne l'autorité qui élabore les documents en question et indique le délai jugé nécessaire pour les finaliser».
Cette disposition concourt à l'application de l'article 32 de la Constitution, qui porte: «Chacun a le droit de consulter chaque document administratif et de s'en faire remettre copie, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134».
Tant le texte constitutionnel que celui de l'ordonnance qui pourvoit à sa mise en uvre traitent de «documents» et non de «dossiers». L'ordonnance se réfère plus souvent qu'à la notion de «document», à celle d'«information environnementale», définie à son article 3, 2°, comme «toute information disponible sous forme écrite, visuelle, sonore, électronique ou toute autre forme matérielle…». Il est de la nature même d'un «dossier» de contenir plusieurs informations et plusieurs documents, dont certains ne sont plus appelés à subir de modifications. La législation n'autorise pas l'autorité qui les détient à refuser la communication de ceux-ci. Ces principes appliqués au cas d'espèce, les documents suivants doivent être considérés comme achevés:
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Ces documents doivent donc être mis à la disposition des requérants pour être consultés. En ce qui concerne la remise d'une copie - sollicitée par les requérants il convient d'observer que selon l'article 11, § 2, 5°, de l'ordonnance, «la demande peut également être refusée lorsque la divulgation des informations risque de porter atteinte à des droits de propriété intellectuelle».
L'ordonnance du 30 mars 1995 relative à la publicité de l'administration contient à cet égard un article 13 rédigé comme suit:
«Lorsque la demande de publicité porte sur un document administratif d'une autorité administrative régionale incluant une oeuvre protégée par le droit d'auteur, l'autorisation de l'auteur ou de la personne à laquelle les droits de celui-ci ont été transmis n'est pas requise pour autoriser sur place la consultation du document ou pour fournir des explications à son propos.
Une communication sous forme de copie d'une oeuvre protégée par le droit d'auteur n'est permise que moyennant l'autorisation préalable de l'auteur ou de la personne à laquelle les droits de celui-ci ont été transmis. Dans tous les cas, l'autorité spécifie que l'oeuvre est protégée par le droit d'auteur.»
Bien qu'aucune disposition similaire ne figure dans l'ordonnance du 18 mars 2004, sauf sous la forme plus radicale de l'article 11, § 2, 5°, cité ci-avant, la Commission estime que cette disposition doit être appliquée par analogie. En particulier, il convient de s'assurer que la demande de permis d'environnement ne contient pas de plans qui seraient couverts par le droit d'auteur d'un architecte ou d'un bureau d'architecture; si c'est le cas, l'accord du titulaire des droits d'auteur sur le plan doit être obtenu préalablement à la délivrance d'une copie.
En tant qu'elle porte sur «toutes les autres pièces relatives à cette demande», la demande est formulée de manière trop imprécise pour que la Commission puisse y répondre. La ligne de conduite à tenir par l'I.B.G.E. est de communiquer les documents dont il est acquis qu'ils ne subiront plus de modification. En revanche, des documents tels que des notes internes sur la suite à réserver au dossier, des projets ou avant-projets de décision, ne doivent pas être communiqués, par application, respectivement, de l'article 11, § 1er, 5° et 11, § 1er, 4° de l'ordonnance du 18 mars 2004.
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Article 1er. LT.B.G.E est tenu de laisser consulter, dans le dossier de demande de permis d'environnement introduite par l'a.s.b.l. Fond'Roy pour l'exploitation d'une maison de soins psychiatriques, d'un lycée et d'un internat thérapeutique dans un bien sis Dieweg, 69, et chaussée de Saint-Job, 294:
Article 2. Il est également tenu de délivrer copie de ces documents, mais sous réserve de l'accord des titulaires de droits d'auteurs sur ceux des documents qui seraient couverts par de tels droits.
La Commission a formulé cette décision en sa séance du 25 août 2010, sur rapport de M. Leroy; étaient présents M. M. Leroy, président, Mmes V. Goret, K. Leus, M. de Jonge et Mme L. Therry, secrétaire. L. Therry Le président, M. Leroy