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Date: 11/07/2019
Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs Section publicité de l’administration 11 juillet 2019 AVIS n° 2019-69 CONCERNANT UNE COPIE DES RAPPORTS DE MISE EN ŒUVRE DU PLAN DE RESTRUCTURATION FOURNIS PAR LES AUTORITES BELGES A LA COMMISSION (CADA/2019/63) 2 1. Un aperçu 1.1. Par un courrier du 27 décembre 2018, Maître Renaud Simar demande au SPF Mobilité et Transports de lui communiquer par courrier électronique ou support informatique, « les rapports de mise en œuvre du plan de restructuration fournis par les autorités belges à la Commission européenne dans le cadre du suivi de la décision du 26 mai 2010, et en particulier : - le premier rapport transmis à la Commission au plus tard le 26 novembre 2010 ; - les autres rapports transmis par la suite à la Commission jusqu’à ce que les objectifs du plan de restructuration aient été considérés comme ayant été atteints ; - les analyses effectuées à la lumière des prévisions du plan de restructuration, et fournies en soutien des rapports annuels, s’agissant notamment des personnes directement employées par Newco dans le cadre de contrats de travail et d’agents statutaires ayant accepté leur transfert dans cette dernière ». Le demandeur précise que ces documents sont le résultat de la décision de la Commission européenne du 26 mai 2010 relative à l’affaire n) 726/2009 – Belgique – Projet d’aide à la restructuration des activités fret de la SNCB par laquelle la Commission a autorisé des mesures d’aide à la restructuration en faveur des activités Fret de la SNCB, en les subordonnant à la mise en œuvre d’un plan de restructuration. Afin que la Commission soit en mesure de contrôler la bonne exécution du plan, la décision de 2010 précise que : « 252. (…) les autorités belges soumettront des rapports exhaustifs permettant de contrôler la mise en œuvre du plan de restructuration. Les autorités belges se sont à cet égard engagées à notamment fournir dans leurs rapports le nombre total (en ETP), de personnes directement employés par Newco dans le cadre de contrats de travail et d’agents statutaires ayant accepté leur transfert dans cette dernière. Les autorités belges ont précisé à cet égard que le rapport annuel sur ce point sera accompagné d’une analyse à la lumière des prévisions effectuées dans la notification. 254. Le premier de ces rapports sera transmis à la Commission au plus tard dans les six mois suivant la date de la présente décision puis au moins une fois par an, au plus tard à la date anniversaire de la 3 transmission du premier rapport et ce jusqu’à ce que les objectifs dudit plan puissent être considérés comme ayant été atteints. » 1.2. Par lettre du 5 février 2019 le SPF Mobilité et Transports répond qu’il ne dispose que d’une copie des rapports annuels de suivi en exécution des dispositions de la décision de la Commission européenne N 726/2009 du 26 mai 2010 concernant le projet d’aide à la restructuration des activités fret de la SNCB, dont le dernier date de fin 2015. Cependant, le SPF Mobilité et Transports refuse de fournir une copie de ces rapports annuels de suivi pour les raisons suivantes : « Ces rapports contiennent de nombreux détails d’entreprises. Il s’agit notamment d’information concernant la composition du personnel, et surtout les frais de personnel, la composition du matériel roulant, la stratégie commerciale à implémenter, les résultats financiers, ainsi que le financement. Tenant compte du fait que l’Etat belge a un intérêt dans l’entreprise 1.3. Lineas, le successeur de SNCB Logistics, les informations comprises dans les rapports annuels de suivi ont un intérêt économique ou financier fédéral, ce qui implique que nous ne pouvons pas vous fournir une copie si l’intérêt de la publicité ne l’emporte pas sur la protection de l’intérêt économique ou financier fédéral (voir l’article 6, § 1er, 6°, de la loi du 11 avril 1994 ‘relative à la publicité de l’administration’). Suite à la restructuration de SNCB Logistics, entre autres par l’acquisition d’actions de Lineas par Argos Wityu, ces rapports de suivi contiennent également des informations sensibles par des acteurs privés. Dès lors, la publicité de ces rapports ne l’emporte pas sur la protection du caractère par nature confidentiel des informations d’entreprise ou de fabrication communiquées à l’autorité. Ce caractère est également indiqué explicitement dans les rapports de suivi, qui mentionnent « Confidentiel – contient des secrets d’affaires » et qui expliquent qu’ils sont « basés sur les informations que les autorités belges ont pu recueillir auprès de HR Rail, la SNCB, et SNCB Logistics » (voir l’article 6, § 1er, 7, de la loi du 11 avril 1994 ‘relative à la publicité de l’administration’). La publicité de ces informations peut porter préjudice à cette entreprise. Malgré le fait que les rapports concernent la période 2011-2015, la plupart des dispositions restent d’actualité. La publicité de ces rapports peut donner une image sur les relations et les mesures financières que le Gouvernement prend en compte et qui peuvent être utilisées aujourd’hui. Le but est d’éviter que des concurrents potentiels puissent tenir compte de celles-ci, ce qui pourrait avoir un impact sur l’intérêt économique ou financier fédéral. » 4 1.3. Par lettre du 20 juin 2019 le demandeur introduit auprès du SPF Mobilité et Transports une demande de reconsidération. Par lettre du même jour, il demande à la Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs, section publicité de l’administration, ci-après la Commission, un avis. 2. La recevabilité de la demande d’avis La Commission estime que la demande d’avis est recevable. L’article 8, § 2, de la loi du 11 avril 1994 ‘relative à la publicité de l’administration’ (ci- après : la loi du 11 avril 1994) requiert que la demande de reconsidération auprès du SPF Mobilité et Transports et la demande d’avis auprès de la Commission soient introduites simultanément. Les deux demandes sont introduites le même jour. 3. Le bien-fondé de la demande d’avis L’article 32 de la Constitution et la loi du 11 avril 1994 consacrent le principe du droit d’accès à tous les documents administratifs. L’accès aux documents administratifs ne peut être refusé que lorsque l’intérêt requis pour l’accès à des documents à caractère personnel fait défaut et lorsqu’un ou plusieurs motifs d’exception figurant à l’article 6 de la loi du 11 avril 1994 peuvent ou doivent être invoqués et qu’ils peuvent être motivés de manière concrète et pertinente. Seuls les motifs d’exception imposés par la loi peuvent être invoqués et doivent par ailleurs être interprétés de manière restrictive (Cour d’Arbitrage, arrêt n° 17/97 du 25 mars 1997, considérants B.2.1 et 2.2 et Cour d’Arbitrage, arrêt n° 150/2004 du 15 septembre 2004, considérant B.3.2). La Commission constate que le SPF Mobilité et Transports invoque deux motifs d’exception pour refuser la publicité des rapports demandés. En premier lieu, le SPF Mobilité et Transports invoque le motif d’exception mentionné à l’article 6, § 1er, 6 de la loi du 11 avril 1994. Ce motif d’exception dispose que « une autorité administrative rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur la protection de l'un des intérêts suivants : (…) 6° un intérêt économique ou financier fédéral, la monnaie ou le crédit public ». La Commission tient à rappeler que ce motif d’exception ne peut 5 pas être invoqué sans justification. Le SPF Mobilité et Transports doit tout d’abord démontrer concrètement que la divulgation pourrait porter atteinte à un intérêt économique ou financier fédéral. Le SPF Mobilité et Transports ne peut pas se limiter aux formules générales. Il ne suffit pas que le SPF Mobilité et Transports indique que l’Etat belge a un intérêt dans l’entreprise Lineas. Il doit ensuite procéder à une mise en balance des intérêts dont il ressort que l’intérêt servi par la publicité ne l’emporte pas sur l’intérêt protégé. L’existence d’un intérêt dans l’entreprise Lineas ne suffit donc pas en soi. Lors de la mise en balance des intérêts, le SPF Mobilité et Transports dispose d’une marge d’appréciation discrétionnaire de sorte qu’il doit ressortir de la motivation concrète qu’il en a fait correctement usage. Deuxièmement, le SPF Mobilité et Transports invoque le motif d’exception mentionné à l’article 6, § 1er, 7° de la loi du 11 avril 1994. Ce motif d’exception dispose que « une autorité administrative rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur la protection de l'un des intérêts suivants : (…) 7° le caractère par nature confidentiel des informations d'entreprise ou de fabrication communiquées à l'autorité ». Ce motif d’exception protège seulement les informations qui sont communiquées à l’autorité et non des informations économiques relatives à des entreprises ou personnes rédigées par l’autorité. De plus, ce motif d’exception protège uniquement certaines informations économiques, à savoir des informations contenant des informations d’entreprise et de fabrication. Le but ainsi visé par le législateur était de protéger principalement des secrets d’affaires. En vertu de l’article I.17/1 du Livre I du Code de Droit économique, le secret d’affaires est une « information qui répond à toutes les conditions suivantes: a) elle est secrète en ce sens que, dans sa globalité ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, elle n'est pas généralement connue des personnes appartenant aux milieux qui s'occupent normalement du genre d'information en question, ou ne leur est pas aisément accessible; b) elle a une valeur commerciale parce qu'elle est secrète; c) elle a fait l'objet, de la part de la personne qui en a le contrôle de façon licite, de dispositions raisonnables, compte tenu des circonstances, destinées à la garder secrète. 6 (inséré par l’article 2 de la loi du 30 juillet 2018 relative à la protection des secrets d'affaires, MB 14 août 2018, qui a pour objet la transposition de la directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 ur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites). Le SPF Mobilité et Transports doit démontrer que les informations qu’il ne souhaite pas divulguer remplissent cette condition. Il ne suffit pas de faire référence à une disposition dans un rapport sur lequel figure: “Confidentiel – contient des secrets d’affaires”. Le SPF Mobilité et Transports doit ensuite procéder à une mise en balance des intérêts dont il ressort que l’intérêt servi par la publicité ne l’emporte pas sur l’intérêt protégé. L’existence d’un intérêt général ne suffit donc pas. Lors de la mise en balance des intérêts, le SPF Mobilité et Transports dispose d’une marge d’appréciation discrétionnaire de sorte qu’il doit ressortir de la motivation concrète qu’il en a fait correctement usage. Enfin, la Commission souhaite attirer l’attention sur le principe de la divulgation partielle, sur pied duquel les seules informations d’un document administratif qui peuvent être soustraites à la publicité sont celles qui sont couvertes par un motif d’exception. Toute autre information contenue dans un document administratif doit être divulguée. Bruxelles, le 11 juillet 2019. F. SCHRAM K. LEUS secrétaire présidente