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Date: 16/12/2019
Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs Section publicité de l’administration 16 décembre 2019 AVIS n° 2019-150 CONCERNANT L’ACCES A UNE NOTE DE SERVICE ET AUX DOSSIERS POUR LESQUELS LA MODIFICATION DE LA SITUATION FAMILIALE A ÉTÉ ET EST RETENUE COMME CAS DE FORCE MAJEURE (CADA/2019/145) 2 1. Aperçu 1.1. Par lettre datée de 29 avril 2019 Madame X a demandé au SPF Finances de recevoir les documents suivants : - la note de service du 3 décembre 2007 ; - les dossiers pour lesquels la modification de la situation familiale a été et est retenue comme cas de force majeure depuis 2012. 1.2. Par lettre du 2 août 2019, elle met le SPF Finances en demeure. 1.3. N’ayant reçu aucune réponse, Madame X introduit par lettre du 13 septembre 2019, reçue le 20 septembre 2019, une demande d’avis à la Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs, section publicité de l’administration, ci-après la Commission. Dans la mesure où certains documents demandés peuvent contenir ou contiennent des données à caractère personnel, elle demande qu’au moment de la consultation, lesdites données soient rendues inidentifiables. Elle explique que son intérêt repose sur le fait qu’elle souhaite démontrer à travers le contenu de ces décisions que sa situation est similaire à celle contenue dans ces dossiers et qu’elle mérite aussi d’obtenir l’exonération du remboursement réclamée. 1.4. Dans son avis n° 2019-115 du 23 septembre 2019 la Commission a considéré que la demande d’avis était irrecevable. 1.5. La demanderesse introduit une nouvelle demande de reconsidération au SPF Finances et une nouvelle demande d’avis à la Commission par lettres du 5 octobre 2019. 1.6. Dans son avis n° 2019-127 du 17 octobre 2019 la Commission a considéré que la demande d’avis était irrecevable. 1.7. Par lettre datée du 24 octobre 2019 Madame X a demandé de nouveau au SPF Finances de recevoir les documents suivants : - la note de service du 3 décembre 2007 ; - les dossiers pour lesquels la modification de la situation familiale a été retenue comme un cas de ‘force majeure’ entre 2012 et 2019. 3 1.8. N’ayant reçu aucune réponse la demanderesse introduit par lettre du 21 novembre 2019 une demande de reconsidération au SPF Finances. Le même jour, elle demande à la Commission de donner un avis. 1.9. Par lettre du 3 décembre 2019 la demanderesse introduit une nouvelle demande de reconsidération au SPF Finances et une nouvelle demande d’avis à la Commission. 2. La recevabilité de la demande d’avis La Commission estime que la demande d’avis est recevable. Bien que la demanderesse ait introduit prématurément une demande de reconsidération et simultanément une demande d’avis le 21 novembre 2019, elle a introduit une nouvelle demande de reconsidération et une nouvelle demande d’avis dans le délai initial dans lequel la Commission est compétente pour donner un avis et ce, après que le délai dans lequel le SPF Finances doit être censé avoir pris une décision (tacite) de refus concernant sa demande initiale du 24 octobre 2019, était passé. 3. Le bien-fondé de la demande d’avis L’article 32 de la Constitution et la loi du 11 avril 1994 consacrent le principe du droit d’accès à tous les documents administratifs. L’accès aux documents administratifs ne peut être refusé que lorsque l’intérêt requis pour l’accès à des documents à caractère personnel fait défaut et lorsqu’un ou plusieurs motifs d’exception figurant à l’article 6 de la loi du 11 avril 1994 peuvent ou doivent être invoqués et qu’ils peuvent être motivés de manière concrète et pertinente. Seuls les motifs d’exception imposés par la loi peuvent être invoqués et doivent par ailleurs être interprétés de manière restrictive (Cour d’Arbitrage, arrêt n° 17/97 du 25 mars 1997, considérants B.2.1 et 2.2 et Cour d’Arbitrage, arrêt n° 150/2004 du 15 septembre 2004, considérant B.3.2). La Commission tient à signaler que pour évaluer si des restrictions s’appliquent au droit d’accès aux documents administratifs demandés, il y a lieu de faire une distinction entre d’une part la note de service du 3 décembre 2007 et les dossiers pour lesquels la modification de la situation 4 familiale a été considérée comme un cas de ‘force majeure’ entre 2012 et 2019. En ce qui concerne la note de service du 3 décembre 2007, la Commission ne voit en aucun cas de raison immédiate pour pouvoir justifier le fait d’invoquer un ou plusieurs motifs d’exception. Il en est autrement en ce qui concerne les dossiers individuels pour lesquels la modification de la situation familiale a été considérée comme un cas de ‘force majeure’ entre 2012 et 2019. Vu la nature de la question, les informations concernées doivent être considérées comme des informations à caractère personnel. La loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’information (ci-après: la loi du 11 avril 1994) définit en effet les informations à caractère personnel comme un « document administratif comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la description d'un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne”. La Commission estime que l’évaluation d’une situation familiale en relève également. Pour avoir accès aux informations qui doivent être qualifiées comme telles, le demandeur doit d’abord disposer de l’intérêt requis. En principe, l’intérêt qui est nécessaire pour avoir accès à de telles informations est le même que celui requis pour introduire une procédure en annulation auprès du Conseil d’Etat. Toutefois, le législateur n’a pas défini la notion dans la loi- même et la Commission a estimé que dans le cadre de la loi du 11 avril 1994, il y a lieu, vu la publicité de principe de tous les documents administratifs, d’interpréter cet intérêt avec flexibilité. La demanderesse invoque le fait qu’elle souhaite démontrer à travers le contenu l’exonération du remboursement réclamée. La Commission estime qu’il y a lieu de considérer que la demanderesse a l’intérêt requis. Disposer de l’intérêt requis ne suffit toutefois pas pour avoir accès aux documents administratifs demandés. Il y a en effet lieu de vérifier si un ou plusieurs motifs d’exception doivent ou peuvent être invoqués. La Commission estime qu’il n’est pas exclu que le SPF Finances puisse invoquer le motif d’exception visé à l’article 6 § 3, 3°, de la loi du 11 avril 1994. Celui-ci implique que l'autorité administrative fédérale peut rejeter une demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif dans la mesure où la demande 5 est manifestement abusive. Ce motif d’exception ne peut toutefois pas être invoqué sans raison. La Commission se réfère à cette fin à l’avis qu’elle a formulé de sa propre initiative sur ce motif d’exception, plus spécifiquement à l’avis n° 2019-33 qui peut être consulté sur son site Internet (www.documentsadministratifs.be ou via https://www.ibz.rrn.fgov.be/fr/commissions/publicite-de- ladministration/avis/). Ce motif d’exception ne peut être invoqué que si le SPF Finances peut citer concrètement plusieurs critères qui étayent le caractère manifestement abusif. Dans la mesure où le SPF Finances ne peut pas fournir de motivation suffisante pour ce qui concerne ce motif d’exception formel, il doit tenir compte du motif d’exception présent à l’article 6, § 2, 1° de la loi du 11 avril 1994. Celui-ci dispose que l'autorité administrative fédérale ou non fédérale rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif qui lui est adressée en application de la présente loi si la publication du document administratif porte atteinte à la vie privée, sauf si la personne concernée a préalablement donné son accord par écrit à la consultation ou à la communication sous forme de copie. Etant donné que les documents administratifs demandés sont présents dans des dossiers pour lesquels la modification de la situation familiale a été et est retenue comme cas de force majeure, ils portent indéniablement sur la vie privée des personnes concernées et la publicité de ces documents peut porter préjudice au respect de leur vie privée. Il ne suffit pas de supprimer les noms dans les documents administratifs concernés étant donné qu’en soi, les situations concrètes n’excluent pas de pouvoir identifier les personnes concernées. Dans la mesure où le SPF Finances peut le démontrer de manière concrète, il doit refuser l’accès aux documents administratifs demandés. Il n’est pas requis de procéder à une mise en balance des intérêts. 6 La Commission estime que le secret fiscal ne peut toutefois pas être invoqué en combinaison avec l’article 6, § 2, 2° de la loi du 11 avril 1994 parce que le secret fiscal ne s’applique qu’à l’égard des fonctionnaires fiscaux et non à l’égard du SPF Finances en qualité d’organisation. Le droit d’accès au document administratif est en effet exercé à l’égard d’une autorité administrative. Par ailleurs, le secret fiscal est formulé d’une manière qui a conduit à plusieurs interprétations dans la jurisprudence surtout en raison du fait que l’attention est attirée sur l’application du secret fiscal en dehors de l’exercice de la fonction uniquement. Bruxelles, le 16 décembre 2019. F. SCHRAM K. LEUS secrétaire présidente