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Date: 9/11/2009
Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs Section publicité de l’administration 9 novembre 2009 AVIS n° 2009-85 Sur l’applicabilité de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration lorsqu’une juridiction est saisie d’un litige (CADA/2009/49) 2 1. Récapitulatif En vertu de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration, Madame Jacqueline De Baets, Administrateur général du Fonds des Maladies professionnelles, a demandé à la Commission d’accès aux et de réutilisation des documents administratifs, section publicité de l’administration (ci-après : la Commission), de rendre un avis en réponse à une demande concrète d’accès à un procès-verbal du Fonds des Maladies professionnelles par une victime d’un accident de travail. 2. La recevabilité de la demande d’avis L’article 8, § 3, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration autorise les autorités administratives fédérales à consulter la Commission au sujet de l’interprétation de la loi précitée. Il ne saurait y avoir de doutes sur le fait que le Fonds des Maladies professionnelles est une autorité administrative fédérale. Cependant, la Commission répond uniquement à la demande d’avis dans la mesure où celle-ci peut être réduite à une demande relative à l’interprétation générale de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration. Ce n’est que dans cette mesure que la demande d’avis est recevable. La Commission ne se prononce par conséquent pas sur la demande concrète d’accès. 3. Le bien- bien-fondé de la demande d’avis La question fondamentale qui se pose dans ce cas est de savoir si la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration peut s’appliquer lorsqu’une juridiction est saisie d’un litige et que les documents administratifs demandés portent sur ce litige. Il ressort de la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE n° 51.549, 6 février 1995, Michaux ; CE n° 54.901, 29 août 1995, SA La Herseautoise ; CE n° 58.514, 8 mars 1996, Tarabichi en Keppens ; CE n° 59.897, 5 juin 1996, Delahaut-Paindavine ; CE n° 60.563, 27 juin 1996, Delwart ; CE n° 62.547, 14 octobre 1996, SA Electrification du Rail en Duchene ; CE n° 62.548, 14 octobre 1996, Simenon ; CE n° 66.860, 18 juin 1997, SPRL BA- WA ; CE n° 94.082, 16 mars 2001, Louis ; CE n° 94.419, 28 mars 2001, Swartenbroeckx en Vercruysse : CE n° 160.433, 22 juin 2006, Martin ; CE 3 n° 181.543, 31 mars 2008, Altruye ; CE n° 181.544, 31 mars 2008, De Jongh : CE n° 190.238, 5 février 2009, Vuzdugan) que cette juridiction se déclare incompétente pour se prononcer sur la demande d’annulation d’une décision de refus d’accéder aux documents administratifs si les conditions suivantes sont remplies : 1. la demande de publicité qui a été refusée vise à utiliser des documents devant une juridiction ; 2. la juridiction a déjà été saisie ; 3. le dépôt de ces documents peut être ordonné par cette juridiction. Dans l’arrêt Vuzdugan, le Conseil d’Etat énonce : "3.1. Bien que le Conseil d’Etat soit en principe compétent, sur la base de l’article 8, § 2, 4ème alinéa, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration, pour connaître des recours dirigés contre des décisions de refus de communication de documents administratifs, cette compétence peut être limitée de par le fait que la contestation relative à l’accès aux documents administratifs s’inscrit dans le cadre d’un litige pendant devant une autre juridiction. Il incombe donc à cette autre juridiction d’ordonner ou non le dépôt des pièces concernées. Le Conseil d’Etat interviendrait dans le litige pendant devant cette autre juridiction s’il se prononçait sur la légitimité du refus de l’administration d’accorder au demandeur l’accès aux pièces visées. La compétence du Conseil d’Etat, qui lui est conférée par l’article 8, § 2, 4ème alinéa, de la loi du 11 avril 1994, cesse dès lors d’exister lorsqu’a été saisie une juridiction qui, dans le respect du droit de la défense, peut ordonner le dépôt de documents. Certes, il n’y a aucune garantie que la juridiction ordonnera le dépôt de ces pièces, mais il n’appartient pas au Conseil d’Etat d’éviter le risque d’un éventuel rejet de la demande de dépôt ou de communication". De ce que le Conseil d’Etat se déclare incompétent pour intervenir dans des litiges pendants, il ne peut toutefois se déduire que la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration ne serait pas applicable dans ces cas-là. La loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration s’applique en principe à tous les documents administratifs. La raison pour laquelle une personne souhaite avoir accès aux documents administratifs et ce qu’elle entend en faire une fois obtenus, ne peut en principe pas influencer la réponse apportée à sa demande d’accès. En vertu de l’article 32 de la Constitution, des motifs d’exception et d’autres restrictions à ce 4 principe peuvent uniquement être fixés par une loi, un décret ou une ordonnance. Ce point de départ fondamental se dégage tant des travaux parlementaires préparatoires de l’article 32 de la Constitution et de la loi du 11 avril 1994, que de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et du Conseil d’Etat. La Commission constate que le législateur n’a inclut aucun motif d’exception spécifique dans la loi du 11 avril 1994, qui permette de refuser l’accès pour le motif que le document porte sur un litige qui est pendant devant une juridiction. Par ailleurs, le législateur n’a pas non plus voulu porter atteinte aux procédures existantes devant des juridictions leur permettant d’ordonner la publication, ni aux rapports entre les juridictions. La Commission est par conséquent d’avis qu’une administration peut faire application de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration lorsqu’il lui est demandé de publier un document administratif, indépendamment du fait qu’une juridiction ait été saisie et de la question de savoir si le document porte sur ce litige. Il se peut néanmoins, en vertu de la jurisprudence du Conseil d’Etat, que, pour avoir accès au document administratif en question après un refus définitif de l’administration, le demandeur doive s’adresser à la juridiction compétente pour se prononcer sur le litige. C’est cette juridiction – peut-être le Conseil d’Etat lui-même – qui devra juger, dans le cadre de la solution du litige, si le document administratif concerné est nécessaire pour se prononcer et, le cas échéant, ordonner son dépôt. Bruxelles, le 9 novembre 2009. F. SCHRAM J. BAERT Secrétaire Président